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Enquête

Le syndicat en actionnaire vigilant

Enquête | publié le : 18.01.2005 |

La présence des syndicats se fait de plus en plus discrète dans l'entreprise. Les conflits sociaux diminuent. Mais les syndicalistes ne baissent pas les bras. Ils se réinventent en défenseurs des intérêts des fonds de retraite des salariés-actionnaires.

Le syndicalisme américain est sur la mauvaise pente. L'AFL CIO, qui regroupe 60 syndicats et 13 millions de membres, a vu sa présence dans l'entreprise se réduire petit à petit. Dans les années 1950, 35 % des salariés s'avouaient membres d'un syndicat. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 13 %. Et ils ont de plus en plus de mal à se faire entendre.

Quatorze conflits

L'an dernier, le bureau of Labor Statistics n'a recensé que 14 conflits du travail majeurs. La plupart d'entre eux étaient animés par les dirigeants de United Food and Commercial Workers, le syndicat de l'alimentation, qui tentaient de maintenir les avantages acquis des salariés des hypermarchés Albertsons, Ralphs Grocery... aux fiches de paie et cotisations sociales beaucoup plus généreuses que celles du grand concurrent, non syndiqué, Wal-Mart.

Pour le reste, le front social américain est resté fort paisible. Mais les permanents de l'AFL CIO ne s'avouent pas vaincus. Et remobilisent leurs énergies sur un autre front : Wall Street. Syndicats et fonds de retraite amis (représentants les fonctionnaires de Californie, de New York, du Connecticut, de l'Illinois...) affichent tous ensemble 6 trillions de dollars, placés en Bourse, constate l'AFL CIO. L'énormité de la somme, propriété collective des salariés, justifie la mise en place d'un certain leadership. Et encore plus lorsque l'on connaît les conséquences des scandales Enron et WorldCom « qui ont entraîné la perte de 36 milliards de dollars pour les fonds des salariés », déplore l'AFL CIO.

Jolis succès

Le syndicat a donc créé un Bureau de l'investissement chargé de veiller sur les intérêts des salariés propriétaires d'actions et leurs retours sur investissement. Les représentants du bureau se montrent particulièrement actifs, lors des assemblées générales annuelles des entreprises. L'an dernier, ils ont déposé près de 400 propositions au nom des actionnaires. Et ils ont remporté « quelques jolis succès », estime Brandon Rees, l'un des chercheurs du bureau.

Les représentants de l'AFL CIO s'intéressent aussi aux stock-options. Ils veulent que les actions distribuées aux salariés de l'entreprise soient comptabilisées dans le poste des dépenses, alors que les normes comptables américaines n'y obligent pas encore. Sinon, craignent-ils, la tendance est de gonfler artificiellement les bénéfices et d'accroître à court terme la valeur des stock-options pour les vendre vite.

Forte pression

Pour la première fois, l'AFL CIO et ses alliés ont obtenu un vote majoritaire sur le sujet chez Intel. Certes, le vote n'oblige pas la direction à changer son fusil d'épaule, mais la pression monte. Les Teamsters, «camionneurs» affiliés de l'AFL CIO, se révèlent, eux aussi, très militants dans les assemblées générales, pour défendre plus de 70 milliards de dollars en fonds de pension. Et les positions soutenues par ces puissants actionnaires conduisent parfois à une évolution des pratiques RH. Carin Zelenko, directrice du département affaires chez les Teamsters, n'aime guère les parachutes en or, qui octroient des millions de dollars aux cadres supérieurs sur le départ. Elle a obtenu gain de cause chez Bank of America. La banque limite dorénavant ses enveloppes de départ à trois fois le salaire annuel. C. T.