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Goutte d'eau et feu aux poudres

Demain | Chronique | publié le : 28.02.2006 | de P.-L. chantereau

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Goutte d'eau et feu aux poudres

Crédit photo de P.-L. chantereau

Grosse colère du monsieur.

D'après ce que je comprends, j'arrive dans son bureau juste au moment où on lui annonce que la direction de la division lui enlève deux de ses meilleurs vendeurs pour les envoyer compléter des équipes je ne sais où, mais, en tout cas, pas dans le périmètre de ses responsabilités. Par signes, j'essaie comme je peux de lui faire comprendre qu'il peut finir sa conversation sans se soucier de moi, et même que je sors à la seconde s'il se sent gêné : le conflit de famille, ce n'est pas ma tasse de thé.

On a tous été dans cette position ridicule où l'on se retrouve obligé d'assister en direct à un pugilat alors qu'on est venu expliquer posément un dossier à quelqu'un réputé vous écouter attentivement.

Cette fois, c'est raté. Mais c'est comme ça. Le ton monte. On n'est bientôt plus dans les protestations, mais déjà dans les jurons et à deux doigts des insultes.

Je propose à nouveau de sortir. La main sur le micro, mon interlocuteur « préfère que j'entende ça. Au moins je serai au courant ». Ah bon. Alors je reste, puisque c'est bon pour mon éducation personnelle...

Il raccroche. Encore rouge de colère, il m'explique : « Que les gens que je forme ne soient pas simplement destinés à me permettre d'attraper les objectifs toujours plus déments qu'on me colle, je peux l'admettre. Encore que. C'est ma fonction. Former des équipes pour gagner des trophées, c'est ce que je fais le mieux. Finir par les perdre toujours, c'est lassant, mais c'est la loi du sport. Mais qu'on me les pique sans préavis tout en soutenant que je devrai faire les mêmes objectifs, ça, c'est la goutte d'eau qui met le feu aux poudres ! Hold-up avec préméditation, association de malfaiteurs, vol en réunion, appelez ça comme vous voulez. Mais moi, je dis que déshabiller Paul pour habiller Jacques, c'est tout sauf de la bonne gestion d'équipe. Voilà ce que je dis. »

Un signe du menton signifie que je suis prié de donner mon avis. Et ça tombe bien, pour une fois, je crois que j'en ai un.

« Vous pouvez pleurer sur vos équipes qui partent trop tôt pour vous, OK. Vous pouvez râler sur la manière peu élégante de s'y prendre, encore OK. Mais la seule question qui devrait vous intéresser, c'est : est-ce que c'est un bon coup pour eux, pour vos vendeurs ? Est-ce que c'est un booster pour leur carrière, ou un infâme traquenard ? Si c'est un vrai bon plan, alors réjouissez-vous de leur départ. Après tout, être repéré comme un gisement de bons professionnels, c'est une bonne maladie, non ?

Moue dubitative de Monsieur le directeur. Grimace. J'y lis quand même comme une vague approbation...

Pierre-Loïc Chantereau <www.equation-management.com>

Auteur

  • de P.-L. chantereau