Dans la tradition laïque, le monde de la religion et celui de l'entreprise ne devraient pas se rencontrer, l'un étant de l'ordre du privé tandis que l'autre ressortit à la vie publique. Cependant, à une époque où les pratiques religieuses et leurs signes extérieurs font débat, une meilleure gestion de ces cultures dans le monde du travail concerne la société entière et ne peut se limiter à des simulacres de tolérance.

La gestion des cultures religieuses dans le monde du travail ne peut, en effet, se cantonner à autoriser ou, au contraire, à proscrire le port du turban ou du voile. Derrière les signes, il y a les hommes et ce qui, pour eux, fait sens. Comprendre les enjeux des options religieuses et de leurs manifestations est donc indispensable tant dans la société multiculturelle de l'Europe actuelle qu'au sein même des entreprises qui en font la force économique.

Pour Patrick Banon, spécialiste en sciences des religions et systèmes de pensée, membre du laboratoire d'études sur les monothéismes à l'Ecole pratique des hautes études, la première démarche devrait consister à accepter honnêtement de revisiter le mysticisme républicain qui anime notre idéal démocratique. Il propose aux responsables d'entreprise et, notamment, aux responsables RH, une approche du phénomène religieux destinée à leur fournir à la fois les moyens de comprendre et les moyens d'agir dans un contexte rendu délicat par la montée de l'intégrisme. Une leçon de démocratie qui devrait bénéficier tant à la paix sociale qu'à la performance des organisations.