logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

Trois années de reconversion

Enquête | publié le : 18.10.2005 |

Image

Trois années de reconversion

Crédit photo

Annoncer la fermeture d'un site industriel trois ans avant le jour J. C'est le pari tenté par Arcelor à Mardyck, cité voisine de Dunkerque. Une démarche payante puisque l'anticipation va permettre de repositionner l'ensemble des salariés sur les autres sites du groupe. Sans aucun licenciement.

Le scénario était écrit d'avance. C'est dès la fin de l'année 2003 qu'Arcelor Packaging International (Api), à Mardyck (Nord), spécialisé dans les aciers pour emballage, avait annoncé la fermeture de son site de production, prévue pour la fin 2006. Trois ans ont été nécessaires pour permettre le transfert de la production vers d'autres sites du groupe, notamment à Florange (Moselle).

Trois ans également pour prévoir les mutations du personnel. Car Arcelor s'est engagé à ne procéder à aucun licenciement sec. Outre les départs pour mesures d'âge, qui concernent 86 salariés, 176 reclassements sont proposés. Priorité est donnée à la mobilité interne ! La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) a constitué la pièce maîtresse de l'opération de reconversion.

Cartographie des savoir-faire

« Dès 1990, nous avions signé un accord, Acap 2000 (Accord sur la conduite de l'activité professionnelle), qui introduisait une démarche prospective des compétences, insiste David Dubois, responsable ressources humaines du site. Nous disposions d'une cartographie très précise des savoir-faire, regroupés par métiers, et des besoins de chaque site en ressources, réactualisée chaque année. Nous avons ainsi pu mettre en place un processus de mobilité visant à répondre progressivement aux demandes des sites et aux aspirations des salariés dont l'emploi est supprimé. »

La mobilité est facilitée par un dispositif d'accompagnement poussé : des comités de mobilité, composés de responsables de ressources humaines, se réunissent chaque semaine pour faire des points d'étape. Un livret d'accueil et d'intégration, regroupant l'ensemble du parcours professionnel, est remis à chaque salarié sur le départ. En outre, un suivi est instauré sur les deux premiers mois.

Période d'essai

Pendant cette période, le salarié est détaché de l'entreprise tout en faisant toujours partie des effectifs du site de Mardyck. « C'est une sorte de période d'essai, poursuit David Dubois. Par ailleurs, une convention tripartite formalise noir sur blanc les engagements de chacun, le site d'accueil, l'entreprise de départ et le candidat. Tous les salariés bénéficient d'adaptations à leur nouveau poste de travail, particulièrement à des process industriels. C'est le personnel administratif qui a bénéficié des formations les plus lourdes. L'objectif était, ici, de reconvertir une partie des employés (six) vers des postes industriels. »

Résultat de l'opération ? Un an avant la fermeture du site, 101 personnes ont été mutées, 13 sont en cours de mutation et 53 ont une solution identifiée. « La solidarité entre sites a joué à plein, reconnaît David Dubois. Le robinet des embauches étant fermé depuis plusieurs années, les sites avaient des besoins importants de personnel. Il a alors fallu tempérer les demandes : nous devions réaffecter les salariés progressivement. »

Mais David Dubois s'est heurté à une autre difficulté : alors que les premiers départs s'organisaient, il a fallu remobiliser le personnel encore en place. Un exercice difficile : « Nous devions persuader les salariés que leur présence sur le site pendant les trois dernières années de fonctionnement des outils n'était pas un handicap pour retrouver un emploi à terme. Mais, au fur et à mesure que des solutions étaient proposées à leurs collègues, l'angoisse montait pour ceux qui ne connaissaient pas encore leur point de chute. » Neuf salariés sont toujours en recherche de solution.

Maintien des performances

Pour restaurer la confiance, l'entreprise a lancé un plan, baptisé PMP (Plan de maintien de la performance), fin 2003, à Mardyck. Une prime de maintien de performance a été mise en place : elle est progressive au cours des trois années.

Qu'en pensent les syndicats ? Les promesses du début n'ont pas été tenues, dénoncent-ils. « Au départ, on nous avait proposé des postes uniquement à Mardyck et à Dunkerque finalement, plusieurs emplois ont été envisagés à Florange », assure Robert Olivieri, délégué CFDT. Par ailleurs, Michel Wuilbeaux, délégué CGT, déplore « les nouvelles conditions de travail des salariés mutés. La plupart doivent apprendre un nouveau métier, les postes proposés se trouvant dans les aciéries près des hauts-fourneaux, des lieux à température élevée ».

Pérennité des emplois

Les organisations syndicales critiquent également « les reconversions des administratifs, obligés de s'orienter vers des postes industriels ». Plus généralement, ils craignent que ces nouveaux emplois ne soient pas pérennes, l'avenir de la sidérurgie en Europe restant préoccupant.

Enfin, tous redoutent que les salariés toujours en place à Mardyck ne soient pas les mieux lotis. Pour Joël Liagre, délégué CFE-CGC, « les derniers n'auront pas le choix de leur orientation ». Malgré ces bémols, tous s'accordent sur un point : l'annonce à long terme donne du temps à la reconversion. Les licenciements secs restent inconnus chez Arcelor. A. B.

Que devient le personnel ?

> Nombre de salariés employés à Mardyck : 274

> Mesures d'âge : 86

> Mutations : 101 (dont 26 à Florange, 27 à Sollac Mardyck et 94 à Dunkerque)

> Solutions identifiées : 53

> Dossiers en cours : 13

> Recherche de solution : 9

> Invalidité/maladie : 5

> Sorties : 7