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Les opérateurs privés sont satisfaits de leurs résultats

Les Pratiques | Point fort | publié le : 24.01.2006 | Anne Bariet, Marie-Pierre Vega

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Les opérateurs privés sont satisfaits de leurs résultats

Crédit photo Anne Bariet, Marie-Pierre Vega

En 2005, l'Unedic a confié le reclassement de près de 10 000 demandeurs d'emploi à cinq opérateurs privés : l'Apec, Adecco, BPI, Altedia et Ingeus. Les premiers résultats sont encourageants. Reste, aujourd'hui, à transformer l'essai.

Le recours à un prestataire privé peut-il accélérer le retour à l'emploi ? Les sociétés privées (agences d'intérim, sociétés de réinsertion, cabinets de recrutement), qui peuvent désormais faire leur entrée sur le marché du placement des chômeurs, scrutent avec impatience les résultats des expérimentations mises en place par l'ANPE et l'Unedic, au lendemain de la loi Borloo du 18 janvier 2005.

Le régime d'assurance chômage avait, en effet, signé cinq contrats, l'an passé, entre février et juin, avec des prestataires privés, l'Apec, Adecco, Altedia, BPI et l'australien Ingeus. L'objectif était de reclasser près de 10 000 demandeurs d'emploi choisis parmi des chômeurs vulnérables : plus de 45 ans, chômeurs longue durée ou présentant des risques de chômage longue durée, peu qualifiés, RMistes... C'està-dire des personnes susceptibles de bénéficier des 23 mois d'indemnités - la durée maximale - versés par les Assedic. Près d'un an après, quels sont les résultats ? Un bilan officiel, plusieurs fois reporté, devrait être établi, en ce début d'année, lors de la signature de la convention tripartite. Mais, d'ores et déjà, les premiers résultats sont encourageants, selon les acteurs.

Tout d'abord, le reclassement est plus rapide. La plupart des acteurs concernés affichent un délai de retour à l'emploi d'environ trois mois. Altedia, par exemple, cabinet privé de conseil en ressources humaines, a été retenu par l'ANPE Paca et l'Assedic Côte d'Azur pour reclasser 562 demandeurs d'emploi volontaires présentant un risque prévisible de chômage de longue durée. « Le dispositif a démarré courant juin, mais il est réellement monté en régime après l'été », précise Xavier Lacoste, directeur associé d'Altedia. Fin décembre dernier, 231 personnes étaient retournées en emploi, dont 133 en CDI, 27 en CDD de plus de six mois et 71 en CDD de moins de six mois.

A l'Apec (Association pour l'emploi des cadres), chargée du placement de cadres de plus de 45 ans, le taux de retour à l'emploi est de 38 % à six mois. Un résultat atteint à douze mois, en moyenne, lorsque le cadre ne bénéficie d'aucun accompagnement particulier. D'où la tentation de passer « de l'expérimentation à la standardisation, dès le 1er juillet 2006 », indique Jacky Chatelain, directeur général de l'Apec.

La ventilation des postes proposés en cas de reclassement est, toutefois, à regarder en détail. De fait, si les CDI existent, les CDD et les missions d'intérim de moins de six mois sont aussi comptabilisés dans les résultats. Chez BPI, par exemple, 171 personnes ont retrouvé un emploi, dont 67 en CDD de plus de six mois ou en CDI. Les 104 autres sont en intérim, en CDD de moins de six mois ou en contrat (CDI ou CDD) d'une durée hebdomadaire inférieure à 32 heures. Seule l'Apec revendique un « taux de CDI trois fois supérieur à celui observé sur cette tranche d'âge (plus de 45 ans) en accompagnement standard, indique Jacky Chatelain. Nous gagnons 35 à 40 points ».

Accompagnement individualisé

Points communs de ces méthodes : primo, l'accompagnement individualisé. Il dure de neuf à dix mois, en moyenne, mais le candidat est également accompagné pendant six à sept mois après la prise de poste. Dans tous les cas, un consultant suit, en moyenne, 20 à 25 candidats (50 à l'Apec), alors qu'à l'ANPE, un conseiller est chargé d'accompagner près de 250 chômeurs. Secundo, le consultant est également chargé de prospecter les entreprises pour dénicher des postes à pourvoir. « Nous travaillons dans une logique de placement, poursuit Jacky Chatelain. Les consultants vont dans les entreprises pour recueillir des offres de poste. »

C'est ainsi qu'Adecco compte s'appuyer sur son réseau pour atteindre son objectif : le reclassement de 2 000 demandeurs d'emploi de la région Rhône-Alpes. « En deux mois, novembre et décembre, nous avons proposé 5 430 postes », indique Stéphane Brion, directeur du projet A3 (prononcez «A cube» pour Adecco, ANPE et Assedic), le nom de code de l'expérimentation ; 1 230 postes proviennent du «réseau». Il s'agit, surtout, de missions d'intérim (80 %). Les autres offres, 4 230 postes, viennent du «marché caché», associations, collectivités locales, TPE, prospectées par les consultants des cinq centres de développement professionnels (CDP) du groupe.

