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Enquête

Les «parasubordinati», des salariés au rabais

Enquête | publié le : 21.02.2006 | Marie-Noëlle Terrisse

Malgré un toilettage législatif en 2003, le statut des «parasubordinati» - entre le salariat et l'indépendance - reste à l'origine de nombreux abus.

Les «parasubordinati», ces travailleurs au statut hybride entre salariés et indépendants, existent depuis longtemps dans les entreprises italiennes. La loi Biagi de réforme du marché du travail (septembre 2003) a modifié le statut de ceux qu'on appelait les CoCoCo (pour Collaboratori continuativi e coordinati). Un toilettage nécessaire en raison des abus : les CoCoCo, qui représentaient un gros contingent des employés du tertiaire et de la fonction publique, effectuaient les mêmes horaires que leurs «collègues», sous l'autorité de l'encadrement, mais avec des cotisations retraite réduites, pas de congés payés, pratiquement pas d'indemnités maladie ou maternité et rien en cas de licenciement et de chômage.

Faux salariat

Fin 2003, 2,6 millions de personnes étaient inscrites au régime Collaborateurs de l'INPS (l'institut qui gère les retraites), et on estimait à environ 800 000 ceux qui n'avaient aucun emploi ou retraite en parallèle. En raison des rigidités du marché du travail, les CoCoCo s'étaient transformés en une véritable armée de salariés au rabais ! Pour tenter d'éviter les situations de «faux salariat», la loi Biagi, en octobre 2004, a mis au point un nouveau statut, baptisé CoPro (les collaborations sur projet). La collaboration doit désormais être liée à la réalisation d'un projet ou d'un programme (ou d'une partie de celui-ci). La prestation est orientée au résultat, sans contraintes horaires, tout comme la rémunération, qui doit prendre en compte aussi bien la quantité que la qualité du travail. Le contrat doit prévoir une date finale, qu'elle soit définie par avance ou déterminée par la conclusion effective du projet. La cotisation de retraite s'élève à 17,8 % du revenu (18,8 % pour les revenus les plus élevés) et une prorogation du contrat peut advenir en cas de congé maternité. Fini, donc, les vendeurs ou secrétaires «collaborateurs», au point que toute collaboration non liée à un projet peut être portée devant les tribunaux pour une régularisation en CDI.

Régularisation

Les entreprises ont dû s'adapter : Telecom Italia a régularisé en 2004 le statut des 4 350 CoCoCo employés par sa filiale de centres d'appels, qui ne fonctionnait jusqu'alors qu'avec ces «faux indépendants» ! Cette innovation a été saluée par les syndicats les plus modérés : « La loi Biagi a clarifié la nature autonome du contrat sur projet et a fait émerger des dizaines de milliers de rapports salariés masqués », a ainsi déclaré, en octobre dernier, Raffaelle Bonanni, secrétaire confédérale de la CISL.

Reste que le contrat sur projet n'est pas forcément la panacée et que beaucoup de CoCoCo ont simplement vu leur contrat reconverti en CoPro, avec un «projet» plus ou moins articulé. Nouveau contrat, mêmes problèmes, s'intitule, du reste, un rapport publié en octobre 2005 par le Nidil, la branche «travailleurs atypiques» du syndicat CGIL (gauche). Certes, certains experts en informatique, développeurs de site Internet, traducteurs littéraires, graphistes publicitaires et autres travailleurs intellectuels peuvent préférer les collaborations sur projet, moins lourdes à gérer du point de vue comptable et fiscal par rapport à un statut purement indépendant. Mais les autres n'ont souvent pas le choix et doivent se plier à ce que propose l'entreprise. Selon des données de l'institut de statistiques Istat reprises par le Nidil, 61 % des collaborateurs sont des femmes (alors qu'elles ne représentent que 39 % des actifs) et 63 % ont moins de 40 ans.

Auteur

  • Marie-Noëlle Terrisse