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« Face à la crise des banlieues, il faut être animé d'une logique de résultats »

Enquête | ENTRETIEN AVEC | publié le : 03.01.2006 | Violette Queuniet

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« Face à la crise des banlieues, il faut être animé d'une logique de résultats »

Crédit photo Violette Queuniet

E & C : Que pensez-vous des mesures proposées dans le projet de loi sur l'égalité des chances ?

P. B. : Avant tout, on ne peut manquer de souligner une certaine ressemblance avec des dispositifs qui avaient été mis en place il y a quelques années (le programme Trace, les emplois-jeunes), et qui ont été balayés en l'espace de trois ans. Or, il est toujours plus facile de détruire que de bâtir. Ces anciens dispositifs n'avaient peut-être pas donné tous les résultats escomptés, mais une dynamique était en place. Il en ira de même avec ces mesures qui produiront, elles aussi, des résultats différés.

Si l'on entre dans le détail, je suis plutôt favorable à ce que la Halde soit dotée d'un pouvoir de sanction. Mais quels liens établit-on entre la Halde et la nouvelle Agence de la cohésion sociale et de l'égalité ? Les discriminations ne sont généralement pas le fait de racistes patentés. C'est toute la société qui produit l'exclusion et les fractures sociales. Il y a donc tout un travail à faire sur la société française, et ce n'est pas la Halde qui le fera. En revanche, l'apprentissage à 14 ans n'est pas défendable. On ne peut pas à la fois énoncer un dispositif national qui a vocation à restaurer le principe d'égalité et désigner des publics ciblés pour l'apprentissage à 14 ans (les enfants des banlieues).

E & C : Que pensez-vous de l'implication de certaines entreprises, notamment à travers la signature d'une charte de la diversité ?

P. B. : Cela devient une activité de recherche ! Aujourd'hui, nous répondons à des appels d'offres de ministères pour savoir ce que deviennent ces chartes pour la bonne raison que rien n'a été mis en place pour leur suivi. Signer une charte de la diversité ne coûte rien et n'engage à rien, ce sont les entrepreneurs eux-mêmes qui le disent. En revanche, il existe un certain nombre de chefs d'entreprise sérieux qui souhaitent s'engager sur une pérennisation de la charte, se doter de statistiques et d'outils pour mesurer les progrès. Deux cent cinquante entreprises sur 2 millions, même s'il s'agit de grandes entreprises, ce n'est pas sérieux. On est sur de la mise en images.

J'irai plus loin : si on traite la question de la discrimination au niveau national comme cela a été traité avec les chartes de la diversité, je ne donne pas un an au gouvernement pour qu'il soit confronté à une nouvelle explosion des banlieues. Les choses sont si tendues qu'il faut être animé par une logique de résultats. Aujourd'hui, c'est moins un gouvernement politique qu'un gouvernement de syndicalisme qu'il nous faut, c'est-à-dire qui produit des résultats, pas des promesses.

* Auteur du Racisme au travail (éd. La Découverte).

Auteur

  • Violette Queuniet