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Les Pratiques

Contre les pénuries de compétences, Spontex mise sur la GPEC

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 16.05.2006 | Patricia Sudolski

Pressée par un grand nombre de départs à la retraite anticipés, en 2004, l'usine Spontex de Beauvais s'est convertie à la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences). Des dispositifs de VAE et de formation l'ont accompagnée.

Quand, en mai 2003, est survenue l'annonce gouvernementale selon laquelle les salariés ayant commencé à travailler entre 14 et 16 ans allaient pouvoir prendre leur retraite anticipée, au site de fabrication des éponges Spontex, à Beauvais, dans l'Oise, ce fut l'alerte. « Notre effectif était alors de 350 personnes, dont 150 de plus de 50 ans. On connaissait leur nombre d'années d'ancienneté dans notre entreprise, mais pas l'historique de leur carrière », raconte Luc Ventre, directeur du site.

Culture industrielle

Or, l'Oise a une vieille culture industrielle, ses habitants ont souvent commencé très jeunes à travailler. « Les départs attendus s'annonçaient nombreux, dont plus de 60 % parmi la main-d'oeuvre directe. Cela pouvait désorganiser la production », indique le directeur. Le recours à la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) s'est donc imposé.

C'est à Spontex-Beauvais qu'est née la première éponge, en 1933. L'ancienneté du site explique que la moyenne d'âge y est, encore aujourd'hui, de 51 ans. « Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, 1 800 personnes y étaient employées, ce n'est qu'à la fin des années 1980, lorsqu'on s'est automatisé, que les effectifs ont chuté, détaille Luc Ventre. En 2003, certains étaient chez nous depuis la fin des années 1960, notre culture d'entreprise repose sur l'expérience, nos produits requièrent un grand savoir-faire. » A tel point que le recours à l'intérim n'est pas autorisé pour la majorité des postes de production. Filiale de Total depuis 1990, le groupe Spontex et Mapa réalise 380 millions d'euros de chiffre d'affaires (en 2001). Spontex est le leader sur le marché de l'éponge : sa part de marché s'élève à 57,6 % sur le segment des éponges multisurfaces.

Schéma d'organisation optimale

Avant la nouvelle mesure, la GPEC ne faisait pas partie des priorités en matière de ressources humaines chez Spontex. « Pour la gestion des emplois, les chefs de service raisonnaient en termes de personnes, détaille Luc Ventre. Fin 2000, on avait connu un plan de restructuration, et le départ de personnel était devenu tabou. A l'occasion, de l'accord de 2003, on est sortis de l'obsession du «comment faire pour ne pas licencier» et on s'est concentré sur le «comment faire tourner l'usine». »

Une fois l'estimation des vacances d'emplois établie - 60 rien que pour 2004 et 2005 -, la GPEC a été lancée. En janvier 2004, une analyse de l'organisation de l'entreprise par postes a pu alors commencer. « Tous les responsables de service ont calculé leur schéma d'organisation optimale par rapport au volume de production qu'on avait fixé, dit Luc Ventre. Ainsi, on a pu décider du maintien ou de l'abandon pour chaque poste concerné par un départ en retraite. » Dans le cas d'un remplacement indispensable, l'entreprise s'est donné le choix : remplacement en interne ou en externe.

Sur les 60 départs, 20 personnes ont été remplacées, dont la moitié en interne. « A partir des résultats de notre analyse, il nous est apparu indispensable de renforcer la polyvalence de nos équipes. Depuis lors, on a gagné en souplesse », constate Luc Ventre. Un plan de formation a été impulsé, et la VAE a été utilisée. Le rapport de force avec les partenaires sociaux est traditionnellement important chez Spontex. « On joue notre rôle économique et social, pleinement, déclare José Bailadeira, délégué CGT, tout est négocié en amont, alors, ça se passe bien. »

Une carrière grâce aux mutations

Pour ses recrutements extérieurs, Spontex a fait appel à des jeunes en contrat de qualification ; 10 ont été titularisés sur les 24 jeunes de la région, qui ont été formés à des postes d'agent, technicien, ouvrier spécialisé. « Grâce à notre GPEC, espère Luc Ventre, certains de ces jeunes pourront mener une carrière chez nous par le jeu des mutations. » La gestion prévisionnelle a permis de faire évoluer Spontex. « Avant, on était réactifs, conclut Luc Ventre, aujourd'hui, nous sommes pro-actifs, on devance l'avenir à cinq ans. »

LA RETRAITE ANTICIPEE POUR LES CARRIERES LONGUES

- Dans le cadre de la réforme des retraites, menée en 2003 par François Fillon, ministre des Affaires sociales, qui a eu pour conséquence d'allonger la durée de cotisation pour tous, les syndicats, CFDT en tête, ont décroché une avancée. Ils ont obtenu pour celles et ceux ayant commencé à travailler jeunes, à 14, 15 ou 16 ans, le droit de cesser leur activité de manière anticipée.

- Cette revendication était ancienne et partait du constat que plus l'on a commencé à travailler jeune, plus on exerce un métier pénible physiquement, plus la durée de vie diminue.

- Pour bénéficier de la mesure de retraite anticipée avant 60 ans, il faut avoir travaillé au minimum 42 ans. Dès lors celui qui a commencé à travailler dès 14 ans peut partir à 56 ans.

- La Caisse d'assurance vieillesse table sur un total de 460 000 assurés bénéficiaires d'ici 2008.

Auteur

  • Patricia Sudolski