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Enquête

« L'idée de la CGC se heurte au principe de non-discrimination »

Enquête | ENTRETIEN AVEC | publié le : 07.11.2006 | E. F.

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« L'idée de la CGC se heurte au principe de non-discrimination »

Crédit photo E. F.

E & C : Que pensez-vous de la proposition de la CFE-CGC de réserver l'application d'un accord d'entreprise aux seuls adhérents d'un syndicat ?

J.-E. R. : Que l'obtention de droits soit subordonnée à l'accomplissement de devoirs est une bonne idée. Or, en France, tous les salariés, même les non syndiqués, sont couverts par un accord signé par des organisations syndicales ; ils n'ont donc guère d'intérêt à adhérer puisqu'ils bénéficient des avantages de l'accord sans en payer le prix, dans le secteur privé cela peut être, outre la cotisation, des risques sur l'évolution de la carrière, sur la rémunération, voire sur l'emploi...

Même principe d'extension, mais qui, cette fois, dit son nom, lorsque le ministre du Travail prend l'arrêté d'extension d'une convention de branche, couvrant ainsi les salariés de toutes les entreprises du secteur, dont pourtant l'employeur n'est pas adhérent au syndicat patronal. C'est ainsi qu'en France, l'écart est unique au monde entre le nombre de salariés syndiqués (6 %) et ceux couverts par une convention collective (94 %).

Notons que, si l'extension est défavorable aux syndicats de salariés, elle est au contraire favorable au syndicalisme patronal : une grande entreprise a tout intérêt à adhérer pour négocier la convention, plutôt que de se la voir imposée quelques mois plus tard avec l'arrêté d'extension.

E & C : Voyez-vous des obstacles juridiques majeurs à la réalisation de cette proposition ?

J.-E. R. : Elle se heurte à l'article L 412-2 du Code du travail, qui interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat pour tout ce qui a trait à la vie professionnelle. Une augmentation de salaire réservée aux adhérents d'un syndicat tomberait sous le coup de cet article. Il s'agit d'un conflit entre «l'effet relatif du contrat» - une personne ne peut être liée que si elle l'a voulu -, et le principe de non-discrimination qui impose que 100 % des salariés bénéficient d'un accord.

E & C : N'est-il pas alors plus simple de rendre la syndicalisation obligatoire, comme le propose Ségolène Royal ?

J.-E. R. : Nous ne sommes pas aux Etats-Unis, avec les mécanismes de l'union shop et du check-off. La liberté de se syndiquer (ou non) est rappelée par l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 11 janvier 2006, le Préambule de notre Constitution de 1958 et le jugement Roger/Le Monde de 1971.

Auteur

  • E. F.