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Management de proximité pour l'ancienne division PC d'IBM

Enquête | publié le : 16.05.2006 | C. F.

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Management de proximité pour l'ancienne division PC d'IBM

Crédit photo C. F.

Les salariés français d'IBM craignaient de subir le totalitarisme de l'Etat chinois suite à leur transfert chez Lenovo. Pour le moment, l'enjeu est plutôt de s'habituer à travailler dans une «PME».

« Les salariés ont été transférés d'un symbole de l'entreprise américaine à un symbole de l'étatisme chinois. » Pour Frank Setruk, président de la fédération CFE-CGC métallurgie de Provence, les anciens salariés d'IBM avaient peu de chances de gagner au change. En mai 2005, le géant américain a vendu sa division PC au chinois Lenovo. En France, 130 personnes sont ainsi passées dans le giron de la société asiatique. Le changement s'est effectué sans l'accord des salariés, dans le cadre de l'article L122-12, qui organise le transfert automatique des contrats de travail entre employeurs successifs.

Clause de conscience

La pilule était alors mal passée, et la CFE-CGC avait demandé l'instauration d'une clause de conscience. L'objectif : permettre aux salariés de refuser le transfert lorsqu'il est organisé vers une entreprise qui pose des problèmes éthiques. En l'occurrence, l'actionnaire majoritaire de Lenovo est l'Etat chinois, peu respectueux des droits de l'homme et des droits sociaux. La revendication n'a pas eu de suite, mais l'organisation syndicale compte bien la brandir de nouveau si elle en sent la nécessité.

Appartenance

La peur des nouveaux collaborateurs de Lenovo concernait aussi leurs conditions de travail. IBM est bien connu pour sa forte culture d'entreprise qui génère l'attachement des salariés à la société. Amaury de Chomereau, délégué syndical CFE-CGC chez Lenovo, confirme : « Il existe chez IBM un sentiment d'appartenance entretenu par une communication permanente de la direction à tous les niveaux et dans tous les domaines : produits, marketing, ressources humaines, etc. »

Peu de différences

Le changement risquait donc d'être brutal. Contre toute attente, il s'est en fait bien déroulé. Du moins, jusqu'à présent. « Un an après la reprise, la différence n'est pas flagrante, estime le délégué syndical. Les anciens ont encore tendance à dire «IBM» plutôt que Lenovo quand ils parlent de l'entreprise. »

Car la séparation, si elle est effective sur le papier et au niveau directorial, ne l'est pas vraiment dans la pratique : Lenovo est restée pendant un an dans les locaux d'IBM à La Défense (92), et le déménagement ne devrait avoir lieu qu'à la fin du mois, dans une autre tour de ce quartier d'affaires.

Les deux entreprises entretiennent des contacts quotidiens, d'autant plus indispensables qu'elles utilisent toujours les mêmes bases de données. La direction n'a pas changé non plus, puisque le Pdg de Lenovo France, Jean-Michel Donner, était auparavant le directeur de la division PC d'IBM. Conséquence évidente : il utilise les formes de communication acquises dans son ancienne société.

Culture internationale

Soucieux de rassurer ses troupes autant que le marché, Jean-Michel Donner insiste sur la culture internationale de Lenovo plutôt que sur sa nationalité : « Nous sommes une entreprise multiculturelle. Nous sommes présents dans plus de 160 pays et notre management se décline au niveau local : mon équipe est 100 % française ! », rappelle-t-il. Selon lui, le seul élément de gestion qui pourrait être chinois, c'est justement cette capacité d'adaptation au terrain.

Les changements existent pourtant. Si Lenovo compte 19 000 personnes dans le monde, elle n'est, en France, qu'une PME de 130 personnes. « Il règne ici un esprit entrepreneurial, souligne Jean-Michel Donner, car le travail de chacun se traduit immédiatement dans les résultats. »

Comme une PME

Pour Amaury de Chomereau, le dialogue social lui-même a évolué : « Chez IBM, chaque réunion de comité d'entreprise était entourée d'un certain décorum : l'institution des représentants du personnel faisait face à l'institution directoriale, souligne l'élu. Chez Lenovo, un homme seul, Jean-Michel Donner, prend les décisions. Comme dans une PME. Nous devons apprendre les nouvelles règles. » Règles qui n'ont pas évolué sur un point : la course à la rentabilité. Si IBM s'est débarrassé de sa division PC car elle était déficitaire, Lenovo veut en tirer des profits.

Exemplarité

Pour atteindre son but, la direction chinoise a annoncé, en mars dernier, la suppression de 1 000 emplois dans le monde, touchant une dizaine de personnes en France. Entre les démissions volontaires et les départs en préretraite, moins de cinq personnes devraient finalement être licenciées. « Les conditions de départ seront à peu près identiques à celles du plan social qui a eu lieu chez IBM l'année dernière, analyse Amaury de Chomereau. La direction sait qu'elle doit être exemplaire dans ce domaine si elle veut créer les conditions de la réussite. »

Lenovo

> Activités : informatique d'entreprise et grand public. Téléphonie portable.

> Effectifs : 19 000 salariés dans le monde, 130 salariés en France.

> Chiffre d'affaires : 2,284 milliards d'euros (2004-2005).

Auteur

  • C. F.