Quand on croule sous le travail, ce n'est pas seulement qu'on est débordé. C'est souvent la conséquence de plusieurs effets cumulés. Dans sa tête d'abord, on croit qu'être professionnel, c'est arriver à tout finir. Or, plus personne, aujourd'hui, ne peut terminer ce qu'il a à faire. La question est donc « Sait-on s'organiser pour traiter ce qui est important ? », au lieu de « Comment tout finir ? » La «juste qualité» n'est plus faire parfait sur tous les sujets.
Le perfectionnisme, voilà une autre tendance qui crée des dérives : la croyance que le pro entre dans les détails et ne laisse rien passer. Faux. Etre perfectionniste, c'est comme avoir un comportement programmé, on ne peut agir autrement, on y tient et on s'obstine. Cela conduit à travailler tard, à pinailler sur les détails et, surtout, à ne pas déléguer. Pour deux raisons : d'abord, on pense que le travail ne sera jamais aussi bien fait par quelqu'un d'autre, ensuite, on n'a plus le temps d'expliquer à un collaborateur comment faire. Donc, on passe le week-end sur le dossier...
En fait, être pro aujourd'hui, c'est déléguer, travailler en équipe, responsabiliser ses collaborateurs. La boucle est vertueuse : déléguer fait grandir les autres, on peut alors davantage s'appuyer sur eux.
Supposons les mauvais réflexes endigués, reste un autre aspect à surveiller : la fatigue. Vous l'avez remarqué, quand on est épuisé, on ne sait plus trier ses activités ni par où commencer. L'encombrement devient chronique. Savoir gérer sa fatigue et en identifier les premiers signes est déterminant pour les années à venir. Plus les symptômes sont décelés tôt, mieux on peut faire face : recharger ses batteries, se détendre, préserver des coupures...
Cet équilibre personnel est fondamental dans une société devenue très interactive : il n'y a plus d'échanges d'informations neutres. Les sollicitations sont incessantes. Toute la journée, c'est l'avalanche de mails, d'appels téléphoniques et d'interruptions en réunion. Chaque message demande du temps, un suivi d'action. On a tendance à vouloir faire face en traitant les demandes en temps réel.... Mais être réactif sans discernement, c'est vite devenir inefficace. Devant les sollicitations incessantes, mieux vaut nuancer où l'on met son énergie, trier, dire non ou décaler dans le temps ce qui n'est pas essentiel. Sinon, les exigences des autres et leur timing s'imposent. C'est celui qui a les priorités les plus claires qui gagne, ne l'oublions pas !
Etre pro, c'est donc, également, se préserver des temps (seul ou avec ses équipes) de travail en continu, sans interruption. Finalement, c'est l'art de rester lucide face aux sollicitations permanentes, sans pour autant se sortir du jeu. Cela demande un solide équilibre personnel et une aptitude forte à gérer les priorités.
Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris <
