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L'OCDE appelle à faire plus et mieux

Les Pratiques | Point fort | publié le : 04.10.2005 | Martine Doriac

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L'OCDE appelle à faire plus et mieux

Crédit photo Martine Doriac

Dans sa dernière livraison de «Regards sur l'éducation», l'OCDE pointe la nécessité d'une formation continue tout au long de la vie pour répondre à l'évolution des besoins en compétences.

Dans son rapport 2005 «Regards sur l'éducation», l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) invite les gouvernements des 30 pays (1) qui la composent à redoubler d'efforts pour favoriser un accès plus large à la formation post-scolaire. « Alors que la mobilité professionnelle s'accentue et que le monde du travail devient plus complexe, il est de plus en plus nécessaire pour chacun de développer ses compétences et connaissances tout au long de sa vie active », insistent les auteurs de l'enquête. Pour la première fois, cette année, ils publient une analyse comparative de la participation de la population active à des activités de formation continue et des données sur la répartition des revenus du travail selon le niveau de formation.

La formation initiale ne suffit plus

En réaffirmant les principes de formation tout au long de la vie auxquels avaient déjà souscrit tous les ministres de l'Education nationale de ses pays membres réunis en 1996 -, soit trois ans après la naissance du concept inspiré par Jacques Delors, en 1993, dans son livre blanc Croissance, compétitivité, emploi : les défis et les pistes pour entrer dans le 21e siècle -, l'OCDE souligne par défaut que le chemin à parcourir en matière de formation continue est encore long dans la plupart des pays industrialisés. Et cela, d'autant plus, comme le souligne le rapport, que la formation initiale ne suffit plus à répondre à l'évolution des besoins en compétences.

Dans ce panorama, cinq pays se distinguent parce qu'ils forment plus largement leur population : le Danemark, les Etats-Unis, la Finlande, la Suède et la Suisse, où plus de 40 % des actifs (terme qui inclut, selon la définition de l'OIT, les actifs occupés et les chômeurs) participent, chaque année, à des programmes de formation. Ils sont moins de 10 % en Espagne, en Grèce, en Hongrie, en Italie et au Portugal. Mais former largement ne signifie pas former longtemps : les actifs des cinq pays aux taux de participation élevés se forment durant 42 heures en moyenne, une durée qui s'applique également au Royaume-Uni, alors que la Grèce et la Hongrie, quand elles forment, le font sur plus de 100 heures. Le Canada a, lui, le mérite d'associer participation intensive et extensive avec un taux proche de 30 % et plus de 100 heures par participant.

Position moyenne de la France

La France se situe à mi-chemin, à peine au-dessus de la moyenne en nombre de participants, avec seulement 23 % de ses actifs âgés de 25 à 64 ans qui se livrent sur douze mois à une activité dite « non formelle de formation liée à l'emploi » (2), et cela malgré tout l'arsenal législatif qui lui est spécifique - dont les lois de 1971 et la récente loi du 4 mai 2004 relative à la formation tout au long de la vie. Ce taux de participation est jugé insuffisant par l'OCDE, même si l'Hexagone est l'un des pays qui dispense le plus d'heures de formation, soit 88 heures, par actif formé. « Il serait utile, en France, d'augmenter le nombre de formés pour arriver à 35 % », soulignait Bernard Hugonnier, directeur adjoint pour l'éducation à l'OCDE, lors de leur présentation à Paris, en se demandant si la formation professionnelle allait à ceux qui en ont le plus besoin.

La question peut paraître «rebattue». Elle mérite encore et encore d'être posée, particulièrement dans notre pays où la récente réforme de la formation professionnelle a vocation à inciter plus largement à la formation des salariés fragilisés vis-à-vis de l'emploi. Dans les faits et dans tous les pays de l'OCDE, les opportunités de formation bénéficient davantage aux plus qualifiés et à ceux qui ont déjà un emploi qu'aux chômeurs et à ceux qui n'ont pas obtenu de diplôme de fin d'études secondaires, qui sont également les moins présents dans les formations post-scolaires.

