L'entreprise apprenante repose sur des personnes qui apprennent sans cesse. En disant cela, on pense particulièrement au développement des compétences. Mais apprendre n'est pas seulement étoffer son savoir. C'est aussi tirer les leçons de l'expérience. Or, si beaucoup en parlent, peu savent vraiment le faire.
D'abord, il y a ceux qui n'envisagent même pas qu'il y ait des enseignements à tirer de la vie. Ils sont dans leur monde, traversent satisfactions ou frustrations au gré des événements sans se questionner. Si vous leur demandez « qu'as-tu appris de cette expérience ? », ils vous regardent l'air étonné et vous répondent « rien ».
Viennent, ensuite, ceux qui se doutent que les situations qu'ils rencontrent justifieraient qu'ils s'interrogent, mais ils ne veulent pas le faire. Ils sont trop attachés à leurs croyances, à leurs certitudes ou à l'image qu'ils veulent donner d'eux-mêmes. Prendre du recul et regarder les effets de leurs actes les obligerait sans doute à se remettre en cause, à admettre leurs imperfections, à comprendre qu'il faut changer. Or, ils n'en ont ni l'envie ni l'énergie. Ils préfèrent se persuader que si les choses ne se déroulent pas comme prévu, c'est que les événements ou les personnes leur sont contraires.
Cette politique de l'autruche, souvent adoptée pour préserver son confort personnel, mène parfois à des réveils brutaux. Chocs, coups durs ou grosses déceptions peuvent remettre au goût du jour la vraie question : « Qu'ai-je à tirer de cette expérience ? » et, surtout, « Comment ne pas reproduire une situation pareille ? » Souvent, l'épreuve difficile a été précédée de signaux annonciateurs, mais on les a négligés. Ou bien des circonstances similaires se sont déjà produites, mais la leçon n'est pas intégrée. Combien de fois nous faut-il répéter les mêmes erreurs avant d'ouvrir les yeux ?
Enfin, il y a ceux qui apprennent en permanence. Une frustration, un échec ou un succès sont autant d'occasions de travailler sur eux-mêmes et d'améliorer leur caractère, leur façon d'agir ou leur vision de la vie. Ils utilisent les difficultés et les résistances comme tremplin pour grandir. Avec l'expérience, ils savent de mieux en mieux ce qui leur convient et les situations qu'ils doivent éviter. Ils comprennent ce qu'ils cherchent dans la vie et mettent leur énergie à l'accomplir. Sont-ils des champions de l'introspection ? Non. Ils sont souvent attentifs au feed-back d'autrui sur leur comportement. Ils savent que la lucidité sur soi-même n'est pas le fruit d'un travail solitaire puisque l'on possède tous un «angle mort». Ils écoutent les remarques et les conseils de leurs collaborateurs et de leurs proches ; ils observent l'effet de leurs actes sur les individus ; ils analysent les situations en se mettant à la place des autres afin de mieux comprendre les reproches qui leur sont adressés. Ils ont le summum de l'honnêteté et du courage intérieur : accueillir le point de vue d'autrui comme une partie intégrante de la vérité et s'en servir pour se construire.
Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. <
