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Enquête

Valoriser le professionnalisme

Enquête | publié le : 05.07.2005 |

Une fois repérées les personnes en difficulté avec l'écrit, reste à les inciter à se former. Sans les stigmatiser, en inscrivant la maîtrise des compétences de base dans la politique de formation de l'entreprise.

Illettrisme est un mot tabou, c'est aussi un terme technique précis : être en situation d'illettrisme signifie - à des degrés divers, et pour de multiples raisons - qu'une personne n'a pas assimilé certains apprentissages fondamentaux, qu'elle a du mal à lire ou à écrire... Cette carence peut rapidement devenir un handicap dans le travail. Selon Daniel Lustin, de Récif, société d'ingénierie de la formation, « la crainte de proposer aux salariés une formation aux savoirs de base est une fausse peur, qui est souvent le fait des dirigeants ou de l'encadrement, alors qu'il n'est pas rare de voir témoigner les intéressés eux-mêmes sur les plateaux de télévision. Ce n'est pas une honte, c'est une réalité... »

Signe d'évolution

L'inscription des apprentissages fondamentaux dans la politique globale de formation est un signe fort d'évolution de la part de l'entreprise. Ainsi, dans la société de nettoyage Terbati-Ternett (600 salariés, Nord), la formation aux écrits professionnels (menée avec le FAF Propreté) a été présentée comme un programme professionnalisant parmi d'autres. « Il a suffi que quelques-uns disent oui, pour que leurs collègues soient entraînés, remarque Ingrid Baudoin, responsable qualité. Puis, quand les premiers stagiaires ont raconté ce qu'ils apprenaient, cela a fait boule de neige. »

Moteur de départ

C'est un peu ce qui s'est passé dans la société Triselec, (260 employés, Nord), qui développe, depuis 1997-1998, avec le Cueep de Lille, des formations individualisées via l'informatique. Chaque salarié travaille avec Apprend-Tri (programme qui reprend à l'écran les situations de travail). A ceux qui ont le plus de mal à lire ou à écrire, on propose alors d'apprendre ou de réapprendre «la lecture et l'écriture». « Apprend-Tri est une sorte de sas vers la remédiation à l'illettrisme, remarque Dossè Kponton, responsable formation. C'est le moteur de départ pour que les salariés se rendent compte de leurs manques. »

Ensuite, ceux qui le désirent sont orientés vers «visio», une formation moitié à distance, avec webcam, et moitié en présentiel. Ce programme, à l'instar d'autres modules informatisés (sur l'hygiène ou la sécurité...), s'intègre dans la politique globale de formation.

Un effet dynamisant est le propre des formations aux savoirs fondamentaux. Certains voient leur vie bouleversée par l'apprentissage de la lecture et de l'écriture. Ils peuvent se réorienter. Beaucoup sont incités à suivre d'autres formations. Au plan personnel, aussi, des portes s'ouvrent. Mohammed Aberkahn, depuis cinq ans à Triselec, parle de son plaisir à mieux s'orienter sur les routes, à remplir des formulaires sans aide, de sa fierté d'avoir reçu un ordinateur, lors des Trophées de la formation, où il s'était classé troisième, à Lille, en 2003.

En programme «visio» dès son entrée dans l'entreprise, il a, depuis, suivi une formation de cariste et de conduite des engins de chantier : « Arrivé comme simple agent, je suis aujourd'hui opérateur polyvalent. »

F. R.

Des outils pour les artisans

La Confédération des artisans et petites entreprises du bâtiment (Capeb) lance la démarche ABC : «Artisanat, Bâtiment, Connaissance».

« Nos artisans vieillissent et ont du mal à trouver des salariés. Le turn-over est important, et il y a beaucoup d'accidents du travail », analyse Marie-Dominique Pinson, chef du service formation de la Capeb (Confédération des artisans et petites entreprises du bâtiment). Face à cette situation, la Capeb a décidé, lors de sa dernière assemblée générale, de doter ses 100 000 adhérents (jusqu'à 20 salariés) d'outils de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Ce programme d'anticipation des besoins inclut la maîtrise du français, sous le nom de code ABC, pour «Artisanat, Bâtiment, Connaissance». Il vise à acquérir un premier niveau de connaissance du français à partir du vocabulaire métier.

Dans un premier temps, la Capeb expérimentera son projet dans une ou deux régions, départements ou bassins d'emploi. Cette démarche devrait être étendue à tout le territoire. Un titre pourrait être élaboré par la suite, à partir de référentiels métiers simples, qui inclurait des éléments de connaissance de lecture et d'écriture.

Cette démarche s'appuie sur l'article L. 900-6 du Code du travail, qui permet la prise en charge de l'apprentissage du français dans le plan de formation, et sur l'article L.322-9, qui autorise le remplacement de salariés partis en formation dans les entreprises de moins de 50 salariés, sur la base du Smic.