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Enquête

« Il faut passer par des critères d'évaluation négociés et reconnus »

Enquête | ENTRETIEN AVEC | publié le : 29.11.2005 | G. L. N.

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« Il faut passer par des critères d'évaluation négociés et reconnus »

Crédit photo G. L. N.

E & C : Pourquoi la pratique d'augmentations individuelles au mérite s'est-elle largement répandue depuis vingt ans, au détriment des augmentations à l'ancienneté ?

P. L. : Les augmentations à l'ancienneté ont été mises en place au début des Trente Glorieuses pour fidéliser une main-d'oeuvre nomade pendant la période de plein emploi. La pratique s'est institutionnalisée jusqu'à entrer dans la plupart des conventions collectives.

Depuis vingt ans, les entreprises sont revenues sur ces politiques pour plusieurs raisons : la concurrence accrue, notamment via la mondialisation, et l'évolution des systèmes productifs qui ont intégré certains éléments du modèle japonais, tels que le «juste à temps» et le «zéro défaut».

Les employeurs ont voulu mobiliser davantage leurs salariés pour des soucis de compétitivité et parce que les nouveaux modes d'organisation nécessitaient une implication plus forte.

Passer à l'individualisation a aussi permis de limiter les augmentations générales. La rémunération à l'ancienneté coûte, en effet, très cher lorsque la population active a majoritairement dépassé le milieu de carrière, ce qui a été le cas en France dans de nombreux secteurs, dès les années 1980. Cela explique notamment les nombreuses mises à la préretraite durant cette période.

E & C : Quelles sont les limites de l'individualisation en termes de management des ressources humaines ?

P. L. : La principale limite tient dans la nécessité de mesurer les performances individuelles. Or, s'il n'existe pas un consensus minimal sur les critères d'évaluation, cela génère un sentiment, justifié ou non, d'absence d'équité interne, qui nuit à la mobilisation des salariés. La réussite de l'individualisation passe donc par une négociation de critères d'évaluation afin qu'ils soient reconnus par tous. Cela est d'autant plus important pour la France que le droit du travail met en avant le principe à «travail égal, salaire égal».

Enfin, l'individualisation ne peut pas conduire à différencier trop fortement les salaires, car les nouveaux modes d'organisation nécessitent une coopération accrue des salariés. C'est pourquoi elle ne se substituera vraisemblablement pas totalement aux augmentations à l'ancienneté, même pour les cadres.

Auteur

  • G. L. N.