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Les Pratiques

La pénalité a eu peu d'impact sur l'emploi des seniors

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 14.03.2006 | A. b.

Pour ou contre la contribution Delalande ? Cette mesure, qui sanctionne les licenciements des plus de 50 ans, pourrait être supprimée dans un délai de trois à cinq ans. En attendant, l'emploi des seniors est au point mort.

La contribution Delalande vit-elle ses dernières semaines ? Présenté le 6 février dernier, le plan pour l'emploi des seniors, concocté par Dominique de Villepin, prévoit, notamment, la suppression de cette contribution versée par les employeurs licenciant des salariés de plus de 50 ans. D'après le projet, le gouvernement souhaite y parvenir progressivement, d'abord avec les salariés nouvellement embauchés à compter de la mise en oeuvre du plan, puis totalement, au terme du plan, en 2010.

Modifications

Créée en 1987, par un député RPR du Val-d'Oise, au moment où l'autorisation administrative de licenciement était supprimée, cette contribution visait à limiter le licenciement économique de personnes âgées de plus de 55 ans. Elle prenait, à l'origine, la forme d'une pénalité de trois mois de salaire brut. Puis, en 1992, face à la nouvelle montée des licenciements de quinquas, Martine Aubry, alors ministre du Travail, décidait d'étendre cette pénalité aux plus de 50 ans et de taxer plus lourdement les entreprises. Le montant de la contribution variait alors d'un mois de salaire (pour les salariés âgés de 50 ans) à six mois (à partir de 56 ans).

La réglementation a subi de nombreuses modifications au fil des années, sous forme de nouveaux cas d'exonération ou d'extension (lire encadré). En 1999, licencier un quinqua coûtait deux fois plus cher qu'en 1992. Les entreprises sont alors tenues de verser à l'Unedic entre deux mois de salaire (pour les salariés âgés de 50 ans) à douze mois (pour ceux âgés de 56 à 57 ans). En 2003, nouvelle réforme : François Fillon, alors ministre du Travail, assouplit le dispositif. La pénalité n'est pas due quand le salarié licencié a été embauché par l'entreprise alors qu'il avait 45 ans. En pratique, un employeur embauchant une personne de 46 ans n'aurait plus à craindre d'être taxé s'il s'en sépare quand celle-ci a 50 ans et plus.

Effets indésirables

Mais ces modifications n'ont pas réussi à faire taire les critiques : dispositif peu efficace, détourné de son objectif initial, porteur d'effets pervers... Les griefs sont nombreux. Pour ses détracteurs, la contribution dissuade surtout d'embaucher des seniors quand ils approchent de la cinquantaine. En clair, ils estiment que les effets pervers sont supérieurs à ses avantages, les entreprises craignant de se retrouver piéger par le dispositif.

La CCIP ne dit pas autre chose. Dans son rapport, rendu public en 2001, elle pointe « la mise à l'écart de cette population » : craignant une forte pénalisation, les entreprises se sont abstenues en majorité de recruter des chômeurs, notamment ceux âgés de 45 à 50 ans. L'Insee est tout aussi critique : la mise en place de cette contribution a eu des effets indésirables, comme la précipitation des licenciements avant le seuil de 50 ans. Sophie de Menthon, présidente d'Ethic, un think tank patronal, n'hésite pas à parler de « discrimination positive », tandis que Daniel Croquette, délégué général de l'ANDCP, estime que cette mesure n'est plus adaptée à l'époque, même s'il reconnaît une certaine efficacité du dispositif à sa création.

Les syndicats, en revanche, plébiscitent son maintien. L'intérêt est, d'abord, financier. Cette contribution rapporte, chaque année, près de 482 millions d'euros à l'Unedic. Le régime d'assurance chômage reversant, ensuite, la moitié à l'Etat pour le financement des FNE. Si on la supprime, qui financera les préretraites ? Ils soutiennent, ensuite, un rapport réalisé par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et par l'Inspection générale des finances (IGF), paru en novembre dernier. Celles-ci démentent la thèse patronale en affirmant que la contribution a eu peu « d'impact sur l'emploi des seniors », en raison, notamment, des nombreuses exonérations instaurées en 2003. Ainsi, note le rapport, « depuis 2003, l'embauche des 45-50 ans n'est plus pénalisée, ces derniers étant exclus du périmètre de la contribution ».

Modérer le prélèvement

Entre suppression et maintien, le débat est ouvert. Que faire ? Parmi ses propositions, l'Igas préconise de supprimer cette surcotisation et de la remplacer par un prélèvement plus modéré mais imposé à toutes les entreprises qui licencient. Le rapport propose, par exemple, que cette surtaxe soit fixée à 1 % du salaire et appliquée également aux fins de CDD et de mission d'intérim. Une piste qui a le mérite de séduire les syndicats, engagés dans la lutte contre la précarité. Mais qui plaît peu, en revanche, aux milieux patronaux. En attendant, le taux d'emploi des 55-64 ans est au plus bas : 33,8 % en 2005.

Repères

En 1989, la contribution doit être versée pour tout licenciement de salarié de plus de 55 ans, quel que soit le motif de licenciement.

En 1992, la contribution est étendue aux salariés de plus de 50 ans. Une exonération est prévue en cas de rupture du contrat de travail d'un salarié qui était, lors de son embauche, âgé de plus de 50 ans et inscrit depuis plus de trois mois comme demandeur d'emploi.

En 1998, le montant de la contribution est augmenté.

En 1999, les conventions de conversion sont assujetties à la contribution.

En 2003, la loi avance à 45 ans le critère de l'âge d'embauche du salarié qui ouvre droit à l'exonération instituée en 1992. Elle supprime aussi la référence au critère de demandeur d'emploi.

Auteur

  • A. b.