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Le DRH, coach du directeur général

Demain | Aller plus loin avec | publié le : 08.02.2005 | Pauline Rabilloux

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Le DRH, coach du directeur général

Crédit photo Pauline Rabilloux

La fonction RH se dégage des tâches administratives. Concrètement, ce changement tend à bouleverser la nature des relations entre le directeur général et son DRH. Certes, les rapports de subordination perdurent, mais l'ascendant du DRH tend à croître : il est souvent devenu un véritable coach pour le DG.

E & C : Vous avez tenté de comprendre les rapports des DRH et des DG dans les grandes entreprises françaises. Mais ne s'agit-il pas, à chaque fois, d'un rapport individuel qui dépend des personnalités et qui échappe à toute régularité ?

Catherine Voynnet-Fourboul : Bien sûr, mais cela n'empêche pas de voir se dessiner des lignes de force. Il est clair que malgré les différences importantes entre les personnes, les entreprises et les secteurs, c'est l'ensemble de la fonction RH qui tend à se dégager des tâches administratives de gestion du personnel et à s'orienter vers des tâches plus stratégiques du fait, notamment, de la nécessité de toujours améliorer la performance de l'entreprise dans un environnement changeant et hyper- concurrentiel. La nécessité d'équipes de direction générale solides, soudées et surtout efficaces est apparue. Lorsque le binôme DRH-DG constitue une relation coopérative, marquée par des échanges d'informations, de ressources et la recherche commune de solutions, c'est parce que tant le DRH que le DG se sont rendu compte de l'importance de cette coopération pour le succès de l'organisation.

Il n'est pas rare que des DRH refusent des postes à cause d'une incompatibilité avec le DG. Il est, en effet, évident que le DRH n'aborde pas sa fonction isolément, mais dans sa relation avec lui. Cependant, la relation de subordination du DRH au DG n'empêche pas que le DRH détienne des atouts, notamment en termes de pouvoir d'information, de connaissance des hommes et des normes. Le DG, de son côté, s'attend que le DRH soit un partenaire et pas seulement un subordonné.

Pour n'être pas le cas général, la participation de la DRH à la réflexion stratégique n'en est pas moins de plus en plus fréquente. La question du rattachement hiérarchique ne suffit donc pas à modéliser le binôme.

E & C : Quels sont les différents modèles possibles de ce binôme ?

C. V.-F. : La répartition des rôles varie, en effet, selon les binômes. Le DG semble disposer partout d'une chasse gardée : la gestion des cadres dirigeants et l'évolution des effectifs à moyen terme ; tandis que le DRH, pour sa part, tend à posséder un domaine réservé concernant les propositions de politique sociale et les modalités de sa mise en oeuvre.

Cependant, on rencontre deux cas de figure. Lorsque le DG a assumé des responsabilités opérationnelles dans son parcours antérieur et n'a pas du tout un profil de gestionnaire du social, il tend à avoir des attentes fortes vis-à-vis de l'expertise du DRH en la matière. Ce dernier sera alors très autonome, mais occupera un poste à haut risque. En revanche, lorsque le DG a déjà occupé des fonctions sociales, il semble enclin à conserver la maîtrise de ce domaine. Le DRH est alors nettement moins autonome. Mais, partout, le DG sollicite de plus en plus le DRH, parce que les investisseurs considèrent davantage le capital humain dans l'évaluation des performances de l'entreprise.

En France, DG et DRH apparaissent comme de plus en plus complémentaires. Si l'on attend donc du DRH qu'il soit business minded et qu'il ait une excellente connaissance du terrain, son rôle, aujourd'hui, est double : à la fois propositionnel et iconoclaste. Il lui appartient tout à la fois d'être un expert sur les questions RH et un incitateur, voire un modérateur du DG, lorsque celui-ci pourrait se laisser aveugler par des comportements trop impulsifs ou manifestement inspirés par des réactions trop personnelles.

Le terme qui semble le mieux convenir pour définir le nouveau rôle du DRH est celui de coach. A mesure que les aspects d'administration du personnel ont été externalisés ou délégués aux opérationnels, le rôle d'appui au DG a pris davantage d'importance, notamment en termes de comportement organisationnel.

Dans la logique de cette dynamique à la fois psychologique et sociale, la question qui se pose aujourd'hui est de savoir dans quelle mesure le binôme DRH-DG peut s'ouvrir sur ce polynôme que serait un véritable travail d'équipe de tous les cadres dirigeants : DG, DRH, directeur financier...

Dans cette même logique de coaching, le rôle du DRH pourrait alors assez naturellement consister à mettre en relation les compétences des dirigeants pour optimiser la performance de l'organisation. Une manière de promouvoir le travail à plusieurs, là où tend encore à prévaloir le travail en solo.

Encyclopédie de la dirigeance d'entreprise, Frank Bournois, Jérôme Duval-Hamel, Economica, 2005.

Gestion des ressources humaines : regards croisés en l'honneur de Bernard Galambaud, coordonné par Frank Bournois et Pierre Leclair, Economica, 2004.

The Executive Effect : Concepts and Methods for Studying Top Managers, Donald C. Hambrick, JAI Press, 1988.

parcours

Catherine Voynnet-Fourboul est maître de conférences à Paris-2 et directrice des études au Ciffop (Centre interdisciplinaire de formation à la fonction personnel). Elle est spécialisée en relations sociales, notamment sur les CE européens.

Elle est à l'origine d'une étude conduite en 2002-2003 auprès de 61 DRH de grandes entreprises, dont le but était de mieux comprendre le fonctionnement du binôme DRH-DG.

Elle conduit actuellement une recherche sur la médiation qui a pour objectif d'évaluer l'appui au dialogue social au sein des PME.

Auteur

  • Pauline Rabilloux