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Jamais sans mon entreprise

Dossier | publié le : 12.10.2004 |

Les salariés veulent bien capitaliser pour la retraite, mais avec l'aide de leur entreprise. Articles 83 et 39, Perco, Pere... : DRH et spécialistes des avantages sociaux construisent en ce moment leur offre avec le meccano des dispositifs de la loi Fillon.

Sale temps pour les cigales. Avec la dégradation annoncée des retraites par répartition, le discours préventif, entamé avec la réforme Fillon, sur la nécessité d'épargner pour ses vieux jours, s'est généralement poursuivi dans les grandes entreprises. Les salariés comprennent qu'ils doivent désormais jouer les fourmis... Mais ne veulent pas préparer l'hiver tout seuls.

67 % d'entre eux, interrogés par la société Novacy, il y a quelques semaines, demandent un coup de main à leur entreprise. Celle-ci, devant les banques et la Sécurité sociale, devient le premier interlocuteur en matière de retraite, indique l'enquête annuelle du Club de l'épargne salariale, rendue publique le 11 octobre (lire aussi p. 16). Message enregistré du côté des directions et des DRH, d'autant plus facilement que nombre d'entre elles sont déjà équipées de dispositifs d'épargne. Et que les cadres dirigeants sont devenus prescripteurs d'épargne salariale longue dans les PME, depuis la loi Fabius et ses larges possibilités de défiscalisation des sommes investies, ou de régimes à prestations définies dans les grands groupes.

Deux outils stars

Que proposer aux salariés soucieux de financer leur retraite ? Parmi les propositions de la loi Fillon, deux dispositifs devraient, à l'avenir, jouer les stars de la préparation des retraites en entreprise : le Perco, dans l'univers de l'épargne salariale, qui impose l'indisponibilité des fonds jusqu'à la retraite contre une défiscalisation intéressante, des versements volontaires, éventuellement abondés par l'employeur, et une sortie en rente ou en capital ; et l'article 83, issu de l'univers de l'assurance, qui est un régime de retraite supplémentaire collectif et obligatoire, dans lequel l'employeur s'engage à verser une cotisation, complétée, en général, par le salarié. Le régime fiscal et social, à l'entrée, est intéressant aussi ; la sortie ne s'effectue qu'en rente.

Pivots des dispositifs de retraite

Ces deux champions devraient constituer, en fonction des objectifs de l'entreprise, de sa structure des salaires et de sa pyramide des âges, les deux grands pivots autour desquels vont s'articuler les dispositifs de retraite des salariés. Le Perco part avec un peu d'avance, alors que les assureurs se lamentent de devoir attendre les décrets précisant le régime des charges sociales qui pèsera sur l'article 83. Ils devraient être fixés dans quelques semaines et peuvent, sans doute déjà, se réjouir d'un cadre favorable. Le régime social est, en général, établi, en cohérence avec le cadre fiscal, déjà précisé et avantageux pour ce dispositif.

Si les réflexions sont en cours, Yves Le Nail, directeur des retraites par capitalisation et de l'assurance vie chez Ionis, souligne qu'elles pourraient se poursuivre quelque temps : « Les décrets sont récents, voire encore attendus pour certains ; le dispositif Sarkozy de déblocage exceptionnel de l'épargne salariale perturbe, en ce moment, les entreprises, qui manquent de visibilité ; enfin, le salaire direct conserve les faveurs des salariés par rapport à une rémunération différée. »

Signatures de Perco

Pourtant, quelques Perco ont, d'ores et déjà, été signés, le plus important d'entre eux étant une création, chez Sanofi-Aventis (lire p. 20). D'autres arrivent, avec la transformation d'un PPESV antérieur, comme chez Unilever, où un avenant a été signé par les partenaires sociaux. C'est aussi le cas de Total, depuis le 29 septembre dernier. L'Oréal vient, également, de se déterminer. Les quelques PPESV existant en France devront, d'ailleurs, suivre rapidement le même chemin, puisque la loi les transforme automatiquement en Perco au 1er janvier prochain. Les salariés auront alors le choix de rester investis (pour 40 ans au lieu de 10) ou de reverser leur épargne dans le PEE de leur entreprise.

Les atouts de l'article 83

L'article 83 part un peu en retard, mais pas sans atouts. Certaines entreprises ont continué à en signer depuis la loi Fillon. Beaucoup d'autres l'ont substitué à un régime à prestations définies (article 39), bien plus difficile à contrôler financièrement.

« Dans de nombreux cas, une entreprise cherche à fermer un article 39 tout en faisant une proposition pour une plus large population, précise Gilles Beneplanc, directeur général de Mercer HRC. En tout état de cause, il y a toujours un aspect «retraite des dirigeants» dans les cahiers des charges qui nous sont proposés. » Et, pour ce gratin de l'organigramme, l'article 39, forme d'engagement de l'entreprise sur une rente à servir à la retraite, reste incontournable. Cas classique, la population éligible au «39» se réduit de manière drastique à quelques dirigeants, tandis que les cadres, et parfois les employés, se voient proposer un «83».

Gilbert Gurcel, directeur d'Arial Assurance, filiale d'AG2R et de La Mondiale, défend, en outre, le «83» pour son rendement : « Contrairement aux autres produits, il reste adossé à l'actif général d'une société d'assurance et présente des gages de performances solides, contrairement au Pere, par exemple, pour lesquels la loi oblige au cantonnement des actifs. »

Outsiders

Le Pere, justement, fait partie des outsiders de la loi Fillon. Il s'agit d'un régime hybride associant le volet obligatoire d'un article 83 et un volet facultatif et individuel de type Perp. Le décollage difficile de ce dernier auprès du grand public augure mal, pour l'instant, de solutions Pere dans les entreprises. « Nous notons peu de curiosité des entreprises sur le sujet », indique Francis Wright, spécialiste des rémunérations et des benefits chez Hewitt Associates. Néanmoins, Axa, par exemple, a déjà prévu une offre de Pere «packagée», et d'autres assureurs sont sur la ligne de départ.

Du sur-mesure

Enfin, promus par des acteurs différents - les banques d'un côté, les assurances de l'autre -, épargne salariale et régimes collectifs devraient pourtant être faits pour s'entendre dans certaines entreprises. C'est, par exemple, le calcul de Coca-Cola France, où les cotisations employeur/salarié dans l'article 83 devraient être revues en légère baisse, au bénéfice d'un abondement dans un Perco à venir. Dans le meccano des retraites, le sur-mesure est, évidemment, le bienvenu.

L'essentiel

1La dégradation annoncée des prestations des régimes par répartition fait réfléchir les salariés. Beaucoup se disent, désormais, prêts à capitaliser pour améliorer leur retraite.

2Parmi eux, plus des deux tiers comptent sur l'entreprise pour les aider financièrement. Celle-ci commence à faire des retraites l'un des éléments d'une politique de rémunération globale.

3Parmi les dispositifs prévus pour épargner au sein de l'entreprise, et selon les objectifs recherchés, deux constitueront vraisemblablement la base des propositions de l'employeur : l'article 83, de type assurantiel, et le Perco, nouveau plan d'épargne salariale de long terme.