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Enquête

Sopran, une filiale au service du développement local

Enquête | publié le : 31.05.2005 | Céline Lacourcelle

Entité du groupe pharmaceutique Sanofi Aventis, Sopran intervient à la demande de ses directeurs de site pour améliorer l'attractivité d'un territoire, y créer des emplois et accompagner la croissance des entreprises.

Il y a trente ans, on parlait déjà de délocalisations et de crise du textile. « A l'époque, Rhône-Poulenc employait 25 000 salariés dans cette branche. Dix ans plus tard, il en restait 5 000 », se souvient Jean-Paul Deguette, directeur général de Sopran, société pour la promotion d'activités nouvelles, créée en 1976, et désormais filiale à 100 % de Sanofi Aventis. Au départ, la vocation de Sopran se limitait à la reconversion industrielle de sites quittés par le groupe. Depuis, l'approche s'est sophistiquée avec, en 1990, le déploiement d'une double approche, toujours d'actualité : l'accompagnement des entreprises en croissance et la prospection et l'accueil d'entreprises venues d'autres régions, voire d'autres pays. S'y ajoute une activité création d'entreprise avec, notamment, une politique d'essaimage. Cette année, 90 dossiers ont été accompagnés, dont une cinquantaine ont donné lieu à une création d'entreprise. Le seul critère de mesure est précisé par Jean-Paul Deguette : « Le nombre de créations d'emploi que l'on considère possible à trois ans. »

444 emplois aidés

Ce coup de pouce, consenti sur la base de la crédibilité du business plan, prend la forme d'un prêt, qui constitue, bien souvent, la trésorerie de départ pour les chefs d'entreprise, les crédibilisant auprès des banquiers. « Pour l'heure, le taux de retour de ces prêts est de 80 % », se félicite Jean-Noël Douchement, directeur essaimage et développement régional de Sanofi Aventis. D'ailleurs, le nombre d'emplois aidés figure en bonne place dans le rapport RSE du groupe. Il a été de 444 en 2004 et s'élèvera aux alentours de 560 en 2005.

Mais Sopran, PME au service de Sanofi Aventis, n'est pas un partenaire obligé. « Un directeur de site peut choisir un prestataire pour le développement économique de son territoire, explique son directeur général. Nous allons lui soumettre nos compétences, réaliser un prédiagnostic du territoire et proposer différents axes d'actions. A lui de choisir, de signer ou pas une convention avec nous. » Convention dans laquelle est décrit le chiffrage en durée, en définition du territoire (un département, un groupe de communes...), en nombre d'emplois aidés et en honoraires.

« Lorsque Sopran est mandaté, il y a tout à apprendre du territoire. Deux à trois mois en moyenne se révèlent nécessaires pour connaître l'ensemble des acteurs, l'historique du territoire, ses forces et ses faiblesses, sa place dans la région, les projets économiques et politiques en cours, en sommeil ou échoués..., pour une proposition cohérente d'actions qui dépasse la seule création d'emplois », énumère Jean-Paul Deguette.

Parc biotechnologique

C'est, par exemple, le cas à Romainville (93), où les 40 000 m2 de laboratoires rendus disponibles après le départ d'Aventis Pharma ont été réaménagés au sein d'un parc biotechnologique baptisé Biocitech. « Nous avons tout d'abord valorisé les différentes natures de laboratoire. Puis, nous avons prospecté et convaincu une quinzaine d'entreprises en expansion de venir s'implanter en leur proposant un bail et des mètres carrés pour leur extension future. D'autres devraient compléter ces premières arrivées », avance, confiant, Jean-Paul Deguette. Egalement à disposition : une société d'accueil et de gestion du site, une crèche, une bibliothèque, un restaurant d'entreprise...

Partenariat

L'opération s'est déployée sur six communes voisines. Ainsi, Biocitech s'est rapproché du Genopôle d'Evry en s'engageant dans un accord de partenariat. Au total, ce centre comprend désormais 1 036 emplois.

Même démarche à Strasbourg. Lors de la fusion de Sanofi et d'Aventis, il a été décidé que le siège du nouvel ensemble serait installé à Paris. Quid du siège d'Aventis de Strasbourg ? « Vis-à-vis de l'agglomération, le directeur du site a pris l'engagement de reconstituer 150 emplois sur place », commente Jean-Noël Douchement. Ce sera chose faite dès l'été prochain.

Michelin «soigne» ses bassins d'emploi

Michelin a compris depuis longtemps que si le renforcement du tissu des PME-PMI est vital pour l'activité économique d'une région, il l'est aussi pour un grand donneur d'ordres qui a besoin de «soigner» son environnement. Il s'agit, pour lui, de « trouver, à proximité des usines, des fournisseurs, des sous-traitants et des sociétés de services performants et réactifs », de « disposer de bassins d'emploi attractifs et diversifiés, offrant de meilleures possibilités de travail aux familles des membres de son personnel ».

