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Enquête

La veille sociale se décentralise

Enquête | publié le : 16.11.2004 | S. F.

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La veille sociale se décentralise

Crédit photo S. F.

En onze ans d'existence, l'observatoire social de La Poste a connu de multiples évolutions. Dernière en date : la réorganisation du suivi quantitatif de la conflictualité, pour coller à la nouvelle structure par métiers de l'entreprise.

C'est dès 1988, à la suite d'une grande grève de postiers, que La Poste a entamé la démarche de création d'un observatoire social : « Lors du debriefing du mouvement, nous nous sommes aperçus qu'à différents niveaux de l'entreprise, des personnes chargées de surveiller le climat social disposaient d'éléments permettant de prévoir le conflit. Mais aucune d'entre elles n'avait actionné le signal d'alarme », relate André Cassou, responsable de l'observatoire social depuis 1998.

C'est pour cette raison que la direction a souhaité rassembler, au sein d'un même département (rattaché à la direction du développement social), les outils et procédures de veille sociale, jusqu'alors éparpillés dans l'entreprise. Un travail de longue haleine : l'observatoire social a été finalement validé en comité exécutif en 1993. Objectifs assignés ; la prévention des conflits ; l'accompagnement des changements ; et, plus largement, l'information du management sur les enjeux sociaux et les attentes des salariés.

Documents statistiques

Le département se voit confier le suivi de documents statistiques, tels que le bilan social, les tableaux de bord RH ou les résultats du Socioscope (enquête de satisfaction), et centralise les divers audits sociaux et documents de synthèse émis par les médecins du travail ou les assistantes sociales.

« Nous avons également des conférences téléphoniques sur le climat social tous les quinze jours, avec un panel d'une vingtaine de chefs d'établissement de centres de tri, de bureaux de poste ou de centres financiers, souligne André Cassou. Nous les questionnons sur le climat global de leur établissement, les interrogations des agents, les prises de parole spontanées, les revendications et les méthodes d'action des OS, les perspectives de conflits... » Grâce à ce matériau, l'observatoire produit un «point sur le climat social» hebdomadaire, à l'intention du comité exécutif, qui résume les conflits locaux en cours ou terminés (5 à 10 par jour, en moyenne) et l'actualité sociale nationale, mais aussi des notes mensuelles de conjoncture sociale (interne et externe).

Baromètre de trente questions

En onze ans, ses modes d'action ont toutefois été affinés, pour une plus grande efficacité. Questionnaire de 90 items (sur les conditions de travail, les relations avec la hiérarchie, les rémunérations...), administré tous les deux ans à 15 000 postiers tirés au sort, le Socioscope a été jugé, en 2001, trop lourd et pas assez réactif. Il a donc été remplaçé par un baromètre de 30 questions, réalisé par téléphone, tous les six mois, par un organisme extérieur. « Cela présente l'avantage de pouvoir nous comparer avec un panel de grandes entreprises publiques », relève André Cassou. En revanche, les résultats de l'enquête (désormais plus «versatiles») ne font plus l'objet de la large restitution dont ils bénéficiaient auparavant, et servent aujourd'hui d'outil de pilotage à l'attention de la direction.

Davantage de veille externe

Autre évolution : l'observatoire réalise davantage de veille externe, notamment par le biais de l'institut d'étude Entreprise & Personnel. « Au sein d'un club d'une quinzaine de responsables d'observatoires sociaux d'entreprises de réseaux, nous échangeons sur nos débats d'actualité - le service minimum, par exemple -, l'évolution de nos organisations syndicales, nos dispositifs relatifs au dialogue social », relate le responsable de l'observatoire social.

Actuellement, c'est le suivi de la conflictualité qui se trouve en pleine réorganisation, afin de suivre la nouvelle structure de l'entreprise, autour de ses trois grands métiers (le colis, le courrier et le réseau grand public). « Chaque direction métier dispose, désormais, de son propre dispositif de suivi quantitatif de la conflictualité, explique André Cassou, tandis que nous restons en charge de la synthèse, à destination de la direction générale, mais aussi du suivi qualitatif du climat social. » Pour cette dernière mission, l'observatoire (trois personnes au niveau central) s'appuie sur un réseau de correspondants - responsables RH ou responsables de production -, présents dans les grandes directions de chaque métier (directions départementales pour le réseau grand public, directions opérationnelles territoriales pour le courrier, etc.). « Eux-mêmes relaient le ressenti des chefs d'établissement ou des responsables RH locaux qui se trouvent sous leur responsabilité », précise André Cassou.

Pour celui-ci, les résultats de l'observatoire sont probants en matière de «médiation», dans les conflits naissants, ainsi qu'en termes d'alerte de la direction sur les situations susceptibles de dégénérer. « En revanche, regrette-t-il, l'idée de réaliser un diagnostic préalable du climat social avant de mettre en place un nouveau projet est encore trop peu répandue. »

Sentir les tendances

Secrétaire nationale CFDT La Poste et télécoms, Nadine Capdeboscq se montre moins enthousiaste : « Le dispositif n'est pas d'une utilité fracassante ! Je ne dis pas pour autant que la veille sociale est superflue : dans une grande entreprise comme la nôtre, il faut pouvoir sentir les tendances. Mais il faudrait pouvoir en tirer les conséquences rapidement, et cela semble incompatible avec la taille de l'entreprise : le temps que les problèmes remontent à la direction générale, les corrections n'interviennent que plusieurs mois plus tard. Pour réellement prévenir les conflits, il faudrait laisser aux managers locaux davantage de marge de manoeuvre. »

La Poste

> Effectifs : 200 760 fonctionnaires et 88 060 salariés de droit privé (ETP).

> Métiers : réseau grand public, courrier et colis.

> Etablissements : 17 000 points de contact, 3 000 centres de traitement et centres de distribution.

> Chiffre d'affaires : 18,04 milliards d'euros en 2003.

Auteur

  • S. F.