Mais ces expérimentations ont un coût pour le régime d'assurance chômage. Chez Adecco, par exemple, le placement s'élève à 3 600 euros (5 200 euros pour une personne de plus de 50 ans). Il est fixé à 4 300 euros chez Ingeus (6 000 euros pour une personne de plus de 50 ans). La plupart des sociétés sont intéressées aux résultats. Les honoraires de la société de travail temporaire sont fractionnés en plusieurs étapes. Adecco touche 2 200 euros au moment de la prise en charge de l'allocataire, puis 1 400 euros en cas de réussite ; 800 euros à la signature du contrat, puis 600 euros après six mois d'emploi. Un accompagnement classique à l'ANPE ne coûte que 500 euros en moyenne. Mais, d'après les calculs de l'Unedic, ces opérations peuvent être rentables, à condition de réduire la durée d'indemnisation des demandeurs d'emploi de cinq mois. Un pari en passe d'être gagné.

Taux de refus important

Il faudra, néanmoins, compter sur la bonne volonté des candidats. Et là, les volontaires ne sont pas nombreux. Le taux de refus est important. Un problème jusqu'ici sous-estimé par l'Unedic. Pour parvenir à enregistrer 550 adhésions auprès de BPI, sur Marseille et Avignon, l'Assedic Alpes-Provence a, par exemple, organisé 62 réunions d'information collectives. « La plupart se sont tenues à la rentrée, la dernière a eu lieu le 10 octobre », note Pierre Peladan, chargé de projet à l'Assedic Alpes-Provence ; 51 % des 1 979 demandeurs d'emploi convoqués se sont présentés, soit 1 015 personnes. A l'issue de ces réunions, 657 ont accepté d'être reçues en entretien individuel par un consultant de BPI. Un peu moins d'une centaine ont finalement renoncé à entrer dans le dispositif. « Nous sommes habitués à des taux importants de non-présentation aux convocations, quel qu'en soit l'objet. Ceux qui veulent vraiment travailler viennent », estime Pierre Peladan.

Selon un questionnaire diffusé auprès d'un échantillon de personnes qui ont refusé le dispositif à l'issue de la réunion, « un tiers se déclarent autonomes dans leur recherche d'emploi ; un tiers sont déjà engagées dans un projet d'emploi ou de formation ; et un tiers ne précisent pas le motif de leur refus ». Au total, selon l'Unedic, 70 % des candidats sollicités refusent d'entrer dans ce type d'accompagnement.

L'essentiel

1 10 000 demandeurs d'emploi sont actuellement suivis par des opérateurs privés. L'objectif est de les reclasser plus rapidement afin de réduire la durée de leur indemnisation.

2 D'après les premiers résultats, la plupart des acteurs concernés affichent des délais de retour à l'emploi d'environ trois mois. Mais la ventilation des postes est, toutefois, à regarder en détail : les CDD et les missions d'intérim de moins de six mois sont comptabilisés.

3 Le point fort reste l'accompagnement individualisé : un consultant pour 20 à 25 demandeurs d'emploi ; une prospection intensive des entreprises.

Les chiffres du reclassement

Adecco. Lancé en mai 2005, le dispositif de reclassement cible 2 000 chômeurs de longue durée, qualifiés ou non, qui ont connu au moins douze mois de chômage dans les vingt-quatre derniers mois, ou dix-huit mois d'inactivité dans les trente-six derniers mois. Pour l'heure, sur 1 666 candidats qui ont signé la charte d'engagement, 845 sont reclassés : 32 ont créé leur entreprise ; les autres ont décroché un contrat - CDI (320) ; CDD (296) ; missions d'intérim (196 dont 176 une mission inférieure à six mois) et CNE (4). Cent personnes ont abandonné en cours de programme. Au total, selon Adecco, 53 % des signataires de la charte ont été reclassés en moins de trois mois.

Altedia. Le cabinet revendique un taux de retour à l'emploi de 43 % ; 562 personnes sont entrées dans le dispositif au 31 octobre 2005. Sur ce total, 231 personnes sont retournées en emploi fin décembre, dont 133 en CDI ; 27 en CDD de plus de six mois ; 71 en CDD de moins de six mois. Le délai de retour en emploi s'établit à un peu plus de trois mois. Le cabinet a enregistré 39 abandons, et 7 personnes qui l'avaient quitté ont réintégré le dispositif.

Apec. 425 personnes sont progressivement entrées dans le dispositif, entre mars et octobre 2005, pour un objectif initial de 500 cadres. « Sept sur dix ont décliné la proposition de l'Assedic. Elle faisait double emploi pour une moitié, qui bénéficiaient déjà d'un outplacement payé par leur entreprise. Les autres pensent être en mesure de s'en sortir seuls, selon l'Apec. A tort, car, à fin décembre, aucun de ceux-là n'avait retrouvé d'emploi. » Ce qui n'est pas le cas des adhérents d'Etap' carrières. Au 31 décembre, 170 personnes avaient retrouvé un travail, dont 65 % en CDI et 35 % en CDD de plus de six mois. Le taux de retour à l'emploi est de 38 %.

BPI. Au 31 décembre, le taux de reclassement est de 30 %. Sur 570 chômeurs suivis, 171 avaient retrouvé un emploi, dont 67 en CDD de plus de six mois ou en CDI. Les 104 autres sont en intérim, en CDD de moins de six mois, en CDD de plus de six mois ou en CDI d'une durée hebdomadaire inférieure à 32 heures.

Ingeus. Trois mille demandeurs d'emploi sont, actuellement, accompagnés par le cabinet australien. Sur ce total, 1 180 personnes sont sorties du dispositif : 120 ont trouvé un emploi - 37 % en CDI ; 47 % en CDD ; 16 % en intérim. Les durées de CDD et de CTT (contrat de travail temporaire) n'ont pas été communiquées. Une quinzaine de personnes ont abandonné le programme.

Auteur

  • Anne Bariet, Marie-Pierre Vega