Le projet de la future autoroute Amiens-Lille-Belgique a inauguré une nouvelle manière de travailler au Centre d'études techniques de l'équipement Nord-Picardie (Cete). L'ambition de cette entité rattachée au ministère de l'Equipement ? Faire en sorte que les salariés travaillent les uns avec les autres et non plus les uns à côté des autres. Pour le Cete Nord-Picardie, il s'agit, en fait, de l'aboutissement d'une vaste réflexion sur la gestion des connaissances et la capitalisation des savoirs.

« Créé dans les années 1960, le Cete a, pendant longtemps, fonctionné avec du personnel non titulaire qui y réalisait la quasi-totalité de sa carrière », explique Raymond Zingraff, chargé de mission «gestion de la connaissance» au Cete Nord-Picardie. Une sédentarité qui, si elle assure le développement et l'approfondissement de l'expertise de ces salariés, pose aussi un problème lors de leur départ à la retraite. Un sujet qui devient prégnant dans le courant des années 1980. « Le risque était grand, en effet, de voir partir leur savoir-faire technique et, par ricochet, de mettre à mal nos prestations concurrencées par les bureaux d'études privés », ajoute ce dernier.

En 1997, la chose est entendue : il faut conserver la mémoire de l'entreprise. Trois ans plus tard, les opérations prennent un tournant très concret avec l'évaluation «grandeur nature» de plusieurs solutions logicielles de travail collaboratif et de gestion documentaire. Livelink, de l'éditeur Open Text, est finalement retenue pour « sa simplicité d'utilisation avec le navigateur Internet, son outil de recherche d'information jugé le plus intéressant et la personnalisation de ses espaces de travail », énumère Raymond Zingraff. Dans la foulée, une équipe dédiée est mise en place, épaulée par la Cegos.

Très vite, le calendrier du Cete fait du projet du tracé de l'autoroute Amiens-Lille-Belgique le chantier test pour le déploiement de Livelink. Au sommaire : règles de fonctionnement et de paramétrage, organisation des espaces, gestion des droits... « Encadrés par leur chef de projet et notre équipe, ainsi que par un correspondant ad hoc délégué auprès d'eux, 30 chargés d'études, répartis sur une dizaine de lieux, se lancent, le 4 décembre 2002, et pour cinq mois, avec un système totalement opérationnel, indique Raymond Zingraff. Nous l'avons complété par un workflow qui automatise les questions et autres sollicitations du public adressées à nos collaborateurs. »

Depuis, cinq autres projets sont entrés dans l'ère du travail collaboratif. Ils le sont après l'étude de critères précis comme « le nombre d'agents, l'importance du projet, l'impératif de transversalité, mais aussi la potentialité que le projet peut recouvrir en termes d'adhésion des salariés à cette nouvelle manière de travailler », explique le chargé de mission. Un argument de taille, surtout lorsque l'on sait que les habitudes ont la vie dure. « Ici, les différents chargés de projet travaillaient avec leur PC, de manière assez individualiste. De temps en temps, ils partageaient quelques données via des échanges mails. Ces environnements de travail commun supposent, au contraire, une complète transparence », détaille Arnaud Waeters, consultant de la Cegos.

Reste, également, à responsabiliser chacun des collaborateurs sur la publication de sa production, qui peut se révéler utile à d'autres. « Ce qui suppose, au préalable, lors de l'accompagnement, la définition de règles du jeu. Au Cete, elles ont été élaborées avec l'équipe de Raymond Zingraff et avec le chef du premier projet concerné », précise le consultant. Il y a bien encore, ici et là, quelques vieux réflexes comme la copie de fichiers sur le disque dur, l'envoi de documents aux collègues par la messagerie... Pour Raymond Zingraff, satisfait de la tournure des événements, il faudra ecore du temps pour qu'une culture de conduite de projet en équipe s'installe totalement.

>Activité : centre d'études techniques (ministère de l'Equipement).

>Effectifs : 400 salariés.