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Enquête

Des dispositifs pour les DRH

Enquête | publié le : 03.01.2006 | A. B., E. F., M.-P. V.

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Des dispositifs pour les DRH

Crédit photo A. B., E. F., M.-P. V.

CV anonyme, charte de la diversité, audit... Sous la houlette du gouvernement, les outils des entreprises pour réduire la fracture raciale se multiplient.

> Les audits de pratiques

Développé, en 2004, par IMS-Entreprendre pour la Cité, dans le cadre d'un projet européen Equal, le diagnostic «diversité» vise à «obtenir une photographie» des pratiques de l'entreprise dans huit domaines RH : recrutement ; intégration ; évaluation ; évolution de carrière ; formation, sanctions et départ ; relation avec les parties prenantes ; conditions de travail.

A travers une série d'entretiens (individuels et collectifs), d'une analyse documentaire et de l'examem d'outils RH, le diagnostic permet de détecter des risques de discrimination, mais aussi d'identifier les bonnes pratiques de l'enteprise.

Par exemple, pour recruter, l'entreprise a-t-elle recours à différents modes de sélection pour favoriser l'objectivité du recrutement (mises en situation, tests psychotechniques, méthode des habilités) ? La communication de recrutement encourage-t-elle la diversité culturelle ? Suivent un inventaire des axes prioritaires, une synthèse et des recommandations livrés par l'association. Plusieurs entreprises, parmi lesquelles PPR, AXA, Ikea et PSA, ont déjà fait réaliser ce diagnostic. Coût : de 5 000 à 30 000 euros.

> Le CV anonyme

Parmi les différentes pistes actuellement à l'étude pour lutter contre les discriminations à l'embauche, le CV anonyme tient la corde. Proposé par Claude Bébéar, ex-président d'AXA, en 2004, il recueille, aujourd'hui, les suffrages des syndicats, des associations de lutte contre les discriminations, et d'une bonne partie de la classe politique. A l'instar de Samuel Thomas, vice-président de SOS Racisme, les défenseurs du CV anonyme y voient un moyen, conforme à l'idéal d'égalité des chances, de lutter contre les discriminations à l'embauche, sans recourir à la discrimination positive.

En revanche, le Syntec recrutement perçoit cet outil comme une «fausse bonne idée», car il l'estime trop compliqué à mettre en oeuvre. Fabrice Lacombe, directeur général de Michael Page, se dit, quant à lui, « très à l'aise » avec ce dispositif, aussi bien dans le cas d'un CV reçu par son cabinet de recrutement que dans celui d'un CV émis par le cabinet en direction d'un client. A condition, toutefois, que « cela soit organisé par la loi », d'une part pour éviter que les règles ne changent trop souvent, et, d'autre part, pour empêcher les distorsions de concurrence.

L'anonymation d'un CV consiste à masquer au recruteur un certain nombre d'informations - nom, prénom, âge, nationalité, adresse, photo -, afin que la présélection du candidat ne s'opère que sur les compétences. L'idée étant que, lorsque le recruteur est face au candidat, « un certain nombre d'a priori tombent », selon Samuel Thomas.

A l'appui de leurs propos, les défenseurs du CV anonyme disposent de deux études réalisées par l'Observatoire des discriminations*. La première, publiée en mai 2004, montre qu'un candidat reçoit d'autant moins de convocations à un entretien d'embauche que son CV indique qu'il est handicapé, maghrébin, quinquagénaire, disgrâcieux, ou originaire d'un mauvais quartier. La seconde étude, publiée en avril 2005, tend à montrer que ces facteurs deviennent moins discriminants dès lors que le candidat est face au recruteur. De là, les auteurs de l'étude concluent que « c'est l'envoi du CV et le tri sur CV qui constituent le frein principal à l'embauche », et que, de ce fait, « l'anonymation des CV semble [...] pouvoir incontestablement bénéficier aux candidats ».

