«La Cram a calculé que les postes de travail de mon entreprise sont 1 000 à 5 000 fois au-dessus des normes de protection ordinaire. » Joseph Nassar s'enorgueillit de l'investissement pour l'amélioration des locaux qu'il a mené au sein de Créadent, son entreprise. Depuis septembre 2005, celle-ci est flambant neuve. Le projet a exigé deux ans et demi d'efforts, 500 000 euros de travaux, et il a remporté, en mai dernier, un trophée lors de la Semaine pour la qualité de vie au travail organisée par l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact).

Installée à Amiens, Créadent, qui emploie 14 personnes pour un chiffre d'affaires annuel d'un million d'euros, est spécialisée dans la fabrication de prothèses dentaires. Un secteur à risques : lésions respiratoires, auditives, articulaires, ophtalmologiques, problèmes lombaires et cervicalgies, exposition aux brûlures. « La maladie professionnelle dans notre branche, c'est la silicose, évoque Joseph Nassar. Pour polir, nous travaillons avec des matériaux chargés en silice. La parade, c'est le système d'aspiration ; 10 % de mon investissement est passé dans son amélioration. Aujourd'hui, la protection offerte est 300 fois supérieure à celle d'une installation conventionnelle. »

Aussi, la Cram s'est montrée très intéressée quand, en 2005, au cours d'une visite d'information sur la prévention, le chef d'entreprise a parlé de son projet. Une subvention à hauteur de 50 000 euros a été débloquée. Pour fournir cette aide, réservée aux entreprises de moins de 200 salariés, la Cram a exigé la remise d'un rapport sur le bénéfice santé pour chaque nouvelle installation. Ainsi, le remplacement des chalumeaux par une soudeuse laser a été justifié par la suppression des risques de brûlure et d'explosion. Outre la sécurité, l'objectif visé était aussi le confort. L'ergonomie et l'éclairage sont soignés. Tous les postes de travail sont individualisés, isolés par de grandes baies vitrées. L'organisation du travail participe également à une bonne qualité de vie. Les horaires sont désormais choisis.

« J'ai eu des difficultés avec les banquiers, reconnaît Joseph Nassar. Il a fallu du temps pour les persuader que privilégier les conditions de travail conduit à un retour rapide sur investissement. » Les résultats lui donnent aujourd'hui raison. Ses salariés, et surtout ceux qui ont travaillé dans d'autres laboratoires, se disent heureux. La fatigue, notamment mentale, est moindre du fait de la réduction des nuisances. « Mon passé d'ancien salarié m'a appris que l'environnement influe sur l'ardeur au travail, confie-t-il. Depuis que les nouveaux locaux sont terminés, je constate une progression de la qualité fournie, une meilleure implication, c'est ce que je voulais . »

PATRICIA SUDOLSKI