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Les incertitudes du Contrat premier emploi

L'actualité | L'événement | publié le : 24.01.2006 | Anne Bariet, Guillaume Le Nagard

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Les incertitudes du Contrat premier emploi

Crédit photo Anne Bariet, Guillaume Le Nagard

En proposant des contrats spécifiques aux moins de 26 ans et aux plus de 57 ans, Matignon espère faire baisser le chômage d'ici à 2007. Les entreprises restent réservées sur l'intérêt de ces nouveaux dispositifs.

Après la création du CNE (Contrat nouvelles embauches), réservé aux entreprises de moins de 20 salariés, Dominique de Villepin a présenté le deuxième volet de son plan d'urgence pour l'emploi, le 16 janvier. Avec une mesure phare : le CPE (Contrat premier emploi), à destination des jeunes de moins de 26 ans.

Sur le fond, ce nouveau dispositif ressemble à s'y méprendre au CNE. Tout comme lui, le CPE est un CDI, assorti d'une période de «consolidation» de deux ans, au cours de laquelle l'employeur peut congédier le salarié sans motif. Parmi les autres dispositions : l'exonération de charges patronales pendant trois ans pour toute embauche à durée indéterminée (CDI, CNE ou CPE) d'un jeune au chômage depuis plus de six mois.

Huit dispositifs

Démarche électoraliste ou réponse à un réel besoin ? Depuis deux ans, les nouveaux contrats, aidés ou non, se multiplient, générant un peu plus de confusion chez les demandeurs d'emploi et les employeurs. Contrat jeune en entreprise (ou contrat Fillon), CI-RMA, CAE, contrat d'avenir... Pas moins de huit dispositifs ont été créés entre 2002 et 2006. « On entre dans une période de grand activisme gouvernemental », analyse Henri Vacquin, sociologue d'entreprise. Il reste au Premier ministre un an pour consolider sa politique et obtenir des résultats. Or, le chômage touche 23 % des jeunes, contre 9,6 % de l'ensemble de la population ; 240 000 personnes de moins de 26 ans actuellement sans emploi sont éligibles aux exonérations.

Effets d'aubaine

Sans attendre, cette réforme sera donc intégrée dans la loi sur l'égalité des chances, dont l'examen devrait commencer dès la seconde quinzaine de février au Parlement. Puis, le locataire de Matignon s'attellera au troisième volet de son plan : le financement de la protection sociale, les heures supplémentaires et le contrat unique. Le chemin qu'il lui reste à parcourir semble laborieux. Tout d'abord, si l'effet CNE est bien réel, 245 000 contrats ont été conclus entre août et décembre 2005, deux tiers de ces recrutements auraient eu lieu même en l'absence de ce dispositif. L'embauche via ce contrat répond bien à des effets d'aubaine. Pour autant, il reste apprécié des employeurs. « Sur 17 salariés, j'ai recruté 11 CNE, assure Damien Suau, patron d'une brasserie-pizzeria à Saint-Brieuc. Il apporte plus de souplesse qu'un CDI lorsque ça se passe mal. »

Accueil réservé

En revanche, l'accueil à l'égard des CPE est plus réservé. Le Medef a beau avoir approuvé la mesure, les entreprises restent sceptiques. Certes, le CPE garantit une durée indéterminée, alors qu'actuellement, six jeunes sur dix débutent avec un contrat de travail temporaire, d'après le Cereq (Centre d'études des qualifications). Mais les entreprises sont-elles prêtes à jouer le jeu ? « Nous sommes sur des secteurs qualifiés, indique Pascal Delmas, DRH de Tokheim Services (production et maintenance de pompes à essence). La meilleure voie pour nous, pour intégrer un jeune, est la voie de l'apprentissage ou de la qualification. »

Maurice Neyme, DRH de Spie Batignolles, optera, lui, pour un CDI «classique». « Fondamentalement, explique-t-il, ce qui déclenche le recrutement, c'est la croissance, l'activité, le carnet de commandes, pas les mesures pour l'emploi. » Son entreprise est, d'ailleurs, confrontée à des pénuries de recrutement ; 500 postes sont à pourvoir, cette année, dans toutes les catégories de personnel.

Choix du CDI

Didier Neyrat, directeur général de Cadextan, une SSII, choisira, lui aussi, le CDI pour accueillir une centaine de salariés cette année. « Nous sommes sur des recrutements de haut niveau, bac + 5. Face à la concurrence, la qualité du contrat fera la différence, tout comme la rémunération et la qualité de vie au travail. » A contrario, Raymond Allouche, DRH de Computacenter France (SSII et distributeur de matériels) estime que le CPE « apporte une vraie flexibilité » en raison « des activités cycliques de son secteur ». Il recrutera ses ouvriers et ses techniciens en CPE.

Le «CDD senior», mesure phare du plan d'action gouvernemental

Le plan du gouvernement en faveur de l'emploi des seniors, présenté aux partenaires sociaux, le 17 janvier dernier, s'inscrit dans la continuité de l'accord interprofessionnel du 13 octobre. Ainsi, le CDD de 18 mois, renouvelable une fois et réservé aux plus de 57 ans, déjà présent dans l'accord, constitue aussi l'innovation majeure du plan d'action qui doit permettre à la France de parvenir à l'engagement européen de 50 % des 55-64 ans en activité d'ici à 2010 (contre 37 % aujourd'hui).

Le ministre délégué à l'Emploi, Gérard Larcher, en a présenté les principales mesures aux partenaires sociaux, réunis en groupe de travail pour la deuxième fois. Une troisième et dernière réunion est prévue le 1er février, avant une conférence nationale sur les seniors, présidée par le Premier ministre, fin février. Le plan d'action, doté de 10 millions d'euros cette année, doit, lui, se mettre en place à partir de juin prochain. Gérard Larcher espère que l'accord interprofessionnel, qui est toujours à la signature, aura recueilli les paraphes des syndicats, hormis celui de la CGT, qui s'est déjà prononcée contre.

Parmi les autres mesures du plan, figurent la disparition progressive de la contribution Delalande - qui pèse sur les employeurs licenciant les salariés de plus 50 ans -, et la mise en oeuvre d'un cumul emploi-retraite. Le tout serait accompagné d'une campagne de sensibilisation d'au moins deux ans sur les atouts de l'expérience, et de l'ouverture d'un service spécifique aux seniors par l'ANPE.

Le contrat premier emploi

Le CPE est un CDI que l'employeur pourra rompre sans avoir à motiver sa décision dans les deux premières années. Les stages, CDD et périodes en alternance effectuées dans l'entreprise seront décomptés des deux ans.

En cas de rupture de contrat, après quatre mois de travail, iI ouvre droit à une allocation chômage de 460 euros, versée pendant deux mois.

Auteur

  • Anne Bariet, Guillaume Le Nagard