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Écoute-moi, tout simplement

Demain | Chronique | publié le : 06.12.2005 | De meryem Le Saget

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Écoute-moi, tout simplement

Crédit photo De meryem Le Saget

Quand la communication ne passe pas, on incrimine facilement l'émetteur qui s'exprime mal ou qui ne sait pas exposer ses idées. Mais ce serait ignorer les très nombreux cas où le récepteur est en cause, fort occupé à tenir d'autres rôles que celui d'écouter. Petit panorama de ces réflexes parasites.

Le détective. Quand quelqu'un parle, toute l'énergie du détective est tendue pour deviner ce que la personne pense vraiment. « Derrière ce qu'elle énonce, ne veut-elle pas dire autre chose ? » Les Français sont les champions de ces messages à plusieurs niveaux qui viennent perturber à répétition la bonne compréhension mutuelle.

L'anticipateur. Pendant que l'autre avance ses idées, celui-ci prépare déjà sa réponse. Occupé à mettre en forme sa répartie, il n'a, pour l'interlocuteur, qu'une écoute limitée.

Le filtreur. Celui-là ne veut entendre qu'une partie du message et non sa totalité. Il filtre ce qui l'intéresse, ce qui lui convient ou l'arrange. Parfois, le filtreur passe à l'attaque et devient harponneur. Il repère dans les propos de l'autre un mot ou une expression qui l'énerve et réagit violemment en prenant appui sur cette phrase. En fait, il a surtout besoin de dominer l'échange ou de reprendre l'avantage.

Le commentateur. Celui-ci ramène tout à sa propre expérience. « Ah oui, c'est exactement comme moi », ou bien « Ce n'est pas du tout comme moi ». S'y ajoute souvent un jugement de valeur : c'est plutôt bien et je vous félicite, ou c'est vraiment dommage et je vous plains. Le commentateur se projette dans l'histoire qu'on lui raconte et donne son opinion à chaque étape. Il ne sait pas écouter l'histoire de l'autre sans y mêler la sienne.

Le bifurcateur. Il tient le rôle d'aiguillage de train ou d'échangeur d'autoroute. Quand le sujet ne l'intéresse pas, il en change. Son interlocuteur est parfois surpris, car le mouvement peut s'avérer soudain, mais le bifurcateur ne s'en rend pas compte. Il entraîne la conversation vers ce qui l'intéresse lui.

Le compétiteur. Dès que vous lui racontez quelque chose, il reprend la parole avec un meilleur témoignage ou une expérience similaire mais nettement supérieure. Vous dites : « J'ai joué au foot hier avec mon fils », il vous répond : « Moi, j'ai passé la soirée à regarder la finale du siècle à la télé ; quel match incroyable ! » Jeu classique de compétition : tu me racontes ton expérience et je surenchéris pour te coiffer au poteau.

Le distrait. Qu'il soit rêveur, fatigué ou préoccupé, le récepteur s'échappe de l'échange. Pendant que l'interlocuteur parle dans le vide, l'autre l'écoute l'air absent, son esprit vagabonde ailleurs. Il se réveille brusquement quand on lui demande ce qu'il pense, ou ce qu'il ferait dans un cas pareil.

L'apporteur de solutions. Ecouter sans donner de conseil lui est impossible. Il a besoin de passer à l'action et d'aider l'autre à faire de même. Dès qu'on lui raconte une histoire, il propose une solution. Pour lui, écouter sans rien dire, c'est capituler. Il ne comprend pas que l'autre puisse seulement attendre d'être écouté.

Comment s'étonner qu'on ait tant de mal à s'entendre quand, d'un côté, l'émetteur cherche une oreille attentive et, de l'autre, le récepteur est absorbé dans tant de choses à la fois ? Mieux écouter commence donc par accepter de ne rien faire d'autre en parallèle.

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris <lesagetconseil@wanadoo.fr>

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  • De meryem Le Saget