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Les Pratiques

Eramet réussit un reclassement par jour

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 19.10.2004 | Thierry Butzbach

La fin de l'usine de ferromanganèse a cristallisé les inquiétudes d'un bassin d'emploi peu florissant, dans une région déjà durement touchée par les plans sociaux. Pourtant, seul un tiers des ex-Comilog reste encore à reclasser, un an après la dernière coulée de minerai.

En septembre 2003, l'annonce de la fermeture de Comilog a provoqué un véritable séisme à Boulogne-sur-Mer. Il faut dire que l'énorme usine métallique qui barre le paysage boulonnais, et dont l'origine remonte à 1857, fait partie intégrante du patrimoine local. Si Comilog n'est, certes pas, le premier employeur de la ville, cette filiale d'Eramet contribue néanmoins au rayonnement de cette dernière, en assurant plus de la moitié des activités du port.

Dans une agglomération où le chômage flirte avec les 13 %, la mise sur le carreau de 351 salariés (et sans doute autant à venir chez les sous-traitants) accable les 45 000 habitants de la ville, qui se refusent à tirer un trait sur l'outil de travail de tant de générations. « C'est comme si Michelin fermait à Clermont-Ferrand », résume un habitant. Cette dimension historique et symbolique explique peut-être l'attitude des représentants des salariés. Tout en s'interrogeant sur un éventuel « gâchis industriel », les syndicats ont d'autant moins cherché à mettre le feu aux poudres que Comilog a su prendre ses responsabilités. Malgré quelques actions d'éclat destinées à peser sur les négociations, le plan de sauvegarde de l'emploi a été élaboré en moins de deux mois, après la tenue de trois comités d'entreprise.

Indemnité complémentaire

Ce PSE prévoit, notamment, le versement d'une indemnité, complémentaire aux indemnités légales de licenciement, de six mois de salaire, plafonnée à 15 000 euros. La durée du congé de reclassement a été portée de six à neuf mois pour les salariés de plus de 50 ans (ils sont 110). Enfin, le plan prévoit l'ouverture d'une cellule de reclassement pour une durée de dix-huit mois. Au total, « l'accompagnement financier s'élève à 30 000 euros par personne », calcule Christine Deram, la DRH. Avec la comptabilité et la sécurité, elle fait partie de l'équipe restreinte d'une quinzaine de personnes chargée du démantèlement et de la dépollution du site, qui devraient s'achever d'ici à fin 2006.

Dès le départ, chacun sait que trouver une solution pour chaque salarié ne sera pas facile. Une vingtaine ont accepté les offres de reclassement interne (en France et à l'étranger) proposées par le groupe Eramet, et une trentaine d'autres, âgés de plus de 56 ans, ont fait l'objet de mesures de préretraite.

Mobilité réduite

Pour les autres, l'avenir paraît moins favorable. D'abord en raison de leur profil : un âge moyen de 44 ans, plus de vingt ans d'ancienneté et une mobilité géographique réduite. Mais aussi parce que le plan social de Comilog intervient juste après ceux de Lu et de Metaleurop. « Beaucoup d'entreprises de la région avaient déjà été consultées pour reclasser les salariés de ces entreprises », souligne Emile Merey, consultant du cabinet IDRH, à la tête de la cellule de reclassement de Comilog, qui souligne l'ampleur de sa tâche : « Avec 349 reclassements sur un seul site, ce plan est l'un des plus importants en France. »

Vingt reclassements par mois

A mi-parcours, l'antenne affiche un rythme moyen de vingt reclassements par mois, soit quasiment un par jour ouvré. Alors que les congés de formation s'achèvent pour les plus de 50 ans (ils se sont terminés fin juin pour les plus jeunes) et que les ex-salariés toujours sans emploi ont basculé dans le régime général, l'équipe de la cellule a réussi à replacer 169 d'entre eux en CDI (dont 98 % dans la région). Soit près des deux tiers des 274 reclassements dont elle s'était vu confier la charge depuis décembre 2003. Prudent, Emile Merey préfère parler de « situations en cours d'aboutissement », car 50 % de ces reclassements concernent des salariés encore en période d'essai.

Entreprises solidaires

Ces résultats prouvent que la solidarité n'est pas un vain mot. « Nombreuses sont les entreprises qui ont eu un réflexe citoyen et ont embauché des anciens de Comilog », indique Emile Merey, qui sait pourtant que plus la partie avance, plus elle sera rude : « Même si les licenciements ont eu lieu au fil de l'eau, les placements restant à réaliser vont concerner des profils de plus en plus délicats. »

Tenu de reclasser ses salariés, Comilog était également obligé de favoriser la création d'autant d'emplois locaux qu'elle en supprimait. L'usine métallurgique a donc déboursé 500 000 euros pour financer l'installation des centres d'appels Armatis, qui doit créer 250 emplois à Boulogne. Puis, elle a chargé la Sodie de trouver le complément d'embauches en développant des projets d'entrepreneurs. Si la facture globale reste encore à établir, « Comilog a dépensé ce qu'il faut », assure Christine Deram.

Auteur

  • Thierry Butzbach