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De Longwy vers le Luxembourg, sans hésitation

Les Pratiques | Point fort | publié le : 15.02.2005 | Christian Robischon

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De Longwy vers le Luxembourg, sans hésitation

Crédit photo Christian Robischon

221des 330 salariés de l'usine STUL de Longwy, qui cessera sa production le 25 février, se sont vus proposer une mobilité au Luxembourg, dans d'autres sites d'Arcelor. Tous ont accepté et 170 ont déjà passé la frontière.

Un tel taux de mobilité géographique est exceptionnel. La principale raison de ce succès est évidente : même sans aide, passer d'un pays à l'autre signifie gagner plus. L'écart de salaire, « très variable selon les cas », d'après le sidérurgiste, « se situera à + 30 % en moyenne », précise Christian Manfredi, le secrétaire (CGT) du CE de la STUL. Un différentiel qui s'explique, notamment, par le haut niveau du salaire minimum (1 467 euros brut depuis le 1er janvier), la prospérité de l'économie, le poids du rémunérateur secteur financier (qui porte à 3 720 euros le salaire brut moyen d'un employé au Luxembourg) et l'échelle mobile des salaires, que le Grand-Duché pratique.

La proximité intervient aussi pour beaucoup dans ce choix : vue de Longwy, la mobilité vers le Grand-Duché se limite à quelques kilomètres. Elle ne pose donc aucun des problèmes pratiques qu'aurait soulevé un reclassement dans une autre filiale en France, tel qu'il avait été proposé en deuxième option, aides financières à l'appui. Le groupe n'a cependant pas souhaité constituer une «STUL-bis» : seuls 120 salariés rejoignent la nouvelle usine d'Esch-Belval à la frontière, qui remplace celle de Longwy, jugée trop coûteuse, où ils formeront la moitié des effectifs. Les autres se dissémineront sur différents sites luxembourgeois.

Travailleurs frontaliers

Les 221 ex-STUL encore actifs (les 109 autres bénéficient de mesures d'âge) vont rejoindre la cohorte des travailleurs frontaliers, statut qui procure certains avantages, comme la possibilité de se faire soigner en France tout en bénéficiant du régime luxembourgeois d'assurance-maladie, qui rembourse à 100 %. Par ailleurs, le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit que les salariés nés entre 1949 et 1951 pourront intégrer le dispositif de préretraite luxembourgeois d'Arcelor, qui démarre à 57 ans et fait partir en retraite à 60 (sous condition de quarante années de cotisation), soit cinq ans plus tôt que le régime de droit commun. Leur pension sera proportionnelle à leur temps de carrière dans chaque pays. « Tout n'est pas paradisiaque quand même au Luxembourg. On est bien payé, mais il faut être flexible, le travail prime sur tout, le patron garde une grande latitude dans l'application de la loi. Les congés sont fixés par le supérieur hiérarchique et obtenir un jour pour cas exceptionnel n'est pas gagné d'avance », tempère Christian Manfredi. Les 35 heures ne seront plus de mise : le temps de travail sera modulable et d'une durée hebdomadaire minimale de 38 heures.

Peu suspect de complaisance, le secrétaire du CE salue l'attitude des directions de la STUL, particulièrement celle qui a négocié le PSE entre 2001 et 2003. « Bien sûr, les discussions ont été serrées, mais elle a tout de suite compris le souci de tous les syndicats de bâtir un plan social correct, qui préserve l'avenir personnel de chaque salarié, actif ou préretraité ». Christian Manfredi voit aussi dans cette attitude « responsable et transparente » une reconnaissance des efforts consentis dans les années 1993 et suivantes : à ce moment-là, Arbed - devenue depuis la branche luxembourgeoise d'Arcelor - avait repris la STUL en piteux état financier, « et les salariés ont fait leur part de travail pour redresser la société et éviter alors sa fermeture ».

Arcelor

> Effectifs : 98 000 personnes dans le monde, dont 36 000 en France.

> Implantation : dans 60 pays. Une centaine de sites industriels en France.

> Chiffre d'affaires 2003 : 26 milliards d'euros.

L'essentiel

1 Arcelor mène une politique de mobilité ambitieuse afin de réduire au maximum le nombre de licenciements lorsqu'il ferme un site.

2 Cette politique obtient du succès, y compris auprès d'une population ouvrière réputée peu mobile.

3 Pour parvenir à ce résultat, Arcelor s'est doté d'outils (accord, structure ad hoc, bourse aux emplois) et de moyens financiers.

Site de Montataire : passer de l'Oise au Nord

A la suite de l'annonce du projet stratégique de réorganisation d'Arcelor, en mai 2003, le site de Montataire doit supprimer 408 emplois, soit un tiers de ses effectifs, avec le moins de licenciements possible. Le plan de sauvegarde de l'emploi, finalisé au printemps 2004, prévoit d'étaler ces suppressions de postes sur trois ans : 157 en 2004, 25 en 2005, et 226 en 2006.

A l'heure actuelle, 137 personnes touchées par la première vague de suppressions de postes ont accepté de bouger, soit géographiquement (91 pers.) soit au sein du site de Montataire (46 pers.). Seule une vingtaine, sortie de la période de volontariat, devrait se voir proposer une offre valable d'emploi dans le groupe. Un refus déclenchant une procédure de licenciement. Parmi les 91 salariés amenés à se déplacer, 42 % sont allés sur le site de Dunkerque, à 300 km de là. Signe d'une mobilité pérenne, « la grande majorité a décidé de déménager, et beaucoup, qui n'étaient pas propriétaires, le sont devenus », relève Christel Bisiau, responsable des ressources humaines du site de Montataire. La principale difficulté a été le déplacement des familles, relève-t-elle. Elle a dû gérer certaines populations soit, « qui avaient déjà subi une mobilité et en gardaient un mauvais souvenir », soit « qui ne s'étaient jamais déplacées et avaient du mal à l'envisager ».

En revanche, la mobilité géographique a été facilitée par le fait qu'elle ne s'est pas doublée, ou très peu, d'une mobilité professionnelle. « Faire changer de métier les personnes aurait rendu la mobilité plus difficile », admet Christel Bisiau.

Auteur

  • Christian Robischon