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« Réforme complexe et choix délicats »

Dossier | publié le : 27.09.2005 | L. G.

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« Réforme complexe et choix délicats »

Crédit photo L. G.

Pour Marc Dennery, président du Groupement des animateurs et responsables formation en entreprise (Garf), ces derniers ont intérêt à fortifier leur ingénierie financière et pédagogique pour trouver des cofinancements et de nouvelles formes de formation.

E & C : En quoi la réforme impacte-t-elle le quotidien, le travail et les compétences des responsables formation (RF) ? Quelles compétences doivent-ils développer ?

M. D. : Les responsables formation doivent renforcer leur compétence juridique et leur capacité de négociation pour favoriser le dialogue social. Ils ont aussi tout intérêt à fortifier leur ingénierie financière et pédagogique pour trouver des cofinancements et de nouvelles formes de formation.

E & C : Comment doivent-ils travailler désormais avec leur Opca ?

M. D. : Comme auparavant ! Régulièrement et entièrement. Un Opca offre du cofinancement, simplifie la gestion via la subrogation, et apporte expertise et conseil. Il ne faut pas s'en priver. Les Opca ont beaucoup plus d'expertise que les RF en matière de finance et de choix du dispositif.

E & C : Les RF ont souvent exprimé, au cours des mois précédant la réforme, des craintes sur son ampleur. Sont-ils rassurés aujourd'hui ?

M. D. : C'est vrai qu'ils étaient inquiets. La réforme fait peur car elle est complexe. Elle oblige à faire des choix délicats et à cesser un certain ronronnement. Nombre de RF craignent les réactions de leurs partenaires sociaux et sont déjà dans des stratégies de catalogue de DIF «paix sociale». Il faut dépasser la peur, car la réforme est une formidable opportunité.

De même, nombre d'entreprises tentent de faire passer le DIF uniquement sur le temps de travail, c'est un mauvais calcul.

Que feront-elles face à des salariés qui auront capitalisé 100 ou 120 heures, soit 15 ou 16 jours de formation ? Les sortiront-elles pendant trois semaines du processus de production ?

Mieux vaut positionner le DIF hors temps de travail, du moins au début, car, ensuite, il sera impossible de revenir en arrière.

Parallèlement, il faudra un peu de temps au salarié pour qu'il comprenne l'intérêt de la formation hors temps de travail. Mais l'indemnisation de 50 % peut être incitative.

E & C : Avez-vous le sentiment que la réforme échappe déjà aux RF ?

M. D. : Non, elle ne leur échappe pas, mais elle implique plusieurs temps. D'abord, le juridique, puis celui du DRH. Viendra, ensuite, le temps du RF : celui de la construction des réponses, de l'offre DIF, des parcours de professionnalisation... Ils n'ont pas, aujourd'hui, tous les leviers.

E & C : Votre enquête Ofem-Garf montre une très faible intention de signer des accords d'entreprise mettant en musique la réforme de la formation. Cela vous étonne-t-il ? Est-ce de bon augure ? Est-ce une manière de mettre en jachère une partie de la réforme ?

M. D. : La signature d'accords d'entreprise sera nécessaire pour les groupes multi-conventions collectives. Je suis certain qu'en janvier 2006, on n'aura pas le même résultat que celui exprimé en mai-juin 2005. Déjà, beaucoup de signatures étaient en préparation cet été.

E & C : Votre enquête témoigne également du fait que les RF ont largement communiqué auprès des DG et des DRH, mais moins auprès des salariés. Comment l'expliquez-vous ? Est-ce préoccupant ?

M. D. : Difficile d'informer les salariés quand le message n'est pas défini ! Or, de nombreux points ne sont pas clairs : DIF, VAE, entretien... L'heure est encore à la réflexion. Un : il faut définir une stratégie. Deux : il faut préparer l'entretien professionnel. Trois : il faut communiquer durant l'entretien.

E & C : La majorité des RF déclarent que leur entreprise n'a pas l'intention d'augmenter les moyens - en budget, en effectif - du service formation pour mener à bien cette réforme. Est-ce tenable ?

M. D. : Ce n'est pas tenable, mais c'est ainsi que cela se passera ! Cependant, mieux vaut prévoir un peu de moyens aujourd'hui plutôt que d'exploser dans deux ou trois ans !

E & C : L'entretien annuel professionnel a fait l'objet, cet été, d'un avenant à la loi du 4 mai 2004. Pensez-vous vraiment que les hiérarchies aient le temps et les compétences pour les mener à bien ? N'est-ce pas un voeu pieux ?

M. D. : Un gros travail de mobilisation des hiérarchies est à prévoir pour leur faire comprendre que la formation est un moyen de motiver durablement le collaborateur qui a un lien de plus en plus relâché vis-à-vis de l'entreprise. Il faut que les entreprises comprennent que lorsqu'elles se préoccupent du prochain emploi de leur collaborateur, il travaille mieux dans celui qu'il occupe actuellement !

E & C : N'êtes-vous pas un peu utopiste ?

M. D. : Peut-être. La réforme arrive dans une période de sinistrose du marché de l'emploi. Les entreprises n'ayant pas de grands efforts à faire pour garder leurs salariés. Mais, avec le choc démographique qui arrive, les données vont changer. Mieux vaut s'y préparer.

Auteur

  • L. G.