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Il faut attirer les étudiants étrangers sans fixer de quotas

Demain | Aller plus loin avec | publié le : 13.06.2006 | Rodolphe Helderlé

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Il faut attirer les étudiants étrangers sans fixer de quotas

Crédit photo Rodolphe Helderlé

Développer la culture et l'économie françaises à l'international au travers de son enseignement supérieur constitue un enjeu majeur. Il est plus efficace pour une entreprise de recruter à l'étranger des cadres locaux ayant suivi leur formation en France. Mais la concurrence est rude entre les pays pour attirer les meilleurs étudiants.

E & C : EduFrance a pour mission de promouvoir l'enseignement supérieur français auprès d'étudiants étrangers dont vous facilitez l'accueil. Quel est votre bilan et quelles sont les principales motivations d'un pays pour attirer chez lui plus d'étudiants étrangers que ses voisins ?

Thierry Audric : La France a accueilli 250 000 étudiants étrangers en 2004. Ce nombre est comparable à celui de l'Allemagne ; il est de 300 000 en Grande-Bretagne. Ce sont nos principaux concurrents directs. Les Etats-Unis sont loin devant, avec un total de 580 000 étudiants étrangers, chiffre qui s'est stabilisé depuis le 11 septembre 2001. Depuis la création d'EduFrance, en 1998, le nombre d'étudiants étrangers qui passent par les universités ou les écoles d'ingénieurs françaises a progressé de 66 %.

L'enjeu dépasse largement le strict cadre de la promotion de l'enseignement supérieur. Au global, il peut être plus efficace pour une entreprise française qui se développe à l'international de recruter localement des personnes ayant suivi leurs études en France. Indépendamment du recrutement, voilà des profils qui représentent aussi des contacts privilégiés pour développer des relations commerciales et des partenariats. Les services des ambassades proposent des annuaires des anciens boursiers et, plus globalement, des anciens élèves ayant suivi des études en France. Des associations d'anciens existent.

E & C : Quels sont les priorités et les moyens d'EduFrance ?

T. A. : Nous axons notre effort de promotion sur l'Asie et l'Amérique du Sud depuis 1998, au travers de nos 88 bureaux étrangers. Depuis un an, les étudiants européens sont une priorité, car nous avons pris du retard. Ce sont les étudiants en master et en doctorat, sur des disciplines relatives à la gestion et à l'ingénierie, que nous ciblons prioritairement. Les actions de promotion passent par l'organisation de saons à l'international, l'Internet, avec, notamment, un programme qui donne la possibilité aux étudiants en master de ne remplir qu'un seul dossier de candidature en ligne, qui est ensuite transmis à 60 écoles d'ingénieurs.

E & C : Comment associez-vous les entreprises à votre démarche ?

T. A. : A la différence de la concurrence, la France a, pendant longtemps, attiré principalement des profils de futurs chercheurs ou fonctionnaires. En ciblant, désormais, nos actions de promotion sur les disciplines relatives au développement économique, nous répondons davantage aux besoins des entreprises.

Les profils des associations d'anciens évoluent. Sur nos salons internationaux, désormais, nous invitons les entreprises françaises à être présentes sur des stands. Au travers du réseau N + i, qui fédère 60 écoles d'ingénieurs, nous avons lancé, il y a deux ans, un programme qui vise à inciter les entreprises à financer des bourses d'étudiants étrangers pendant deux ans - 2e et 3e années. Tout est fait pour faciliter l'intégration : logement, apprentissage du français, premier semestre de transition. Le coût est d'environ 27 000 euros pour les deux années. Cela ne coûte pas plus cher qu'un chasseur de têtes, et les risques de se tromper sont bien moindres. Nous avons beaucoup de retard par rapport aux Etats-Unis ou à la Grande-Bretagne en matière de financement de bourses d'études par les entreprises. Il y a une véritable chasse aux talents dans ce domaine. Cette capacité à anticiper permet de recruter dans les meilleures conditions. Pour le moment, une quarantaine de bourses privées ont été financées. Pour les PME, certaines bourses peuvent être cofinancées par les régions.

E & C : La récente loi sur l'immigration comporte un volet sur les étudiants étrangers. N'y a-t-il pas un risque de voir introduire des notions de quotas en fonction de certaines disciplines ou de certains pays ?

T. A. : Recevoir des étudiants étrangers ne relève pas, à mon sens, d'une problématique d'immigration. Très peu de ces étudiants restent en France. L'étudiant étranger n'est pas un véritable immigrant. Introduire une logique de quotas ne nous faciliterait pas la tâche. L'image de la France serait écornée auprès des étudiants étrangers. Même pour ceux qui seraient amenés à suivre leurs études en France. Aucun de nos concurrents n'a mis en place de quotas pour les étudiants. Notre intérêt est, tout au contraire, d'en accueillir un maximum.

(1) EduFrance est un GIP créé en 1998 par les ministères français de l'Education et des Affaires étrangères.

Don Quichotte, Miguel de Cervantes Saavedra.

Les pensées, Blaise Pascal.

Théorie de la pauvreté de masse, J.-K. Galbraith, Gallimard, 1980.

parcours

Thierry Audric est, depuis 2002, directeur général d'EduFrance. Il a occupé, à Paris, les postes de sous-directeur, puis de directeur adjoint pour la coopération universitaire et la recherche au ministère des Affaires étrangères.

Ingénieur des Ponts et Chaussées, il a réalisé l'essentiel de sa carrière comme conseiller d'ambassade pour la coopération au Québec, en Corée, en Indonésie, en Chine et en Inde.

Auteur

  • Rodolphe Helderlé