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Le bouskashi des khalifes

Demain | Chronique | publié le : 11.04.2006 | De P.-L. Chantereau

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Le bouskashi des khalifes

Crédit photo De P.-L. Chantereau

Situation de recrutement dans le monde trouble de l'armement.

Ce grand groupe de réputation mondiale cherche, pour la France, un technico-commercial de grande envergure pour prendre en charge des comptes stratégiques.

Attention, pas un simple ingénieur, ni un vendeur habitué aux problématiques techniques. Non, ce serait trop simple.

Il faut un héros du commerce, pas moins. Compétent à tous points de vue, capable de négocier l'inégociable, et en anglais, crédible à la fois en face des ingénieurs et des services achats, politique habile, dur à la tâche, entreprenant, sérieux mais créatif, souple mais intransigeant, autonome mais pouvant travailler en équipe, etc.

Un Arturo Brachetti de la négociation de projets complexes, un virtuose doublé d'un Stakhanov du chiffre d'affaires.

Finalement, tout ça reste assez banal. En tout cas jusqu'ici...

Le cabinet de recrutement a bien fait son travail et a réussi à identifier les quelques grandes pointures de ce métier très technique, qui suppose, en effet, la maîtrise de nombreuses disciplines et un solide gabarit pour affronter les chausse-trapes, mâchicoulis et autres pièges à loup de systèmes de décision très complexes et chaque fois différents.

Les clients potentiels, peu nombreux, sont, en effet, de très grands comptes, eux-mêmes souvent liés à des groupes multinationaux, où les décisions sont prises (quand elles sont prises...) dans des endroits aussi identifiables qu'un ectoplasme en plein brouillard et aussi saisissables qu'une savonnette humide.

Mais bon, le candidat est trouvé. Mieux, il est très intéressé. Bravo. Plus fort encore, il intéresse tout le monde.

Alors, l'affaire est emballée ? Pas du tout. Elle commence.

Quand l'homme est de qualité, toute la question n'est plus qu'il intègre l'entreprise, mais plutôt de savoir chez qui.

Et commencent alors des manoeuvres apparentes ou souterraines (les secondes plus efficaces que les premières, dirait-on) pour attirer dans son camp le futur héros.

On se croirait dans le sport national afghan, quand deux équipes à cheval, jouant l'une contre l'autre dans un désordre violent et une pagaille indescriptible, tentent d'attirer dans leur camp une peau de chèvre. Tous les coups sont permis, c'est ça qui fait le sel de ce jeu.

Là, c'est pareil : surenchères, rumeurs, promesses d'avenir radieux, danse des sept voiles. Chaque patron d'équipe fait tout pour démontrer que ledit candidat serait bien mieux chez lui qu'ailleurs dans l'entreprise.

Pendant ces palabres, le temps passe et le chiffre d'affaires trépasse. Comment s'en sortir ? Demander l'avis du candidat ?

Vous rêvez ou quoi ? Est-ce qu'on demande à la peau de chèvre si le bouskashi l'amuse ?

Pierre-Loïc Chantereau <www.equation-management.com>

Auteur

  • De P.-L. Chantereau