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Les Pratiques

Tous les salariés ont trouvé un emploi adapté

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 31.05.2005 | Emmanuel Franck

Afin de reclasser des salariés devenus inemployables dans l'industrie, Arcelor (ex-Usinor) a créé, en 1999, une entreprise de services dont l'activité a été choisie en fonction des compétences des salariés.

Voilà peut-être une solution au problème du maintien dans l'emploi des seniors, qui occupe actuellement les partenaires sociaux : l'entreprise à l'envers. C'est-à-dire une entreprise qui, au terme d'une révolution copernicienne, décide son activité en fonction des compétences de ses salariés, et non l'inverse. Créée en 1999 par Usinor (devenu, depuis, Arcelor), Hommes & Emploi (H & E) fonctionne selon ce modèle. Environ 300 personnes y ont été transférées depuis six ans, dont 230 y travaillent toujours. Ils sont anciens ouvriers ou anciens administratifs d'Unimétal et de Sollac, filiales d'Arcelor, aujourd'hui cédées ou rebaptisées, ainsi que d'Europipe, dont Arcelor possède des parts.

Responsabilité sociale

Ces salariés sont « trop jeunes pour bénéficier de mesures d'âge, ne possèdent plus les compétences adéquates ou sont trop fragilisés pour travailler en production, mais Arcelor ne souhaite pas les licencier, par souci de responsabilité sociale », déclare Gervais Hans, directeur général d'H & E. L'entreprise, située à Rombas (57), propose, aujourd'hui, trois types de prestations : l'entretien d'espaces verts, le second oeuvre du bâtiment (peinture, carrelage, pose de cloisons, sanitaires...), et la numérisation de documents, essentiellement administratifs. Ses clients sont des particuliers, des collectivités territoriales et des entreprises, dont Arcelor. « Ces activités n'ont pas été déterminées a priori, mais imaginées en fonction des ressources humaines dont nous disposions », explique Gervais Hans.

Accompagnement

Les 200 salariés d'origine (issus d'Unimétal, lire encadré), « que nous n'avions pas sélectionnés », précise Gervais Hans, sont divisés en deux catégories. Dans la première, ils viennent de la production et de la maintenance, et certains font du bricolage ou exercent un second métier en rapport avec le second oeuvre. Pour eux, H & E crée l'activité de second oeuvre et d'entretien d'espaces verts. Dans la seconde, ce sont principalement des femmes, venant des services administratifs, plus difficiles à employer, car « ne possédant que des bouts de compétences ». L'entreprise échoue dans une tentative de prestation de télésecrétariat, pour finalement s'orienter, « après quelques études de marché », sur la numérisation de documents. Un peu de formation s'est révélé nécessaire. « Il a aussi fallu prévoir un management adapté, fondé sur l'accompagnement plus que sur la subordination », explique Gervais Hans.

Bilan humain et économique

Six ans après le début de cette expérience, le bilan humain est positif. « Quelques individus ont été licenciés parce qu'ils refusaient de travailler, mais, globalement, il n'a pas été difficile de convaincre les salariés de s'y mettre », relate le directeur général, qui, par ailleurs, fait état d'un « bon climat social ». Les salariés ont retrouvé de la motivation, comme l'atteste le taux d'absentéisme, passé de 7 %, en 2000, à 2 %, en 2004.

Le bilan économique est plus complexe. Il y a deux manières de l'évaluer. Si l'on considère qu'H & E réalise un chiffre d'affaires de 4 millions d'euros, mais qu'il coûte à Arcelor 7,62 millions d'euros en salaires, charges, frais de gestion et investissements, il apparaît que les salariés d'H & E coûtent environ deux fois plus qu'ils ne rapportent. Mais on peut compter différemment, comme le fait Hans Gervais. Pour lui, les salariés d'H & E, qu'Arcelor ne veut pas licencier, coûteraient, quoi qu'il en soit, 6,119 millions d'euros par an : 5,143 millions de salaires et charges, et 976 000 euros de coûts de gestion. Pour lui, le chiffre d'affaires d'H & E (4 millions d'euros) doit donc être mis en regard de l'investissement d'Arcelor pour lancer la filiale : 1,5 million d'euros en matériel pour espaces verts, logiciels, voitures... Dans cette logique, un salarié rapporte 2,6 fois plus qu'il ne coûte.

Une société de services née de la vente d'Unimétal

Filiale d'Arcelor à 100 %, Hommes & Emploi est née après le rachat, en 1999, d'Unimétal par une entreprise indienne. Sur les 1 200 salariés d'Unimétal, le repreneur n'a souhaité en garder que 1 000.

« La question était : comment reconvertir des hommes et des femmes qui ne pouvaient plus travailler dans l'industrie, tout en les maintenant dans l'entreprise et en conservant leurs avantages acquis, en attendant qu'ils partent à la retraite ? », explique Gervais Hans. La solution est venue de Jacques Périès, Pdg de la Sodie, société de réindustrialisation d'Arcelor, qui propose à Francis Mer, alors Pdg d'Usinor, de créer une société de services. A charge pour elle de trouver son activité.

Le groupe sidérurgique contribue au fonctionnement d'H & E en subventionnant la différence entre les salaires de la sidérurgie et ceux des concurrents d'H & E, moins élevés, afin de lui permettre d'être compétitive.

H & E

> Activités : entretien d'espaces verts, second oeuvre du bâtiment, numérisation de documents.

> Effectifs : 230 salariés en 2004.

> Chiffre d'affaires : 4 millions d'euros en 2004.

Auteur

  • Emmanuel Franck