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Les Pratiques

Un bilan sur l'emploi en demi-teinte

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 15.02.2005 | Monique Castro

Le gros porteur d'Airbus n'a pas créé tous les emplois promis. Pour autant, il a permis de maintenir l'activité aéronautique de 2001 à 2003, années comptant parmi les pires pour le secteur. Aujourd'hui, les commandes repartent, mais les sous-traitants se heurtent à des difficultés de recrutement.

Le 18 janvier dernier, l'A380, le tout premier très gros porteur d'Airbus, capable d'emporter 800 passagers pour 15 000 km sans escale, a été officiellement présenté à un parterre de personnalités. Toutefois, en matière d'emploi, ce paquebot du ciel n'a pas tenu toutes ses promesses.

En 2000, lorsque Toulouse est choisie comme site d'assemblage de l'avion, Jean-Claude Gayssot, alors ministre des Transports, affirmait que ce programme créerait 10 000 emplois directs et induits dans l'aéronautique toulousaine. Confortant ces propos, l'avionneur annonçait la création de plus de 3 000 emplois à Toulouse.

Activité maintenue

Avec effervescence, on commençait à mettre sur pied des plans de formation... Et puis, le 11 septembre est arrivé, entraînant dans le secteur aéronautique une crise sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. « L'A380 nous a permis de maintenir l'activité. En trois ans et demi, nous avons embauché 5 000 personnes en France, dont 3 500 à Toulouse. Sans l'A380, tous les départs à la retraite n'auraient peut-être pas été remplacés. Actuellement, ce programme occupe plus de 200 000 personnes à travers l'Europe, dont 10 000 dans le grand Sud-Ouest », indique Jacques Rocca, chargé de la communication d'Airbus France.

Des sous-traitants déçus des retombées

Côté sous-traitants, les retombées de l'A380 sur le tissu local ne sont pas celles escomptées. « Ou du moins, elles ne sont pas à la taille de l'avion ! s'exclame ironiquement Philippe Vié, dirigeant d'Ateca, une société spécialisée dans l'acoustique moteur. Les plus gros sous-traitants captent presque tout et font souvent produire à l'étranger. » Pour preuve, parmi les sous-traitants de premier rang : Ratier Figeac délocalise en Pologne, et Latécoère en République tchèque et en Tunisie. Ce dernier emploie 2 200 personnes, dont 1 570 en France ; l'an passé, il a recruté 80 personnes en France et 115 à l'étranger.

Là n'est pas la seule pierre d'achoppement : « Nous déplorons que la reprise se traduise aussi par le recours aux intérimaires », objecte Xavier Pétrachi, délégué CGT d'Airbus France. Ils représentent environ 15 % des effectifs sur les sites de Nantes et de Méaulte, moins à Toulouse. Et c'est sans compter les difficultés de recrutement. Dans un premier temps, les embauches ont concerné la phase d'études et de conception. Airbus a regroupé 1 200 ingénieurs sur le site d'Aéroconstellation, à Blagnac, dont 600 spécialement embauchés pour le programme A380.

D'autres bureaux d'études de la région ont également gonflé leurs effectifs. « Aéroconseil, par exemple, est passé en quatre ans de 500 salariés à plus de 1 000 », rappelle Bernard Keller, maire de Blagnac. Toutefois, s'il reste difficile de connaître les emplois générés par l'A380 chez les sous-traitants - ils ne travaillent pas tous exclusivement pour ce programme - l'effectif salarié est passé en trois ans de 25 000 à 28 300 personnes chez les 550 sous-traitants régionaux. Et ce chiffre devrait encore grossir pour la phase de fabrication.

Difficultés de recrutement

A Toulouse, 1 700 ouvriers travaillent sur la chaîne d'assemblage de l'avion. On compte aussi 500 Allemands, 250 Anglais et 50 Espagnols. « Ils sont là pour quelques mois, pour aider les Toulousains à se familiariser avec les différentes parties de l'avion qu'ils ont construites dans leur pays. Quand ils partiront, on embauchera pour les remplacer », anticipe Jacques Rocca. Pour l'heure, Airbus ne rencontre pas de problèmes de recrutement. Il n'en va pas de même pour les sous-traitants. « Nous recherchons principalement des ajusteurs monteurs aéronautique, des monteurs cellules et des chaudronniers aéronautiques, des techniciens d'études projeteurs ou rédacteurs techniques, et des ingénieurs acheteurs industriels, de réseau, d'études et de développement », explique Jean-François Simon, directeur de l'ANPE de Blagnac, spécialisée dans l'aéronautique.

Anticipation des besoins

Aujourd'hui, il manque des centaines de personnes, mais, dans les années à venir, avec les départs à la retraite et les montées en cadence des chaînes de production, les besoins se compteront par milliers. Alors, les différents acteurs anticipent. Le 22 juin dernier, Airbus et les syndicats ont signé un accord sur l'égalité professionnelle devant aboutir au recrutement de 20 % de femmes d'ici à la fin 2006. Par ailleurs, un lycée aéronautique vient d'ouvrir ses portes à Blagnac et fin 2005, l'Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM) et le conseil régional Midi-Pyrénées inaugureront un centre de formation pour apprentis capable d'accueillir 1 000 élèves.

En attendant, on s'organise et, faute de candidats titulaires de CAP de la métallurgie, de nombreux recrutements se font sur la base de tests d'habileté. Une démarche, à en croire Jean-François Simon, qui « ne plaît pas à tout le monde. Nous n'avons pas le choix : nous colmatons les brèches comme nous pouvons ».

Auteur

  • Monique Castro