Fondée en 1988, Sevel Nord, filiale du groupe PSA Peugeot Citroën et Fiat, s'est rapidement heurtée à une raréfaction croissante de la main-d'oeuvre industrielle liée à la désaffection des jeunes pour les filières techniques et à la tertiarisation de l'économie locale. Pour garantir la hausse de l'effectif liée à sa croissance, l'usine nordiste, installée près de Valenciennes, qui assure la fabrication des monospaces et des utilitaires légers, s'est lancée, dès 2003, dans une politique active de recrutement et de formation des femmes, qui représentent près de la moitié des demandeurs d'emploi du bassin valenciennois. Avec pour objectif de s'adapter aux à-coups de l'activité, tout en favorisant la cohésion des quelque 4 000 salariés que compte l'entreprise.

Dans un premier temps, cette volonté de féminisation s'est traduite par des accords conclus avec des partenaires (agences de travail temporaire, ANPE...) et destinés à favoriser l'ouverture aux femmes de métiers jusqu'ici essentiellement masculins. Partant du constat que les postes à pourvoir ne nécessitaient pas de formation initiale spécifique, Sevel Nord s'est attachée à «féminiser» ces postes après adaptation. La sélection des personnes intéressées est réalisée à partir d'entretiens d'évaluation et de tests de dextérité. Des cursus ont été montés pour former des femmes, non seulement aux postes de montage de la chaîne, mais aussi aux métiers de cariste, de tôlier, etc. Des formations validées par des certificats de qualification paritaires de la métallurgie (CQPM).

L'aménagement des postes a aussi été revu pour baisser le niveau d'exigence physique. L'outil industriel, les processus de fabrication, ainsi que la définition et l'ergonomie des postes de travail ont, peu à peu, été adaptés pour faciliter l'intégration de cette population féminine.

Cette campagne n'a pas toujours été facile. « Les principaux obstacles à lever ont été de nature psychologique », souligne Jean-Marie Dailland, directeur général de Sevel Nord. En effet, les participantes aux réunions collectives d'information, organisées par les partenaires de l'usine, sont majoritairement des femmes au foyer souhaitant réintégrer la vie professionnelle, ou des femmes issues du tertiaire que l'univers trop masculin de l'automobile effraie parfois.

Les efforts du constructeur portent pourtant leurs fruits. Après une période d'adaptation aux postes, les employées se montrent particulièrement performantes. Et, selon la direction, la mixité produit d'indéniables effets positifs sur l'implication, la motivation et le «savoir-être» des équipes.

Soucieuse du devenir de cette catégorie de personnel et souhaitant que cette féminisation des emplois concerne tous les niveaux de l'entreprise, Sevel Nord a signé, en juillet 2004, avec les partenaires sociaux, une charte relative au développement de l'emploi féminin et à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Et, à travers une commission dirigée par une femme, la direction et les organisations syndicales ont engagé un suivi de cet accord d'entreprise, qui repose sur quatre orientations principales : homogénéisation des outils de sélection et de recrutement et féminisation des emplois ou des métiers, notamment par la voie de la formation ; garantie de niveaux de salaires équivalents ; garantie de promotions et de parcours professionnels identiques ; amélioration des conditions de travail et de vie liées à la féminisation : aménagement des horaires, temps partiel...

Depuis un an et demi, le nombre de femmes au sein du personnel temporaire a été multiplié par 10 dans les ateliers, pour atteindre près de 30 %. Au niveau de l'effectif permanent, le nombre de femmes est passé de 374 en 2002 à 424 en 2004. Il atteint, aujourd'hui, près de 10 % des ouvriers en CDI et 45 % des CDD. Surtout, il concerne, désormais, près d'un tiers des stagiaires, suite aux actions menées avec l'Education nationale pour promouvoir les métiers techniques auprès des jeunes filles.

1 Depuis 2003, Sevel Nord, pour pallier la pénurie de main-d'oeuvre industrielle, s'est lancée dans une politique active de recrutement et de formation des femmes.

2 L'entreprise a «féminisé» des postes sur des métiers «masculins». Des formations ont permis aux femmes d'accéder à des emplois de tôlier, de cariste, etc.

3 Selon la direction, la mixité a des effets positifs sur la motivation et le savoir-être des équipes. En juillet 2004, elle a signé une charte avec les syndicats afin de féminiser tous les niveaux de l'entreprise.