logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les Pratiques

Peu d'engouement pour une démarche exemplaire

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 06.09.2005 | Frédéric Thual

Lancée il y a dix-huit mois pour soutenir les entreprises de la navale dans le bassin nazairien, la démarche Cap Compétences a touché près d'une entreprise sur deux. Les syndicats souhaitent une prolongation du dispositif.

C'est un programme « sans précédent ». A la mesure, en tout cas, du gigantesque Queen Mary 2, plus long paquebot jamais construit, parti de Saint-Nazaire (44) le 22 décembre 2003, le jour même de la signature de Cap Compétences. Un plan imaginé pour pallier la baisse de charges de l'après-Queen Mary 2, dont la construction a fait travailler près de 13 000 personnes, dont environ 8 000 employées par les sociétés coréalisatrices. Un plan destiné, aussi et surtout, à requalifier et à dynamiser les entreprises sous-traitantes, les fournisseurs et les Chantiers de l'Atlantique (groupe Alstom).

Financement de 37 millions d'euros

Dix-huit mois après, l'association AGP Cap Compétences (Medef, UIMM, CGPME, CCI), chargée de gérer les flux financiers, vient de dresser un premier bilan de ce programme prévu pour s'achever à la fin 2005. Une échéance que les syndicats voudraient voir repousser à juin 2006 pour permettre à un plus grand nombre de salariés et d'entreprises de bénéficier de l'exceptionnelle manne financière débloquée : 37 millions d'euros financés par l'Europe, l'Etat, la région des Pays de la Loire, le département de Loire-Atlantique, les Opca de branche et l'entreprise Chantiers de l'Atlantique.

Cela dit, l'enveloppe budgétaire est loin d'être épuisée. Et pour cause, parmi les 370 PME et TPE concernées, 147 (1) ont intégré le dispositif. « C'est le bémol d'une opération que nous réclamions et que nous soutenons. Elle a certes permis à des personnes d'accéder à des formations, mais trop peu ont pu en profiter. Certaines entreprises n'ont pas libéré leurs salariés car elles n'avaient pas les moyens de les remplacer. Sans doute faudrait-il imaginer un système d'échange de personnels entre les sociétés, Chantiers de l'Atlantique compris, pour pallier ces absences dues aux formations », estime Marc Ménager, délégué syndical CFDT aux Chantiers de l'Atlantique.

Sur un potentiel de 10 000 emplois en cotraitance, seules 1 600 personnes (75 000 heures) ont bénéficié d'une formation. « Nombre d'entreprises ont préféré se lancer à la recherche de nouveaux marchés pour occuper leurs salariés plutôt que de réfléchir à leurs besoins de formation », précise-t-il. Et pourtant, le programme ne leur coûtait rien. « Les prestations et une partie des salaires étaient pris en charge », explique Daniel Bahuaud, délégué général d'AGP Cap Compétences.

Deux programmes de formation

Destinée à favoriser la reconversion d'activité, l'amélioration des performances des entreprises en situation concurrentielle et le développement des compétences des personnels, la démarche Cap Compétences s'est traduite par deux programmes : «développement économique» (diversification-innovation, interfaces études et montage, performance) et «formation aux métiers» (chaudronnerie, logiciels, gestion, méthodes, etc.). Le tout entretenu par une dynamique collective et une méthodologie d'accompagnement très serrée.

Mise à disposition d'un consultant

Selon les missions, AGP Cap Compétences a référencé des organismes de conseil et de formation : le Cnam, l'Afpi, Céforalp, l'Apave, le Cesi, le Greta... Les entreprises pouvaient choisir le contenu de leur programme en fonction de leurs besoins. La mise à disposition d'un consultant dans leurs locaux a été le point fort de l'action.

Une soixantaine de sociétés se sont engagées dans la voie de la formation, tandis que 160 (Airbus comprise) ont misé sur le module «diversification-innovation». Certaines ont ainsi pu bénéficier de 2 000 heures de formation. « Beaucoup en ont profité pour structurer une fonction commerciale jusque-là inexistante », constate Daniel Bahuaud. A l'image de Shipelec, une PME de 25 personnes, spécialisée dans l'électricité navale et industrielle, où l'arrivée d'un consultant a permis de lever la tête du guidon et de trouver des compétences qui sommeillaient. Résultat, l'entreprise a développé un nouveau produit, déposé un brevet, et ouvert une agence à La Rochelle. Cette diversification lui permet de compenser la disparition de l'activité liée aux Chantiers de l'Atlantique.

Même satisfaction chez Soreel, concepteur d'armoires électriques, qui a pris conscience du besoin de formation ; 200 à 250 jours d'enseignement ont été dispensés en 2004 et 2005. Le budget formation est passé de 2 % à 4 % de la masse salariale « Sans Cap Compétences, nous aurions mis deux fois plus de temps à nous restructurer. Aujourd'hui, nous ciblons les embauches dans la robotique, la qualité, le commercial. Des profils hier inexistants ou sous-représentés chez nous. L'entreprise est en train de changer », reconnaît Jean-Louis Prin, directeur de Soreel.

200 nouveaux emplois

Plus simple à déployer au sein des Chantiers de l'Atlantique, la formation (mise à niveau, polyvalence, informatique, management...) a concerné 2 560 salariés (200 000 heures), de l'ouvrier soudeur aux cadres. Enfin, entre les emplois perdus et les créations, le solde laisserait apparaître la création de 200 emplois nouveaux dus aux efforts de diversification.

(1) Le programme a été ouvert à l'aéronautique pour permettre à 36 sous-traitants d'Airbus de bénéficier du dispositif.

Auteur

  • Frédéric Thual