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Enquête

L'Etat a de petits moyens

Enquête | publié le : 21.11.2006 | L. G.

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L'Etat a de petits moyens

Crédit photo L. G.

L'Etat a un droit de contrôle sur les fonds de la formation professionnelle. Mais ce travail est difficile, et moins de 2 % des sommes vérifiables par les agents de l'Etat l'ont été effectivement en 2004. L'autocontrôle sera-t-il l'avenir ?

Difficile de contrôler les circuits empruntés par quelque 23 milliards d'euros quand on a sous la main, en tout et pour tout, 153 agents du ministère du Travail. Ceux-ci étaient, en effet, en charge des missions de contrôle de la formation professionnelle au 30 juin 2005, pour 115 en 2000 (équivalent temps plein) et 143 en 2004, précise le rapport de la DGEFP (Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle), intitulé Le contrôle de la formation professionnelle en 2003 et 2004, rendu public en juin dernier par La Documentation française.

Statutairement, les agents en charge des vérifications peuvent être des contrôleurs du travail, des inspecteurs ou des inspecteurs principaux de la formation professionnelle, des inspecteurs, directeurs adjoints ou directeurs du travail.

Outre leurs missions de contrôle, ces agents effectuent des tâches de gestion administrative. En moyenne, sur quatre années d'exercice (2001 à 2004), les inspecteurs et contrôleurs du travail affectés au contrôle de la formation professionnelle ont effectué 12 vérifications. Entreprises, organismes de formation et collecteurs de fonds en sont les sujets. En 2004, 2 073 opérations de vérification ont été diligentées, soit 1,4 % des structures concernées, contre 1 366 contrôles un an plus tôt. Ainsi, en 2004, 1 237 contrôles ont été réalisés sur la participation à la formation de la part des employeurs de 10 salariés et plus (79 millions d'euros contrôlés).

226 vérifications administratives

Les services de l'Etat ont également procédé à 226 contrôles administratifs et financiers de l'activité des organismes de formation (176 millions d'euros de chiffre d'affaires contrôlés) et à six seulement d'Octa (collecteur de la taxe d'apprentissage, 6,35 millions d'euros contrôlés).

Près de 390 contrôles ont été engagés sur des conventions bénéficiant de financements du FSE (112 millions d'euros de dépenses contrôlés, dont 57 millions d'euros au titre du FSE). Au total, les montants financiers vérifiés en 2004 s'élevaient à 453 millions d'euros, soit moins de 2 % des sommes contrôlables, contre 3,25 % en 2003. En 2004, près de 22 millions d'euros de redressement ont été prononcés, soit près de 5 % des sommes vérifiées.

Fonction stratégique «d'audit système»

Le contrôle administratif de ces sommes se révélant de plus en plus difficile, la DGEFP avance que le renforcement du rôle des collecteurs des fonds de la formation professionnelle ou de la taxe d'apprentissage amènera ces organismes à jouer, par la force des choses, « un rôle de plus en plus important dans la régulation » de la formation professionnelle, donc dans le contrôle même. Mais, pour que les contrôlés deviennent contrôleurs, les auteurs du rapport de la DGEFP estiment que l'Etat doit s'assurer de « la fiabilité des systèmes de régulation collective et contractuelle mis en place ». Et de plaider en faveur d'une « fonction stratégique et permanente «d'audit système», complétée et éclairée par les contrôles traditionnels de terrain ».

L'Etat n'entend pas pour autant abandonner tout rôle : le projet de loi de finances pour 2007 fixe à 1,3 % la proportion des entités contrôlées par rapport à l'ensemble du champ du contrôle de la formation professionnelle, soit 3,4 % de la masse financière contrôlable, contre 2,15 % en 2004.

Le rapport est accessible sur : <http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/064000480/0000.pdf>

Collecteurs «dépasseurs»

En 2004, 21 organismes collecteurs n'ont pas respecté le plafonnement des frais de gestion et d'information qui leur est appliqué, dont neuf Fongecif (fonds interprofessionnel régional de gestion du CIF), trois Opca de branche, un Agecif (association de gestion du CIF au sein d'un groupe ou d'une entreprise) et cinq Opcareg (collecteur régional interprofessionnel).

Situation ubuesque

Les frais de gestion des collecteurs ont parfois fait l'objet de pratiques limites, mais, à la décharge de ces institutions financières paritaires, la situation peut être ubuesque. Du fait que ces frais dépendent, pour moitié, de la collecte réalisée (en début d'année) et, pour une autre moitié, des décaissements de l'année (constatés en fin d'année), la définition du montant de frais possibles et son respect ne sont pas toujours simples.

Ainsi, aussi bizarre que cela puisse paraître, les Opca ont parfois du mal à obtenir les factures des organismes de formation ou les attestations de présence des formés. Ces retards freinent les paiements (décaissements) des Opca et réduisent mécaniquement leur enveloppe de frais de gestion possible. Ils se trouvent alors en dépassement, mais un dépassement involontaire, voire infondé. Un Opca a ainsi constaté qu'un de ses gros adhérents avait, suite à la réforme, permuté les anciens contrats d'adaptation en contrats de professionnalisation avec formation interne. Les temps de traitement administratif des formations internes de cette (très grande) entreprise sont si longs que l'Opca en question sait, d'ores et déjà, qu'il sera en dépassement en 2006, alors qu'il ne demande qu'à respecter les règles financières !

Une solution serait la création d'un compte «factures à provisionner» dans les bilans des collecteurs, ce qui permettrait de plaider la bonne foi, mais le plan comptable des Opca ne le permet pas. Bercy n'a d'ailleurs pas forcément intérêt à trouver la solution, car le ministère des Finances garde ainsi la possibilité de ponctionner les trésoreries «excessives».

23 milliards d'euros

Globalement, le volume des financements contrôlables atteint 23 milliards d'euros par an, dont :

> 8,1 milliards d'euros de dépenses facturées à plus de 64 000 organismes de formation ;

> 7 milliards d'euros au titre des versements effectués par la centaine de milliers d'entreprises de 10 salariés ;

> 5,6 milliards d'euros gérés par une centaine d'Opca ;

> 1,25 milliard d'euros gérés par 139 Octa (collecteurs de la taxe d'apprentissage) ;

> 876 millions d'euros attribués notamment au réseau des missions locales, aux centres de bilan de compétences et aux Carif (Centres d'animation et de ressources de l'information sur la formation) ;

> 672 millions d'euros provenant du FSE...

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  • L. G.