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Le tabac mis à la porte

Enquête | publié le : 12.09.2006 | Violette Queuniet

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Le tabac mis à la porte

Crédit photo Violette Queuniet

Tous les établissements de la filiale de distribution de Renault sont non-fumeurs depuis le 1er septembre dernier. Une aide financière est prévue pour ceux qui désirent arrêter de fumer. Plus délicate est la gestion des temps de pause pour les fumeurs.

Pour acheter une voiture Renault, il faudra désormais être non fumeur... ou écraser sa cigarette à l'entrée du magasin : les 150 sites français de Reagroup, filiale de distribution de Renault, sont, en effet, non-fumeurs depuis le 1er septembre 2006. L'entreprise a souhaité « se mettre en cohérence avec la politique générale de Renault vis-à-vis de la sécurité, indique Alain Lévy, le DRH. Nous commercialisons la gamme la plus sûre au niveau mondial, nous participons aux campagnes de sécurité routière. Rendre les sites non- fumeurs participe du même souci de sécurité vis-à-vis du public ».

L'interdiction de fumer concerne aussi bien les clients que les salariés.

Six mois de préparation

Les établissements, qui comportent des ateliers de réparation, des show rooms et des comptoirs de vente, ont eu six mois pour se préparer à l'application de cette mesure annoncée en mars au CCE. Une période consacrée à la modification du règlement intérieur, à la préparation et à l'accompagnement du personnel. L'information est passée par chaque comité d'établissement et les représentants du personnel ont été consultés. S'ils sont majoritairement favorables à la mesure, ils s'inquiètent de sa mise en oeuvre. La question des pauses est au centre des préoccupations.

« Prévention ne doit pas rimer avec sanction pour le personnel qui irait fumer à l'extérieur, souligne Alain Bridet, secrétaire adjoint CGT du CCE et délégué du personnel de l'établissement Renault Le Bouscat, près de Bordeaux. Que se passera-t-il pour le salarié qui sortira plusieurs fois dans la journée alors qu'on ne nous parle que de productivité ? Certains non-fumeurs se plaignent aussi d'un manque d'équité puisqu'ils n'ont pas de pauses cigarette. »

Fumer dehors

Pour le DRH de Reagroup, la question des pauses n'est pas vraiment nouvelle : « Elles continueront à être tolérées mais, au lieu d'aller fumer dans un local spécifique, les salariés iront fumer dehors. La difficulté provient davantage des différences de traitement entre fumeurs et non-fumeurs. Mais il faut faire confiance à chaque manager pour que chacun vive ses conditions de travail le mieux possible. »

Alain Lévy souligne aussi que la généralisation des établissements non-fumeurs vient en complément d'une démarche structurée en matière de prévention des risques dans les établissements et, notamment, les garages, où les conditions de travail sont plus difficiles.

Aide au sevrage

Dans ce contexte, certains salariés peuvent être amenés à vouloir décrocher de la cigarette. Reagroup accorde une aide de 30 euros par personne pour aider au sevrage. Aucune démarche d'accompagnement n'est imposée : elle est laissée au libre choix des responsables RH et des médecins du travail de chacun des 150 établissements.

Un bilan sera effectué dans un an. « D'ici là, des besoins se seront sans doute exprimés, des bonnes pratiques auront émergé pour nous aider à construire une nouvelle politique de communication et d'accompagnement, avec les moyens appropriés », indique Alain Lévy. Pour l'heure, le budget de l'opération est de l'ordre de « quelques centaines de milliers d'euros ».

Reagroup

> Activité : filiale européenne de distribution de produits et de services de Renault (véhicules neufs, d'occasion, réparation).

> Effectifs : 15 000 salariés, dont 10 000 en France.

> Chiffre d'affaires : 9 milliards d'euros en 2005.

De moins en moins de fumeurs chez Renault

- La première campagne visant à rendre un site Renault non-fumeur date de 1998 et concernait l'usine de Sandouville, en Normandie. Depuis, des campagnes se sont régulièrement succédé dans d'autres établissements, y compris dans les pays d'Europe où l'entreprise possède des sites de production, ainsi qu'au Brésil. Au total, plus de 60 000 salariés sont concernés.

- Dans chaque établissement, les salariés souhaitant arrêter de fumer peuvent consulter gratuitement un tabacologue sur leurs heures de travail. S'ils doivent entamer un traitement substitutif, celui-ci peut être pris en charge partiellement par l'entreprise (à hauteur de 50 % ou les cinq premières semaines).

- Enfin, les salariés peuvent trouver une aide réelle auprès des services de médecine du travail. La plupart se sont formés à la tabacologie et à l'aide au sevrage auprès de l'Office français du tabac, de l'Institut Pasteur de Lille ou d'autres services de tabacologie. « Plus généralement, beaucoup d'équipes sont formées au changement de comportement pour d'autres addictions, et le sevrage du tabac en fait partie. Toute la question est de savoir comment un conseil médical peut être entendu et suivi d'effets », explique Guillemette Latcha, médecin-coordonnateur de Renault. Les résultats sont toutefois encourageants : le taux de fumeurs est passé de 34 % à 30 % en France, entre 2003 et 2005.

Auteur

  • Violette Queuniet