«Habituellement, l'évaluation des salariés n'est pas un thème que les entreprises négocient en interne. Nous, nous avons pris soin de discuter des méthodes à appliquer », explique Paule Viallon, DRH de Groupe Fives-Lille, spécialiste en ingénierie industrielle. Ici, la politique d'évaluation et de développement des savoir-faire est somme toute classique. « C'est le contexte dans lequel elle s'inscrit qui est novateur. En effet, les organisations syndicales ont toutes répondu présentes ! », note Paule Viallon.

Plus qu'une recherche d'originalité, c'est une logique d'efficacité qui a guidé la démarche. Un postulat de base : simplifier l'entretien pour permettre au salarié d'être un acteur majeur de son évolution professionnelle, mais en le dédramatisant. Mais aussi en le rendant plus efficace. « Lorsque le salarié connaît la procédure en amont, la défiance tombe », explique la DRH.

L'accord du 12 décembre a, ainsi, reconnu un dispositif de classement des salariés, avec une grille permettant une identification selon des groupes, à savoir les «prêts à bouger», les hauts potentiels, etc. Les plans d'action individuels (formation, objectifs, évolution de carrière) découlent de cette typologie. « Si vous dites à un salarié qu'il fait partie des «prêts à bouger», cette perspective de mobilité peut l'inquiéter. Avec la grille sous les yeux, il est soulagé, et voit immédiatement que les «prêts à bouger» s'inscrivent dans une progression », reprend Paule Viallon. A contrario, l'accord facilite aussi les actions correctives : « Si un manager doit sanctionner la progression d'un collaborateur, c'est plus facile de le dire en se référant au modèle commun. »

Pour Jean-Michel Fromont, de la CFE-CGC, organisation majoritaire, le texte adopté va permettre de fidéliser les jeunes en leur offrant des perspectives claires : « Ils sauront à quoi ils peuvent prétendre. Auparavant, c'était très flou. Du coup, beaucoup ne restaient pas. » Même bénéfice du côté des seniors, largement majoritaires dans le groupe. Selon le militant, « l'accord devrait permettre de construire des fins de carrière plus motivantes ».

Dernier avantage de ce système : la transparence, génératrice de dialogue entre le manager et son n-1. « S'il n'est pas d'accord, le salarié dispose du même modèle de support que son manager pour contester », poursuit la DRH. Un objectif d'égalité d'autant plus important que Groupe Fives-Lille rassemble plus de 30 filiales. « Désormais, l'évaluation des 5 000 salariés est harmonisée », se réjouit Alain Grillet, de la CFDT.

Les premiers entretiens d'évaluation conformes au nouveau dispositif ont déjà commencé. Au vu du caractère obligatoire de l'accord, ils devraient rapidement s'étendre à toutes les entités.