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Les Pratiques

Des salariés inquiets pour leur avenir

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 01.02.2005 | Marie-Pierre Vega

Les salariés d'ElcoBrandt s'interrogent : trois ans après la reprise de Brandt par Elco, plusieurs productions sont transférées vers l'Europe de l'Est, et l'usine de Lesquin (59) ferme. La direction cherche à les rassurer.

En 2002, Brandt cherche un repreneur. L'israélien Elco est le candidat préféré des salariés du fabricant de gros électroménager. Il est le mieux-disant sur le plan de l'emploi et le seul à conserver toutes les usines françaises. Le site de Lesquin (59) est cependant le moins enthousiaste. Seuls 150 salariés sur 620 sont repris, 170 sont licenciés et les 300 restants, en sursis pendant neuf mois grâce à un contrat de sous-traitance. Fallait-il y voir un présage ? Car, depuis le 21 janvier, l'usine de Lesquin est fermée. « C'est indispensable pour sauvegarder la compétitivité de l'activité froid du groupe face aux pays low cost qui contrôlent ce marché », assure Dominique Laurent, DRH d'ElcoBrandt.

Transferts

La direction a aussi présenté aux partenaires sociaux « un projet de transfert, vers des pays de l'Est, de productions très marginales en termes de volumes, sur lesquelles le groupe perd de l'argent », explique Dominique Laurent. Sont concernées les gazinières produites par l'usine d'Orléans, les plaques de cuisson à Vendôme et les machines à laver à Lyon. Aizenay, enfin, qui fabrique des micro-ondes pour le compte de concurrents, perd un contrat. Les syndicats crient à la délocalisation. « Nous parlons de 150 000 pièces sur une production totale annuelle de 3,5 millions. En aucun cas il ne s'agit de délocalisation. Ces transferts n'auront aucun impact sur l'emploi permanent. Nous allons seulement réduire la voilure sur l'emploi intérimaire. Notre objectif est de nous installer dans une dynamique commerciale qui permette de sauvegarder les résultats du groupe et, à terme, de recréer de l'emploi », affirme Dominique Laurent.

Aucun produit nouveau

« De l'emploi intérimaire, il n'y en a déjà plus beaucoup sur les sites. Quant aux emplois permanents, nous constatons à chaque CCE que nous ne cessons d'en perdre. Les départs ne sont pas remplacés », conteste Nicolas Rouget, délégué syndical central CGT. Christian Sothier, délégué syndical central FO, confirme : « Ces mouvements risquent d'avoir un impact négatif sur nos résultats financiers, et par conséquent sur l'emploi permanent. » Il ajoute : « La direction nous dit qu'elle continue à investir pour le groupe. Or nous ne développons aucun nouveau produit et cela fait longtemps que nous n'avons déposé aucun brevet. » « 10 millions d'euros devaient être investis à Lesquin. Dans la réalité, il n'y en a eu que 3. Dans toutes les usines du groupe, des projets dorment dans les cartons. Pourquoi ? » s'interroge Nicolas Rouget. Dans ce contexte social tendu, émaillé par des débrayages, les syndicats critiquent aussi la politique RH générale du groupe. Depuis la reprise, la direction cherche à la redynamiser avec «Energie RH», un projet d'entreprise à trois ans. « Nous enregistrons de bons résultats sur plusieurs des dix priorités inscrites dans Energie RH, se félicite pourtant Dominique Laurent. Les procédures de recrutement, d'évaluation, de promotion et de mobilité, et la politique de rémunération globale sont désormais les mêmes sur tous les sites. Cela participe de l'émergence d'une culture ElcoBrandt. Nous avons aussi créé une véritable culture managériale. Les salariés s'expriment régulièrement sur ce sujet dans des enquêtes de satisfaction internes. Il reste encore à faire, mais notre politique RH est désormais lisible. »

Un accord de méthode pour Lesquin

La direction a inscrit la procédure légale de fermeture de l'usine de Lesquin dans un accord de méthode signé par tous les syndicats le 23 septembre dernier, sous l'égide de la Communauté urbaine de Lille, la région Nord-Pas-de-Calais et la direction départementale du travail du Nord. Elle s'y engage à améliorer les dispositions légales.

Le plan social, qui comporte des mesures d'âge, pousse la durée du congé de reclassement à neuf mois pour les plus de 50 ans et à six mois pour les autres. Il prévoit des indemnités additionnelles de 6 200 à 19 200 euros selon l'ancienneté, des aides à la création d'entreprise et à la formation.

Une antenne emploi est confiée au cabinet Right Garon Bonvalot, qui proposera à chacun une offre ferme d'emploi dans un rayon de 45 kilomètres, avec un salaire équivalant au minimum à 95 % du brut antérieur. L'antenne sera ouverte pendant dix-huit mois pour les publics les plus fragiles et un fonds d'aide de 18 000 euros sera mis en place pour les personnes encore en grande difficulté passé ce délai.

Une convention de réindustrialisation est en cours de négociation avec la préfecture du Nord.

ElcoBrandt ne communique pas le coût global du plan social. « Les organisations syndicales l'ont accepté, commente sobrement Nicolas Rouget, délégué syndical central CGT. Mais quelles sont les possibilités de reclassement de salariés âgés en moyenne de 50 ans dans une région déjà sinistrée ? Seul un tiers des ouvriers licenciés après la reprise du site ont retrouvé du travail. »

Auteur

  • Marie-Pierre Vega