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Les Pratiques

Accident du travail : période de protection

Les Pratiques | L'AVIS DU JURISTE | publié le : 15.02.2005 | Alice Fages Juriste en droit social

Si la lettre de licenciement est expédiée avant la date de l'accident du travail et présentée au salarié après, le licenciement n'est pas nul, mais ses effets sont reportés à l'expiration de la période de suspension.

Un important revirement de jurisprudence sur la protection des victimes d'accident du travail (AT) résulte d'un arrêt de l'Assemblée plénière du 28 janvier 2005 (n° 01-45.924). Il s'agit de préciser la portée de l'article L. 122-32-2 qui interdit de prononcer un licenciement pendant la période de suspension du contrat consécutive à un AT, sous peine de nullité du licenciement.

Depuis longtemps, on considérait que le licenciement était nul s'il était prononcé entre l'expédition et la réception de la lettre de rupture. Si, comme dans l'affaire jugée, la lettre recommandée est expédiée le 4 du mois et présentée le 19 (en raison d'une grève des postes), alors que l'AT est survenu le 8, les tribunaux procédaient à l'annulation du licenciement car prononcé pendant la période de suspension. Le salarié bénéficiait, alors, soit d'une réintégration (avec réparation du préjudice subi entre le licenciement et la réintégration), soit des indemnités de rupture, de préavis et de l'indemnisation du préjudice liée à son caractère illicite. En jugeant ainsi et en se référant à la date de réception (première présentation) de la lettre de licenciement et non à la date d'expédition pour marquer la date à laquelle le licenciement a été prononcé, les tribunaux fesaient peser sur l'employeur des risques qu'il ne peut maîtriser. Il ne pouvait, en effet, à la date d'expédition de la lettre de licenciement, supposer qu'un accident interviendrait pendant la phase d'acheminement du courrier ! De plus, le Code du travail ne lui permettait pas, dans un pareil cas, de rétracter le licenciement sans l'accord du salarié, contrairement à ce qui existe pour les femmes enceintes à qui l'employeur aurait notifié la rupture en méconnaissance de l'état de grossesse.

Aussi, face à la résistance des cours d'appel, l'Assemblée plénière a rejeté la demande du salarié : dans la mesure où la lettre de licenciement avait été expédiée avant l'accident, le licenciement n'est pas nul : on privilégie le moment du prononcé du licenciement, donc l'expédition de la lettre, ce qui est conforme à l'article L. 122-32-2. Mais, pour atténuer la portée de cette nouvelle jurisprudence, l'arrêt ajoute que l'effet du licenciement est reporté à l'expiration de la période de suspension. On s'approche donc de la solution retenue pour le licenciement des femmes enceintes. Il s'ensuit que le préavis devrait s'exécuter après la suspension. C'est donc une solution d'équité qui a été retenue, mais avec quelque tempérament.

Auteur

  • Alice Fages Juriste en droit social