* < http://cergors.univ-paris1.fr >

> La méthode des habiletés

La méthode de recrutement par simulation, développée par l'ANPE, est fondée sur des exercices reproduisant les gestes à accomplir dans une situation professionnelle donnée. Airbus, les Chantiers navals de l'Atlantique, PSA, ou encore Auchan, Accor, Ikea... l'ont utilisée. Originalité ? Les recruteurs renoncent aux critères sélectifs habituels : diplôme, âge, expérience. La sélection se fait sur le comportement et les savoir-faire du candidat. Le dispositif comporte quatre étapes : observation des postes de travail, élaboration d'une série de tests, validation auprès des salariés en place et test auprès des candidats. A l'origine de cette méthode, Georges Lemoine, directeur départemental de l'ANPE de la Vienne, maître de conférence associé au département de sociologie de l'université de Poitiers.

Il enseigne, également, à l'université d'Ottawa, au Canada, depuis 1986. C'est en essayant de trouver des solutions pour sortir les demandeurs d'emploi du chômage longue durée qu'il comprend que le diplôme n'est pas l'unique sésame pour l'emploi. Il met alors au point la méthode des habiletés. Avec un leitmotiv : montrer que tous les demandeurs d'emploi sont employables. Une mini-révolution pour des entreprises habituées à recruter sur CV. La première simulation sera testée chez Hydro-Québec (distributeur et producteur d'électricité) au Canada, en 1993, la seconde, chez Citroën, en 1996.

> La charte de la diversité

La charte de la diversité a été initiée, il y a un peu plus d'un an, par l'Institut Montaigne, club patronal présidé par Claude Bébéar, et piloté par l'Institut du mécénat de solidarité (IMS). Son but ? Conduire les entreprises signataires à rejeter tout acte de discrimination dans l'ensemble de leur process RH ; à sensibiliser et à former dirigeants et collaborateurs aux enjeux de la non-discrimination ; et à refléter, dans leurs effectifs, la composition culturelle et sociale de la société française.

Pour l'heure, quelque 260 entreprises ont paraphé ce texte. Azouz Begag, ministre délégué à la Promotion de l'égalité des chances, pour qui « la charte est une première étape », en espère 1 000 en 2006. Si les premières entreprises signataires font montre d'une réelle implication et présentent, d'ores et déjà, quelques actions concrètes, le gros des troupes n'en est encore qu'aux bonnes intentions. Normal, selon l'IMS, 180 entreprises, sur l'ensemble, ne s'étant engagées que depuis deux ou trois mois.

> Les formations

En 2000, Adecco a été contrainte de réagir après la découverte d'un fichier recensant les intérimaires d'origine étrangère. Après avoir rappelé la loi à ses salariés et à ses clients, et organisé des conférences de sensibilisation auprès de 5 000 entreprises, la société forme, aujourd'hui, son personnel pour l'aider à faire face aux demandes discriminantes des clients et objectiver le recrutement.

Adia a également entamé une sensibilisation de ses agents (lire p. 16). Idem pour VediorBis. A terme, la démarche pourrait s'étendre aux autres sociétés d'intérim à travers le Sett (Syndicat des entreprises de travail temporaire), qui, engagé dans un accord-cadre avec l'Etat, prépare des modules de formation pour toute la profession.

Le testing

Initiée en France par SOS Racisme, en 1998, cette pratique devrait être légalisée prochainement. C'est, en tout cas, le souhait émis par Dominique de Villepin, lors de la présentation, en décembre dernier, de son projet de loi sur l'égalité des chances. En 2002, la Cour de cassation avait jugé que les testings pouvaient être utilisés comme mode de preuve en justice. Au total, une quarantaine de procès ont eu lieu, dont SOS Racisme est à l'origine grâce au testing. Si, au départ, cette pratique était surtout utilisée pour prouver les discriminations à l'entrée des discothèques, elle concerne plutôt, depuis 2001, les cas de discrimination au logement ou à l'embauche.

Auteur

  • A. B., E. F., M.-P. V.