E & C : Qu'attendez-vous du congrès de la CFDT, qui se tient actuellement ?

R. R. : A mon sens, ce congrès arrive trop tôt ou trop tard. Trop tôt, car la CFDT n'est pas encore guérie de la blessure «retraites». Trop tard, parce qu'elle a perdu ses marques et ses partenaires historiques : un Medef inaudible socialement, un gouvernement et des organisations syndicales (OS) qui ont d'autres chats à fouetter, et une Europe sur laquelle souffle un vent libéral venu de l'Est. Elle ne peut pas reconstruire toute seule le système social.

E & C : Comment les relations entre les DRH et la CFDT évoluent-elles depuis quelques années ?

R. R. : Dans les années 1980-1990, les militants CFDT ont inspiré un certain respect, pour leur courage à adopter des positions pas forcément populaires, et pour leur capacité à intégrer les méthodes modernes de GRH, comme la GPEC. Cela a marché tant qu'il y avait des échanges possibles. Désormais, pour sauver l'essentiel, l'Etat et les entreprises exigent des sacrifices, ce qui amène certains DRH à dire : pourquoi chercher des accords ? Si la CFDT signe seule, elle se saborde ! Davantage engagée dans la modernisation des rapports sociaux, la CFDT est aussi plus touchée que les autres OS par la morosité ambiante.

E & C : La mise en place d'une majorité d'engagement pourrait-elle faire évoluer la relation DRH/syndicats, notamment la relation DRH/CFDT ?

R. R. : Cela va obliger les deux parties à prendre à témoin la «base». Plus question de mettre les salariés devant le fait accompli. Cela veut dire qu'il faudra davantage les associer aux négociations. Cela signifie aussi que les OS devront porter une attention plus grande aux réelles aspirations des salariés, afin de ne pas reproduire les erreurs des 35 heures. Si ce problème se pose pour toutes les OS, je pense que la CFDT, par sa sensibilité spécifique et par ses méthodes propres, est assez bien outillée pour y faire face.