Devant l'effondrement des valeurs du marxisme, la tentation a été forte de rapatrier dans la sphère économique la responsabilité du social. Autrefois responsable de tous les maux sociaux, l'entreprise tendait ainsi à devenir la solution à tous les maux, comme s'il fallait toujours porter une théorie ou une institution au pinacle. La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est-elle la nouvelle tarte à la crème de la pensée vertueuse ?

Au-delà d'un consensus de bienséance dans l'opinion publique, les avis des acteurs divergent cependant beaucoup. Les partisans du libéralisme cachent de moins en moins leur mauvaise humeur devant une responsabilité trop lourde qui risque de détourner l'entreprise de sa seule fin légitime : le profit. Les partisans de la régulation, au contraire, s'insurgent du tort que la mode du développement durable risque de causer à une politique de réglementation économique et sociale digne de ce nom.

La responsabilité sociale des entreprises ne peut certes pas être réduite à une démarche strictement optionnelle. Cependant, il ne faut pas oublier qu'au-delà de la réglementation, l'opinion publique est un levier puissant qui peut infléchir l'action des entreprises dans le sens de la responsabilité puisque leur prospérité est largement tributaire de leur image. Entre les extrêmes, il en va donc peut-être de l'intérêt même des entreprises de s'engager dans l'éthique...

Cécile Jolly est chef de projet au Commissariat général du Plan, chargée de la responsabilité des entreprises et du développement durable.