Dans les années 1990, on a cru que l'élargissement de l'Europe aux pays de l'Est se solderait par une immigration massive de travailleurs en provenance de ces pays. En effet, puisqu'une des libertés fondamentales du marché commun est la libre circulation des personnes, il y avait tout lieu de croire que le différentiel économique et social entre les anciens membres et les entrants conduirait une frange importante de la population à chercher du travail chez ses voisins plus riches.

Mais, au fil du temps, ces principes de libre circulation ont été remis en cause et le cas des travailleurs a été distingué du cas des simples voyageurs. Concernant l'emploi, la définition d'une période transitoire a maintenu le système d'avant l'élargissement : les nouveaux citoyens européens doivent toujours obtenir un permis de travail, et ce, malgré une règle de préférence pour ces travailleurs quand c'est possible avec des ressortissants non européens. Le plombier français n'est donc pas près de se voir voler son emploi par le plombier polonais.

Mais quelle sera demain la situation ? Victoria Tonev Stratula fait le point sur les législations et s'interroge sur la question de savoir si la période transitoire change la signification de l'élargissement. Son étude, au final, cherche à mettre en lumière qui sont, sur le plan social, les vrais bénéficiaires et les vrais perdants de l'élargissement, tant sous sa forme actuelle que sous la forme qu'elle est destinée à prendre, quand les obstacles à la libre circulation des travailleurs seront véritablement levés.

Victoria Tonev Stratula est juriste, diplômée du DEA droit de l'économie, de l'université de Bourgogne.