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Les Pratiques

Un parc «biotechnologique» pour sauver l'emploi

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 05.10.2004 |

D'ici à la fin de l'année, Aventis aura définitivement retiré toutes ses activités de R & D du site historique de Romainville. Après quatre ans de lutte, les syndicats n'ont toujours pas dit leur dernier mot.

Un groupe pharmaceutique clair sur ses ambitions mondiales et ses stratégies financières, face à des syndicats mobilisés sur des enjeux de santé publique et de bilan social. Tel pourrait être le résumé de la lutte interminable entre Aventis et ses syndicats, autour de la fermeture du site de recherche en médicaments de Romainville (93).

« La décision remonte à 2000, dès la naissance d'Aventis », relate François Leborgne, délégué syndical CFDT. Le nouveau groupe possède, alors, deux centres de R & D de taille importante, sur Romainville et Vitry (94). Romainville est jugé redondant. Des reventes sont tentées, mais sans succès (lire encadré chronologie).

Aventis envisage, alors, de conserver Romainville, par une réorganisation de ses centres de recherche en Ile-de-France. Mais, en 2002, le groupe change de directoire et d'orientations. Il redéfinit ses axes thérapeutiques prioritaires tels que le cancer, le diabète ou les maladies cardio-vasculaires. « Il est décidé d'externaliser la recherche sur les anti-infectieux, jugée moins stratégique, sur le modèle de celle sur les maladies de l'os, transférée au sein de l'entreprise Proskelia, où Aventis garde une participation minoritaire », explique Jack Caillod, le DRH d'Aventis Pharma. Or, il s'agit des spécialités de Romainville.

Réindustrialisation

Les syndicats se battent bec et ongles contre ce revirement stratégique. Ils font feu de tout bois : la grève, le refus de signer les ordres du jour, les demandes de contre-expertises, une conférence de presse à l'Assemblée nationale pour présenter leur contre-projet (Néreïs), des manifestations dans les rues de Romainville. La CGT et FO vont en justice contre le premier projet de réorganisation, gagnant en première instance et en appel, mais perdant devant la Cour de cassation. Les pouvoirs publics sont également interpellés : tour à tour, le président du conseil général et le préfet de Seine Saint-Denis, puis le président du conseil régional d'Ile-de-France vont s'émouvoir du sort de Romainville.

Avec un certain succès : en mars 2004, Aventis signe une convention avec la préfecture de Seine-Saint-Denis pour réindustrialiser le bassin d'emploi. Elle est centrée sur la création d'un parc d'activités en biotechnologie, baptisé Biocitech. « L'impact de la fermeture sera neutre sur l'emploi », s'engage Jack Caillod. Le groupe investira entre 7 et 10 millions d'euros. Et, d'ici à la fin 2005, 1 035 emplois doivent être créés. Il y en avait 152 fin août.

Fatigués, mais encore mobilisés, les représentants du personnel tentent toujours de se battre contre le projet d'externalisation de l'activité anti-infectieux, en réclamant des rapports d'expertise, et en refusant de donner leur avis en comité central d'entreprise. Un appel de personnalités publiques a été lancé, le 29 septembre, demandant l'intervention du président de la République.

Les syndicats s'affirment motivés par des arguments humanitaires et des considérations de santé publique. Pour Thierry Bodin, délégué syndical CGT, il est inconcevable qu'un groupe abandonne ainsi un savoir-faire, alors même que la demande existe : « La mission d'Aventis n'est pas que de générer du cash. Ils ont une obligation envers la société. »

Des structures plus dynamiques

Aventis refuse de voir les choses sous cet angle. Les «Big Pharma» sont plus adaptés aux produits de grande masse, nécessitant de gros investissements. « La recherche sur les anti-infectieux devrait pouvoir se développer au sein de structures de taille, certes, moins importante, mais offrant un cadre plus dynamique », insiste la direction. Des structures qu'il reste encore à attirer sur Biocitech.

Chronologie

1999 : naissance d'Aventis, fusion de Rhône-Poulenc avec Hoechst.

2000 : Aventis tente de revendre le site de Romainville (93), à DuPont, puis à Pierre Fabre, sans succès.

Avril 2001 : projet d'intégration du centre, par des transferts d'activité et des recentrages. Opposition des syndicats devant la justice.

2002 : recentrage stratégique du groupe. Filialisation de la recherche sur les maladies osseuses. Nouveau projet de restructuration des centres de recherche franciliens.

Octobre 2003 : départ de la procédure de fermeture du centre de recherche de Romainville.

Janvier 2004 : OPA de Sanofi-Synthelabo sur Aventis.

Mars 2004 : signature d'une convention pour la réindustrialisation de Romainville. Projet de filialisation de la recherche sur les anti-infectieux.

Novembre 2004 : fin des congés de reclassement.

Mars 2005 : sortie prévue des salariés.

Le PSE

>Objectif : passer de 2 210 salariés (au 31 juillet 2002), sur les 5 centres de R & D Aventis en Ile-de-France, à 1 660.

>Licenciements : 736 (606 suppressions de poste + 130 refus de transfert) sur les sites de Romainville, Croix de Berny et Vitry.

>Bilan : 616 «solutions», dont 188 reclassements internes, 238 mesures d'âge, 80 reclassements sur Biocitech, 110 formations de reconversion ou reclassements externes ; 120 personnes sans solution, dont une centaine ayant plus de 50 ans.