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ces entreprises ou la reforme est une realite

Enquête | publié le : 28.02.2006 | Laurent Gérard

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ces entreprises ou la reforme est une realite

Crédit photo Laurent Gérard

Des entreprises ont déjà réussi à digérer la réforme de la formation professionnelle. Pourquoi ? Comment ? Réponses. Certains experts pensent, en revanche, qu'il est déjà trop tard pour les PME, pour lesquelles la réforme n'est pas adaptée.

Et si la réforme de la formation professionnelle était déjà jouée ? Et si elle était déjà dépassée ? Et si elle était déjà un non-événement pour certaines entreprises et un embrouillamini sans solution à venir pour d'autres ? Expliquons-nous : à bientôt deux ans d'application de la loi du 4 mai 2004, le paysage des réactions des entreprises face à la réforme se clarifie.

Indéniablement, celles qui étaient actives avant la réforme ne sont pas restées longtemps les bras ballants. Campagne d'information des salariés les motivant à consommer leur DIF, audit et stratégie financière visant à récupérer au plus vite des financements mutualisés sur le 0,5 % professionnalisation, catégorisation du plan sans douleur recourant peu à la formation en dehors du temps de travail... Voilà certains des points communs à toutes les entreprises en pointe sur le sujet. Pour elles, la réforme est déjà digérée, même si une incertitude demeure sur le DIF dans trois ou quatre ans. Tenter de les comptabiliser serait ridicule, mais plusieurs études (Agefos-PME, Cegos, Caraxo, Afdec...) font remonter l'idée que, grosso modo, « un quart-un tiers » des entreprises seraient dans cette situation.

Une réforme déjà jouée

Et pour les autres ? L'attentisme, parfois même encore, l'ignorance. C'est ce constat qui fait dire à certains que la réforme est déjà jouée et dépassée. Jouée dans les entreprises réactives. Et dépassée dans les autres, les petites et les très petites, qui n'ont pas pris le train en marche. Pour elles, il faudrait déjà «autre chose». Mais quoi ? Trois pistes sont parfois avancées.

Premièrement, une mobilisation nationale pour les PME-TPE. Le coût de déplacement d'un conseiller formation d'un Opca dans une PME durant une journée est souvent plus élevé que le montant de l'obligation légale que verse cette même PME au collecteur ! Le coût d'attraction d'une petite entreprise vers la formation est donc très élevé. Un débat sur la gestion et la mutualisation de ce coût serait intéressant.

Défiscalisation et droit universel

Deuxièmement, une défiscalisation pour acte de formation. Les prestataires de soutien scolaire aux enfants se frottent les mains de la déduction fiscale accordée aux parents qui utilisent leurs services. Une telle aubaine financière pourrait-elle être reproduite pour les adultes se formant ?

Troisièmement, un droit universel à la formation. Le président de la République et le Premier ministre ont récemment proposé qu'« un droit universel à la formation soit ouvert pour tous les actifs et tout au long de la vie ». Un droit qui appartiendrait à la personne quelle que soit sa situation. Trois idées utopiques ? Peut-être. Les questions financières qu'elles soulèvent sont, en effet, assez vertigineuses.

Concrétisation

La piste du droit universel appelle forcément une mobilisation financière de la nation. « Souvent proclamé, jamais concrétisé, le droit à la qualification différée doit trouver des concrétisations opérationnelles et budgétaires, prévient Jean-Marie Luttringer, de Circé Consultants. L'Etat en sera d'autant plus fondé à demander aux partenaires sociaux de négocier un système de compte épargne formation pour les salariés. »

En attendant cette mobilisation, sont à suivre avec attention les travaux des deux réseaux interprofessionnels de collecte des fonds de la formation, Agefos-PME/CGPME et Opcareg/Medef, sur la mise en place d'une «garantie DIF», à la fois ressource supplémentaire au titre du DIF et gestion externalisée et individualisée de cette mesure. Des initiatives qui pourraient dessiner la voie d'un système de prévoyance conventionnelle.

Attente prioritaire des salariés

Mais, tout cela ne sera pas suffisant si, en face, l'appétit des salariés ne se développe pas en conséquence. Or, de ce point de vue, les résultats du baromètre Accor Services, publié voilà deux semaines, sont finalement assez encourageants : l'aide à la formation est l'attente prioritaire de 46 % des salariés vis-à-vis de l'entreprise ! Devant l'accès aux soins de santé (41 %). Les Français ne se désintéressent donc pas forcément de la formation. Ajoutons à cela que l'effet DIF, dans trois ou quatre ans, quand les salariés bénéficieront d'un potentiel de 80 à 100 heures de formation, est encore à venir...

Peut-être nous serons-nous inquiétés pour rien.

L'essentiel

1 Une forte dichotomie se dessine entre les entreprises qui se sont saisies de la réforme et qui commencent à la digérer, parfois avec de grands bénéfices ; et celles qui ne sont pas en mesure de se l'approprier.

2 Les PME et leurs salariés méritent une attention et un système spécifiques, estiment certains.

3 D'autres, moins pessimistes, pensent qu'il faudra compter avec l'effet DIF dans quatre ou cinq ans. Il pourrait accroître l'appétit formation des salariés d'une manière qu'on ne soupçonne pas aujourd'hui.

Auteur

  • Laurent Gérard