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Les Pratiques

Les conséquences indirectes du prêtde main-d'oeuvre illicite

Les Pratiques | L'AVIS DU JURISTE | publié le : 06.12.2005 | Alice FAGES Juriste en droit social

Selon l'article L. 125-3 du Code du travail, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d'oeuvre est interdite sous peine de lourdes sanctions pénales, à moins qu'elle ne soit effectuée dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire. Au plan civil, la sanction est la nullité de la convention passée entre les deux entreprises, ce qui dispensera la société bénéficiant de la prestation de la payer.

L'interdiction visée par l'article L. 125-3 C. tr. concerne les opérations à but lucratif ayant pour but exclusif le prêt de main-d'oeuvre, ces deux critères étant cumulatifs. Ainsi, une opération à but lucratif qui n'a pas pour but exclusif le prêt de main-d'oeuvre est autorisée et, inversement, une opération à but non lucratif qui a pour but exclusif le prêt de main-d'oeuvre est également autorisée (sous réserve du délit de marchandage).

Concernant les opérations à but lucratif, la jurisprudence est intervenue à plusieurs reprises pour délimiter la frontière entre le contrat d'entreprise autorisé et l'opération dont l'objet exclusif est le prêt de main-d'oeuvre, qui est illicite. Tel est le cas du contrat passé entre deux entreprises dont l'objet est la mise à disposition d'un salarié pour la durée d'un chantier, le prix facturé étant fonction des jours de présence du salarié sur le chantier, avec une marge bénéficiaire pour la société prêteuse. De plus, cette dernière n'étant ni présente ni représentée sur le chantier, elle n'avait aucun pouvoir de contrôle et de direction sur le salarié qu'elle avait embauché. Le contrat en cause avait donc pour unique objet la mise à disposition, à but lucratif, d'un salarié pour une durée déterminée, opération interdite par l'article L. 125-3 du Code du travail (Cass. soc. 17 juin 2005, n° 03-13.707).

Généralement, ces affaires sont jugées au pénal, la sanction étant alors une amende de 30 000 euros et une peine d'emprisonnement de deux ans. Au plan civil, la nullité de la convention peut aussi être prononcée, ce qui a des conséquences pour le moins surprenantes comme le révèle l'affaire jugée le 17 juin dernier.

La Cour de cassation a, en effet, considéré que la convention étant illicite, les factures relatives à la «sous-traitance» du salarié, dans de telles conditions, sont sans objet. L'entreprise ayant bénéficié de la mise à disposition est non seulement en droit de ne pas payer les factures restantes mais encore elle doit obtenir le remboursement de celles déjà payées.

Voilà de quoi rendre encore plus dissuasifs les prêts de main-d'oeuvre illicites !

Auteur

  • Alice FAGES Juriste en droit social