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Quand le DIF permet de préparer sa retraite

Dossier | publié le : 26.09.2006 | Aurore Dohy

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Quand le DIF permet de préparer sa retraite

Crédit photo Aurore Dohy

La filiale française de Campbell, spécialiste américain de la soupe conditionnée, utilise le DIF pour former ses salariés à la gestion de leur capital retraite. Et ce, dès l'âge de 35 ans.

Au cours de l'année 2005, la société Campbell France, propriétaire des marques Royco, Liebig et Lesieur Sauces, a imaginé, dans le cadre du DIF, un module de formation destiné à «préparer et optimiser sa retraite» : le projet «Retr'aide». Testée en décembre sur le site de Grande Synthe (59), la formule a séduit la quasi-totalité des 100 salariés : trois sessions ont dû être ajoutées aux six initialement prévues. Sur le site du Pontet (84), la formation a commencé en juin dernier avec cinq premières sessions.

Besoin d'information

Succès prévisible dans une entreprise vieillissante ? Pas exactement. Avec 35 ans de moyenne d'âge pour les cadres et 40 ans pour les ouvriers, la retraite n'est vraisemblablement pas une priorité pour les salariés. Justement !, affirme-t-on chez Campbell : à l'heure de l'instabilité croissante des parcours professionnels et de la diminution de la population active, la retraite devrait être un sujet d'actualité dès 35 ans.

Dans l'entreprise, un besoin d'information avait été identifié depuis longtemps. « C'est un salarié de 59 ans, découragé de devoir renoncer à six trimestres d'apprentissage non validés qui, le premier, m'a fait prendre conscience de la nécessité de bien anticiper son départ, explique Samuel Dewitte, le directeur des relations sociales. Il n'existait alors, sur le marché, aucun outil susceptible d'informer les salariés de manière complète et non mercantile. L'instauration du DIF a créé l'opportunité de répondre à ce besoin. En donnant envie aux salariés d'utiliser leur DIF dès à présent, il permettait également de prévenir une explosion des compteurs. » En revanche, hors projet Retr'aide, la DRH n'a reçu, et accepté, qu'une seule demande de DIF (pour une formation en anglais).

Formation hors logique productive

Chez Campbell, où la catégorisation du plan de formation n'a pas encore été établie, plus de la moitié du plan concerne traditionnellement les formations «métiers», le reste se répartissant entre les formations sécurité, management et anglais - une nécessité pour cette filiale d'entreprise américaine. A l'exception de formations anglais et bureautique en accès libre dans un centre de ressources créé en 2002, le projet Retr'aide est donc la seule formation hors logique productive. « L'entreprise se préoccupe de l'après-vie professionnelle. C'est un geste social fort », explique Samuel Dewitte.

Module adapté

Pour concevoir un module ad hoc, Campbell a fait appel à Créa Développement, un organisme de formation nordiste, spécialisé dans la finance adaptée aux RH. L'ingénierie a été entièrement subventionnée par l'Agefaforia, l'Opca de l'industrie agroalimentaire, à hauteur de 13 000 euros. La faiblesse des demandes de DIF en 2006, au niveau de la branche, a également rendu possible la totale prise en charge des coûts pédagogiques, via le 0,5 % de professionnalisation.

La formation, par groupes de huit, se décline en catégories cadre, maîtrise et ouvrier. Elle est organisée sur deux jours, pendant le temps de travail. Après une introduction sur la retraite de base et la retraite complémentaire, les stagiaires, préalablement informés par courrier de la liste des documents à réunir, sont invités à calculer, via une application informatique, le montant présumé de leur retraite et de celle de leur conjoint. « Très souvent, c'est la douche froide, reconnaît Yann Carin, responsable formation chez Créa Développement. En particulier pour les cadres qui, depuis la réforme de 2003, perdent en moyenne 40 % de leurs revenus. »

Cas d'école

A partir d'un cas d'école - Mr Dubois, 45 ans, marié, père de famille et très désireux d'assurer ses vieux jours -, le formateur passe alors en revue l'ensemble des dispositifs internes (Perco, PEE, article 39, article 83...) et externes (rachat des trimestres, Perp, PEA, assurance vie...) qui permettent d'optimiser et de transmettre un capital retraite.

La session s'achève par un tour de table des préoccupations restantes, parmi lesquelles, championne toutes catégories, la question de la protection du conjoint survivant et des pensions de réversion.

Chez Campbell, où l'on reconnaît avoir concentré, cette année, la réflexion sur le DIF autour de Retr'aide, la stratégie s'est révélée payante, avec une forte adhésion des salariés et des syndicats.

Aide à la gestion personnelle

Dans les cartons de la DRH, un projet DIF pour 2007 s'intitule «Budg'aide» et se définit comme une aide à la gestion du budget personnel. Selon la direction des ressources humaines, qui espère réitérer le succès de 2006, si la difficulté, identifiée, cette fois, de nombreux cas de surendettement conduisant à des saisies sur salaire, est bien moins transversale que le manque d'anticipation de la retraite, elle n'en est pas moins forte.

Contrat de professionnalisation et groupement d'employeurs

- En matière de contrats de professionnalisation et, plus largement, de contrats d'alternance pour les jeunes, Campbell a une double pratique. Dix contrats d'apprentissage et huit de professionnalisation sont aujourd'hui directement enregistrés dans l'entreprise. Mais elle partage également d'autres contrats d'alternance avec des entreprises dans le cadre d'un groupement d'employeurs pour l'insertion et la qualification (Geiq) : le GE Geste Vaucluse.

- A l'origine, en 1994, le producteur de soupe Liebig (aujourd'hui Campbell France) et le producteur de boisson Schweppes (aujourd'hui Européenne d'embouteillage) prennent conscience de la complémentarité de leurs besoins saisonniers. Ils se partagent déjà certains salariés, en particulier via l'intérim. Afin de mieux les fidéliser, les deux employeurs créent un Geiq : le Geste Vaucluse.

- Dix ans plus tard, ce Geiq compte 15 entreprises adhérentes et a signé 500 contrats d'une durée de 12 à 24 mois : CIE, contrats de qualification, aujourd'hui de professionnalisation.

- En 1998, une convention avec le ministère de l'Agriculture lui permet de créer son propre diplôme. En 2000, un second GE, nommé Geode, étend l'initiative avec des CDI (18 contrats en 2006). Et, en 2003, en partenariat avec un autre Geiq des Bouches-du-Rhône, Geste améliore l'individualisation de ses parcours de formation en créant son propre organisme de formation : le Centre de formation aux métiers de l'agroalimentaire et des fruits et légumes, basé à Châteaurenard (13).

Campbell france

> Secteur : agroalimentation (soupes).

> Effectifs : 500 personnes.

> Chiffre d'affaires 2005 : 250 millions d'euros.

«Retr'aide» essaime

Depuis sa mise en route chez Campbell, le concept «Retr'aide» a été vendu et adapté à d'autres entreprises, dont SFR Cegetel et les Autoroutes du Sud de la France (ASF). Avec, parfois, une logique différente : aux ASF, où elle figure dans le catalogue DIF, la formation est réservée aux plus de 55 ans. Animé par un psychologue, un troisième jour intitulé «Comment se construire un nouveau projet de vie» vient compléter le module.

Auteur

  • Aurore Dohy