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Comilog a évité la casse sociale

Les Pratiques | Point fort | publié le : 14.03.2006 | Anne Bariet

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Comilog a évité la casse sociale

Crédit photo Anne Bariet

Les salariés de Comilog ne resteront pas sur le carreau. Deux ans et demi après l'annonce de la fermeture de l'usine, 98 % des licenciés sont «reclassés», selon Homme & Redéploiement, le cabinet chargé du reclassement.

ABoulogne-sur-Mer, les 351 salariés de Comilog, filiale d'Eramet, ne vivront pas le cauchemar qu'ils redoutaient : à 40 ou 50 ans, rechercher un travail dans un bassin d'emploi dévasté par de nombreuses restructurations, en particulier celle de Metaleurop. La fermeture de l'usine de ferromanganèse, annoncée en septembre 2003, est justifiée, selon la direction, par des pertes d'exploitation importantes, 25 millions d'euros par an depuis trois ans.

Deux ans et demi après, la plupart des salariés ont tourné la page. Ils sont devenus soudeurs, caristes, chauffeurs poids lourd, ou encore, pour les femmes, auxiliaires de vie. La plupart travaillent dans le même bassin d'emploi - un souhait important - et ont décroché un CDI.

Une « réussite exemplaire »

Homme & Redéploiement (ex-IDRH), le cabinet chargé du reclassement, annonce, aujourd'hui, un taux de reclassement de 98 %. Une « réussite exemplaire », à leurs yeux. « D'ordinaire, la moyenne nationale se situe autour de 70 % », pointe Anick Sers, manager du cabinet. Plusieurs écueils existaient, cependant. L'âge élevé du personnel, le manque de formation et la forte ancienneté ne portaient pas à l'optimisme. Qui plus est, le bassin d'emploi affichait un taux de chômage de 13 %, en 2003. Comment est-on parvenu à de tels résultats ?

22 millions d'euros pour le plan de sauvegarde

Comilog n'a pas lésiné sur les moyens pour atténuer le choc des suppressions de poste. Outre de substantielles indemnités de départ (environ 18 800 euros, indemnités légales de départ et primes additionnelles comprises, majorées de 120 euros par année d'ancienneté), le plan prévoyait des départs en préretraite, des reclassements internes et des aides à la création d'entreprise. La durée du congé de reclassement est portée de six à neuf mois pour les salariés âgés de plus de 50 ans. Au total, le coût du plan de sauvegarde pour l'emploi s'élève à 22 millions d'euros, soit 63 000 euros par salarié concerné. Rien à voir avec les méthodes de son voisin Metaleurop.

Des offres valables de reclassement

Le cahier des charges fourni au cabinet de reclassement est précis et prévoit des garde-fous. Toute personne est considérée comme reclassée après la validation de la période d'essai et, surtout, chaque salarié doit disposer de deux OVR (offres valables de reclassement), c'est-à-dire de deux propositions écrites d'emploi. « Dans la plupart des plans sociaux, on parle d'OVE (offre valable d'emploi). Mais l'OVE n'est qu'une proposition de poste, assure Guillaume Verschaeve, directeur de Comilog. L'OVR apporte plus de garanties puisqu'il s'agit d'une proposition écrite. En clair, le parcours entre la proposition d'emploi et la probable signature du contrat est réduit au maximum. » La cellule emploi est restée ouverte deux ans. Les salariés avaient dix-huit mois pour se repositionner, de décembre 2003 à juillet 2005. Le dispositif a été prolongé, ensuite, de six mois (de juillet à décembre 2005) pour 55 personnes.

Le cabinet de reclassement est directement intéressé au résultat : il perçoit un bonus de 5 % du montant global des honoraires si le taux de reclassement atteint 70 % au bout de la période de reclassement fixée, soit dix-huit mois. En revanche, il est redevable d'un malus du même montant si les objectifs ne sont pas atteints.

Commissions de suivi

« Nombreuses sont les entreprises qui ont eu un réflexe citoyen et ont embauché des «Comilog» », poursuit Anick Sers. Les aides varient alors de 1 000 euros (pour les entreprises de plus de 50 salariés) à 6 000 euros (pour les entreprises de moins de 50 salariés embauchant des ex-Comilog de plus de 50 ans). Des commissions de suivi, qui réunissent préfets, DDTE, Afpa, inspection du travail, partenaires sociaux et l'entreprise, sont organisées tous les mois.

Financement d'un centre d'appels

Tenu de reclasser ses salariés, Comilog est également obligé de favoriser la création d'autant d'emplois locaux qu'elle en supprime. L'usine métallurgique a donc déboursé 500 000 euros pour financer l'installation du centre d'appels Armatis, qui a créé 250 emplois à Boulogne. Cet engagement ne créait, cependant, aucune obligation pour la nouvelle entreprise installée. Les recrutements n'ont concerné aucun ancien salarié de Comilog.

La filiale d'Eramet a également chargé la Sodie de trouver le complément d'embauches en développant des projets locaux créateurs d'emploi. A cet effet, Comilog a versé une dotation de 100 000 euros à Oséo-BDPME, la banque d'investissement des PME, qui propose des prêts bonifiés. Un coût important mais qui évite « la casse sociale » et fait oublier les heures sombres de Boulogne-sur-Mer en 2003 : opération ville morte, séquestration de l'équipe de direction et déversement de ferromanganèse dans le port de la ville...

Le reclassement en chiffres

Selon Homme & Redéploiement, 275 personnes (sur 351) ont été suivies par la cellule de reclassement. Dix personnes ont été missionnées pour cette opération. Le cabinet disposait d'un call center, chargé de prospecter les entreprises du bassin d'emploi ; 6 167 sociétés ont été contactées.

Résultat ? 98 % des salariés ont été reclassés. 271 ex-Comilog sont considérés comme reclassés. Parmi eux, 262 ont des solutions abouties et 9 ont des solutions en cours de finalisation.

Solutions abouties : 182 ont un contrat de travail (CDI ou CDD d'au moins six mois) ; 34 ont opté pour un projet personnel ; 16 ont créé leur entreprise ; 21 reçoivent une formation qualifiante, cofinancée par le conseil régional du Nord-Pas-de-Calais (BTP, nettoyage industriel, gardiennage) ; 9 sont en longue maladie.

Solutions en cours : 7 ont un contrat de travail potentiel ; 2 ont des projets de création d'entreprise.

Trois ex-salariés sont en attente de solution.

Une personne a suspendu sa recherche d'emploi.

Selon Guillaume Verschaeve, directeur de Comilog, le coût de la cellule de reclassement s'est élevé « à environ 4 000 euros par personne accompagnée ».

L'essentiel

1 Après l'annonce de la fermeture de l'usine de Comilog, à Boulogne-sur-Mer, en 2003, la direction s'engage à trouver une solution de reclassement interne ou externe pour ses 351 salariés.

2 L'entreprise s'engage également à participer aux efforts de réindustrialisation du bassin d'emploi et aussi à assumer sa responsabilité en matière d'environnement.

3 Au total, le coût du PSE s'élève à 22 millions d'euros, soit un ratio de 63 000 euros par salarié concerné.

Auteur

  • Anne Bariet