La France, qui est en train de réformer son système universitaire pour se caler sur les diplômes anglo-saxons, n'en reviendra peut-être pas de sitôt. Elle croyait avoir enfin compris où se concoctait la réussite des entreprises américaines, et, foin de l'ENA ou de Polytechnique, les jeunes recrues de nos écoles de commerce ne rêvaient plus que de MBA pour conquérir le monde.

Mais le grand Henri Mintzberg a parlé : le leadership et le management, c'est la vie même, pas un corpus de techniques abstraites du faire et de l'être : « L'enseignement ne saurait verser l'expérience vécue dans le récipient de l'intelligence. » Ou encore : « Enseigner la direction d'entreprise à quelqu'un qui n'a jamais dirigé, c'est comme tenter d'enseigner la psychologie à quelqu'un qui n'aurait jamais rencontré un autre être humain. »

Nul ne peut fabriquer un leader dans une salle de cours, mais les dirigeants actuels peuvent améliorer significativement leur pratique dans une classe où leur expérience alimente la réflexion. C'est-à-dire que les programmes des business school doivent être revus de fond en comble, de telle sorte que la priorité soit mise sur les aspects pratiques, les mises en situation, avant de l'être sur la théorie.

L'auteur ne se fait pas là l'apôtre de l'ignorance académique, puisque le manager doit maîtriser de nombreux savoirs pour prétendre exercer ses talents, mais, dans la lignée pragmatique de la pensée anglo-saxonne, il entend remettre le primat sur l'efficacité, les qualités individuelles innées, le charisme. Une révolution culturelle donc, mais en ligne avec des valeurs made in USA qui n'en finiront jamais de nous faire rêver.

Henry Mintzberg, PhD (MIT), ingénieur (McGill), est professeur de management à l'université McGill de Montréal. Il compte parmi les experts des organisations les plus réputés au monde.