Cheville ouvrière des actions de Michelin dans ce domaine, la Société d'industrialisation et de développement économique (Side), filiale à 100 %, a été créée en 1990. Elle est active, aujourd'hui, sur 38 bassins d'emploi en Europe, dont une quinzaine en France. Ses modes d'action : des prêts à taux bonifié pour le développement de PME avec création d'emplois ; de l'aide technique avec mise à disposition rapide de ressources des usines ; enfin, la redynamisation économique locale en complément des plans sociaux liés aux restructurations.

« 17 personnes travaillent au sein de l'activité Michelin développement Europe, indique André Malet, directeur des sites de Clermont et de la Side. Dès le début, nous avons mis en place des indicateurs de cette activité, et elle est cohérente avec notre charte performance et responsabilité Michelin (PRM). » Le groupe détaille d'ailleurs sa relation avec les communautés, qui est un des neuf piliers de cette charte de RSE, dans un chapitre entier de son document de référence 2005. La Side a accompagné 10 760 créations d'emploi par ses prêts et créé 1 264 emplois en réindustrialisation depuis sa naissance. L'objectif affiché pour 2005 est d'accompagner 1 100 emplois.

Diagnostic RSE : des outils pour mieux appréhender son territoire

Dans le cadre du programme «Danone Way», initié début 2000, le groupe a demandé aux différentes business units de s'évaluer et de s'inscrire dans une démarche de progrès vis-à-vis des bonnes pratiques en matière de RSE. « Mais un directeur d'usine, s'il maîtrise le fonctionnement de son unité, les questions de sécurité ou de qualité, n'a pas forcément été formé pour construire et entretenir des relations avec la communauté locale », explique François Moreau, responsable du développement local de Danone. D'où la volonté, il y a quatre ans, de relancer une formation de deux jours, intitulée «Être acteur dans son environnement local», destinée aux directeurs de site mais aussi aux DRH. Le programme décline le témoignage d'un député-maire, celui d'un sociologue, et la présentation des différentes strates de l'administration. « Ensuite, nous présentons un cas concret aux stagiaires. Nous leur demandons d'identifier l'ensemble des acteurs du territoire et de construire des actions intégrant les enjeux, à la fois du territoire et de leur usine », décrit François Moreau. A l'issue du cursus, ils repartent avec un logiciel développé en interne baptisé «Boussole», qui permet de référencer les acteurs locaux (institutions, organismes de formation, associations pour l'environnement, presse locale...) et leurs domaines de compétences. Depuis quatre ans, l'ensemble du public visé a suivi ces séances.

Chez Areva, la motivation est la même, mais l'outil différent. Il s'agit là d'une matrice permettant aux établissements du groupe de cartographier l'ensemble de leurs parties prenantes environnementales, économiques et sociales, et sociétales. En 2004, le site Cogema de La Hague a été identifié comme pilote pour son déploiement. « La vocation de cet outil est d'aider les établissements à identifier et à inventorier les parties prenantes pour les insérer dans une nouvelle dynamique de dialogue », explique Laurence Pernot, directrice de la communication de la Cogema-La Hague. Classée par familles (administrations, associations, monde de l'éducation, élus, santé...), chacune des parties prenantes doit trouver sa place sur la matrice. « A la lecture de l'ensemble, on voit très facilement là où on doit porter ses efforts. Ce qui permet de se fixer des objectifs pour progresser selon les familles », explique Laurence Pernot qui a, depuis, bâti un plan d'action avec le monde agricole, celui de la pêche et celui de la santé.

A l'international, le diagnostic de Care

L'ONG internationale Care accompagne certaines multinationales dans leur approche des territoires à l'international. L'ONG a développé un modèle d'analyse de la sécurité des conditions de vie des ménages. « A partir du recueil d'informations auprès des populations, nous déterminons un indice de vulnérabilité, en fonction des faiblesses identifiées en matière d'accès à l'éducation, aux soins, au crédit, à l'emploi... », indique François Jung-Rozenfarb, responsable du développement de Care.

L'outil intéresse les grandes entreprises, car il aide à mieux comprendre l'impact de leur activité sur les communautés : accès à l'emploi, transferts, stimulation des entreprises locales (politiques d'achat)... L'ONG a déjà entamé un partenariat avec Lafarge, en Afrique, sur le problème du sida. Elle vient aussi de lancer une étude avec Thomas Cook, sur un village du voyagiste au Sénégal et ses rapports avec les communautés environnantes.

Auteur

  • Céline Lacourcelle