Cause et conséquence, le risque de chômage des personnes qui n'ont pas terminé leur deuxième cycle d'enseignement est plus élevé et s'amplifie, alors que les niveaux d'études, dans presque tous les pays de l'OCDE, s'élèvent régulièrement. Les trois quarts des 25-35 ans obtiennent un diplôme de fin d'études secondaires qui garantit leur entrée sur le marché du travail. La Corée et le Portugal, en particulier, ont fait d'importants efforts pour étendre le niveau de formation secondaire de leurs citoyens.

Ecarts de salaire grandissants

La «plus-value» grandissante du diplôme et de la formation complémentaire se traduit concrètement par des écarts de salaires qui se creusent entre les personnes les moins et les plus qualifiées. Dans tous les pays, les études «supplémentaires» procurent un avantage salarial qui s'amplifie. Les écarts de salaires entre les diplômés du supérieur et ceux du secondaire se sont accentués entre 1997 et 2003 dans 18 des 22 pays qui fournissent des données pertinentes. Ils sont de 25 % au Danemark et en Nouvelle-Zélande, et de 50 % à 119 % en Allemagne, aux Etats-Unis, en Finlande, en France, en Hongrie, en Irlande, en Italie, au Portugal, en République tchèque, au Royaume-Uni et en Suisse. Le «bonus» est encore plus marqué pour les hommes diplômés d'universités en Espagne, en France, en Hongrie et au Luxembourg.

L'investissement dans l'enseignement supérieur, le rapport le souligne, est aussi un atout économique et social : il favorise la productivité et une meilleure santé mentale et physique. Le rendement du diplôme de formation supérieure a été chiffré. Il peut aller jusqu'à 15,8 % mais est inférieur à 10 % en France, où la participation financière de la nation à l'enseignement supérieur est jugée trop faible.

Notons aussi, pour la formation continue, que dans tous les pays de l'OCDE, ceux qui travaillent dans les services ont plus de chances d'accéder à une formation. Le fait d'appartenir à une grande entreprise, au service public, aux services aux entreprises, à la banque ou à la finance constitue un atout pour se former. Et comme on pouvait s'y attendre au vu des données françaises, ce sont avant tout les salariés à temps plein, plutôt en début ou en milieu de carrière, ceux qui se trouvent aux postes d'encadrement et ceux qui ont un niveau de qualification initial élevé qui en bénéficient.

Manque de données

Mais il manque à ce «Regards sur l'éducation», au sens anglo-saxon qui englobe formation initiale et professionnelle, des données sur les dépenses de formation continue et leur part dans les PIB des différents pays membres de l'OCDE. La publication de ces chiffres, disponibles pour l'enseignement initial, permettrait de mesurer le coût de la formation professionnelle, pays par pays, et son efficience.

(1) Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Corée, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Islande, Irlande, Italie, Japon, Luxembourg, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République slovaque, République tchèque, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Turquie.

(2) L'indicateur retenu pour avoir des données comparables d'un pays à l'autre englobe toutes les activités d'apprentissage organisées et régulières suivies pour des raisons professionnelles, qui ne sont pas les activités formelles d'enseignement suivies dans le cadre institutionnel des écoles, collèges et universités.

Pour en savoir plus : <www.oecd.org/edu/rse2005>

L'essentiel

1 La formation initiale ne suffisant plus à répondre à l'évolution des besoins en compétences, l'OCDE pointe la nécessité de développer ses connaissances tout au long de sa vie active.

2 Dans son analyse comparative des activités de formation continue, la France se situe à peine au-dessus de la moyenne des 30 pays étudiés ; 23 % des actifs, contre 40 % dans les pays scandinaves, partent en formation chaque année.

3 Dans de nombreux pays, les écarts de salaire s'accentuent de plus en plus entre les diplômés du supérieur et ceux du secondaire.

Auteur

  • Martine Doriac