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Schneider Electric a fait le bilan avant de négocier

Les Pratiques | Point fort | publié le : 09.11.2004 | Laurent Poillot

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Schneider Electric a fait le bilan avant de négocier

Crédit photo Laurent Poillot

Avant d'aboutir à un accord d'égalité professionnelle hommes-femmes, début décembre, direction et syndicats ont réalisé un diagnostic partagé de la situation professionnelle des femmes chez Schneider Electric. Six mesures sont actuellement en négociation.

Chez Schneider Electric Industries SAS, la femme va devenir un peu plus l'égal de l'homme. Direction et syndicats négocient, actuellement, un accord d'égalité professionnelle qu'ils espèrent signer au début du mois de décembre. Une échéance qu'ils veulent tenir, malgré une actualité sociale chargée, avec la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi (un millier de postes supprimés en 2004) et l'externalisation de l'activité informatique. Leur projet d'accord, très complet, cible six thèmes d'amélioration des disparités hommes-femmes : depuis le recrutement jusqu'au développement de carrière, en passant par la rémunération, la formation et l'articulation des temps de vies familiale et professionnelle.

Evaluation de la situation

Ces pistes de négociation sont le fruit d'un diagnostic interne, orchestré depuis plus d'un an par deux services de la DRH France : la direction des relations sociales et celle du développement des ressources humaines. Avec l'aide d'une juriste de Schneider Electric, elles ont réuni toutes les données sexuées puisées dans le SIRH de l'entreprise, avant de les analyser au sein d'un groupe de travail dédié, composé de représentants de la DRH et de six syndicalistes - cinq femmes et un homme. « Avant d'engager toute négociation, nous voulions partager avec les partenaires sociaux un diagnostic commun de la situation », souligne Marie-Christine Sentis, directrice du développement des ressources humaines, qui se félicite que « tous aient signé le protocole de conclusions ».

Absence de bagage technique

Le diagnostic compare, tour à tour, l'accès aux responsabilités, le niveau de rémunération et l'accès à la formation continue. Les catégories de personnel sont prises en compte selon différents niveaux de responsabilités, exprimés par «groupes de postes». L'étude a porté sur les 15 premiers niveaux de classification (sur 24). Elle met en perspective la situation des femmes (34 % de l'effectif) dans une « entreprise d'ingénieurs, à forte culture technique ». La moitié de la population féminine appartient à la catégorie des ouvriers. Ces femmes ont été choisies pour leur dextérité et leur minutie, mais leur qualification à l'embauche, dans les années 1970-1980, correspondait rarement aux spécialités de cette industrie (seuls 7 % des cas). Pour celles entrées avec un CAP de coiffure ou de couture, la progression a été freinée par une « absence de bagage technique correspondant aux métiers coeurs de l'entreprise », note le rapport. Même frein rédhibitoire chez les Atam (39 % d'entre elles), où elles se concentrent dans l'assistanat administratif, « une filière avec des passerelles difficiles vers d'autres métiers », note Marie-Christine Sentis.

La part des femmes chez les ingénieurs et cadres (11 %) est, quant à elle, à l'image du secteur industriel. Elles sont cependant bien représentées dans les fonctions transverses, telles que le contrôle de gestion et les RH, au contraire des profils industriels et techniques. Pour la direction, cette donnée traduit les choix d'orientation des jeunes femmes à la sortie de leur formation initiale.

Ecart de rémunération

S'agissant des salaires, « à responsabilités égales, l'écart sur les rémunérations se creuse au bout d'une dizaine d'années. La fourchette est alors de + 1 % à - 7 % du salaire de base (hors ancienneté), en défaveur des femmes, note Pascal Humbert, responsable des relations sociales décentralisées. Cela s'explique, notamment, par les maternités : durant leur absence, les femmes ne bénéficient pas des campagnes d'augmentations individuelles. De leur côté, par facilité, les managers ont surtout gratifié les salariés considérés comme plus disponibles ». Les statistiques de formation confirment, elles aussi, cet écart. En 2002, seulement 45 % des femmes en ont bénéficié (surtout les Atam et IC), contre 50 % chez les hommes. Le nombre d'heures de formation était, en outre, de 30 heures pour les femmes, contre 38,5 heures pour les hommes.

Démarche vertueuse, mais...

Les syndicats attendent beaucoup du futur accord. Selon Martine Colmagro, déléguée CFDT, et Marie-Josée Millan-Noirault, de FO, il s'agit de « rééquilibrer les salaires par des mesures pérennes » et de « construire des passerelles professionnelles par la formation continue », aussi bien pour favoriser la mixité des emplois et les réorientations de carrière que pour revaloriser certains métiers, comme ceux de l'assistanat. Marie-Josée Millan-Noirault trouve, malgré tout, la démarche vertueuse, mais incomplète : « Le top management n'a pas été pris en compte. Pourtant, seules 9 femmes en font partie, sur 256 personnes. »

L'essentiel

1Avant d'entamer la négociation d'un accord sur l'égalité professionnelle hommes-femmes, les partenaires sociaux de Schneider Electric ont tenu à réaliser un diagnostic approfondi et partagé.

2Il en ressort que les femmes voient leur carrière pénalisée par un manque de bagage technique, et leur rémunération freinée par leurs maternités.

3L'accord, qui devrait être signé d'ici à début décembre, portera, notamment, sur l'accès des femmes à la formation, en particulier technique, sur la neutralisation des absences parentales en matière de rémunération, et sur l'offre de services de garde d'enfants.

Schneider Electric Industries

>Activité : distribution électrique, automatismes et contrôle industriel.

>Chiffre d'affaires : 8,78 milliards d'euros en 2003 (dont 2,7 milliards en France).

>Effectifs : 12 000 salariés (hors filiales), dont 34 % de femmes (50 % parmi les ouvriers, 39 % chez les Atam et 11 % d'ingénieurs et cadres).

Les six thèmes de négociation

Recrutement

Objectif : intégrer plus de femmes qualifiées et ne pas sexuer les offres proposées en interne.

Piste d'action : renforcer la présence de Schneider Electric dans les forums d'orientation.

Formation

Objectif : assurer l'égalité d'accès à la formation continue pour les hommes et les femmes et leur offrir le même nombre d'heures de formation centrées sur l'acquisition de compétences techniques.

Piste d'action : aménager des cursus ciblés par métiers.

Mixité des emplois

Pistes d'action : intégrer davantage d'hommes dans les emplois réputés féminins, et inversement ; proposer des réorientations de carrière par la formation.

Politique salariale

Objectif : garantir une égalité de traitement.

Pistes d'action : utiliser les notes d'instruction ou de procédures pour demander aux managers de garantir, à performance égale, l'absence d'écart de rétribution ; élaborer un mécanisme permettant de neutraliser, pour les hommes et les femmes, l'impact des absences liées à la maternité ou à la paternité.

Evolution professionnelle

Objectif : favoriser les carrières féminines.

Piste d'action : proposer aux femmes des cursus débouchant sur des postes techniques.

Articulation vie professionnelle et vie familiale

Piste d'action : offrir des services comme la garde d'enfants, en mutualisant les moyens de Schneider, des entreprises voisines et des collectivités.

Auteur

  • Laurent Poillot