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« Le système est illisible »

Dossier | publié le : 05.04.2005 | L. G.

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« Le système est illisible »

Crédit photo L. G.

Pour Jean Wemaere, président de la Fédération de la formation professionnelle (FFP), la multiplicité des accords de branche rend illisibles le système et le tuilage entre les différents contrats. Branches, Opca et prestataires de formation doivent créer un nouveau partenariat.

E & C : Les premiers chiffres sur les contrats de professionnalisation ne sont pas très optimistes. Certains n'hésitent pas à dire que « l'alternance, ce sera fini en septembre prochain ». Qu'en pensez-vous ?

J. W. : Nous nous étions félicités de la réforme dans son ensemble, mais nous avions émis des réserves sur les contrats de professionnalisation. Il semble, pour l'instant, que nous ayons raison. En effet, à ce jour, la fusion des trois contrats (qualification, adaptation, orientation) en un seul, dit de professionnalisation, reste une bonne mesure de clarification. Mais son effet positif est occulté par le manque de lisibilité sur les accords de branche. Peu d'accords ont défini précisément les priorités pour que les contrats dits «dérogatoires» - ceux qui intéressent les jeunes - puissent être signés. Les jeunes risquent de se retrouver au chômage, et les entreprises sans les jeunes dont elles ont besoin.

Que peut dire, aujourd'hui, une mission locale à un jeune qui veut entrer en contrat de professionnalisation dans une entreprise qui dépend d'une branche dans laquelle les priorités de recrutement de jeunes et les conditions de prise en charge ne sont pas clairement identifiées ?

D'autre part, dans les branches qui ont voulu «limiter» les diplômes, on risque de voir s'effondrer le nombre de contrats en alternance. Aujourd'hui, des parents refusent d'orienter leurs enfants vers l'alternance si l'issue est d'obtenir seulement un certificat de qualification professionnelle de branche ! Alors que, depuis vingt ans, tous les discours politiques poussent à l'obtention du bac, on voudrait maintenant leur faire passer des CQP ? Comment voulez-vous qu'ils soient d'accord pour signer ces contrats ?

E & C : Selon vous, les branches et leurs Opca n'ont pas donné à leurs adhérents suffisamment, ni assez rapidement, d'informations sur leurs priorités en matière de gestion de ce type de contrat ?

J.W. : Il est dommage que les accords de branche dérogatoires ne puissent pas s'appliquer, faute d'information sur les priorités, alors que les disponibilités financières existent dans les Opca. De plus, les branches qui ont signé ces accords renvoient souvent à des négociations ultérieures pour définir les publics et les qualifications éligibles, ce qui retarde encore la diffusion de l'information.

E & C : La définition du prix moyen de référence d'un contrat de professionnalisation est-elle une bonne mesure ?

J.W. : Non, un coût moyen qui réduit le temps de formation est une mauvaise mesure, notamment pour les jeunes, qui risquent de se voir proposer des durées de formation plus courtes, le plus souvent non diplômantes.

Ce coût était de 7 200 euros auparavant, il n'a quasiment pas changé depuis quinze ans, et vient de baisser à 6 800 euros. Des prix trop bas ne servent pas la qualité. Or, les jeunes veulent et ont besoin de formations de qualité. C'est d'autant plus vrai pour les branches en pénurie de main-d'oeuvre et dont les métiers sont en tension. Plus que toute autre, les formations à ces métiers doivent être de qualité pour attirer les jeunes.

E & C : L'arrêt des contrats d'alternance ancienne mouture a-t-il été trop abrupt ?

J.W. : Oui, on a assisté à un mauvais tuilage entre les deux dispositifs. Après avoir obtenu un premier report de la mise en application du nouveau contrat au 1er novembre 2004, nous avions demandé un nouveau report au 1er janvier 2005. Nous n'avons pas été entendus, mais nous restons persuadés qu'il aurait fallu faire vivre les deux dispositifs pendant un an ou deux, le temps que les accords soient clairs et étendus. Tous les contrats auraient pu être baptisés «contrats de professionnalisation», mais les modalités pédagogiques et financières du contrat de qualification auraient été maintenues.

E & C : Comment sortir de cette situation ?

J.W. : En tissant des accords de partenariat entre les Opca et les prestataires de formation, sur des objectifs quantitatifs et qualitatifs, par régions, bassins d'emploi... Egalement, en organisant des opérations conjointes de promotion du contrat de professionnalisation. Il faut s'y mettre dès à présent, car ce n'est pas en quelques mois que l'on change les mentalités.

La création d'un site web, sur lequel seraient centralisés toutes les informations sur l'éligibilité des contrats ainsi que les offres de contrats de professionnalisation des entreprises et les CV des candidats, serait également un excellent moyen de répondre aux besoins des jeunes, des entreprises et des prestataires de formation.

Bref, il est urgent de rendre le système lisible

Auteur

  • L. G.